Culture

«Book Club Le Matin» : Fouad Laroui invité des Escales littéraires (2/2)

Fouad Laroui a clôturé, le 9 juin, les Escales Littéraires, organisées en marge du Salon international de l’édition et du livre (SIEL 2023). Son Roman «30 jours pour trouver un mari» est un recueil d’histoires traitant de questions existentielles, sous des airs de conversations badines.

17 Juin 2023 À 10:05

Your browser doesn't support HTML5 audio

La rencontre avec Fouad Laroui autour de son dernier roman a dévoilé un fait important. L’auteur est d’abord un nouvelliste qui se prête, pour les besoins de l’édition, à l’exercice du roman. Et bien qu’il soit honoré d’un Prix Goncourt de la Nouvelle, il nous apprend que ce concours n’est pas aussi tapageur que le Goncourt du roman. Mais l’auteur se délecte de raconter ses histoires, dans une langue raffinée, au ton parfois faussement enjoué… Et le lecteur s’en donne à cœur joie.

De happy end

Dans «30 jours pour trouver un mari», tous les débuts des histoires racontées au Café de l’univers sont authentiques. Fouad Laroui, en parfait storyteller, s’en saisit pour concevoir un récit autrement plus saisissant, avec une morale poignante. C’est ainsi qu’il écrit la plupart de ses histoires dans lesquelles se reconnaissent les protagonistes. Durant l’Escale littéraire, l’écrivain nous raconte comment il a pris une anecdote concernant un vol de bouquet de fleurs sur une tombe chrétienne, pour en faire une réflexion humaniste. «Une amie d’El Jadida m’a un jour raconté cette histoire (…) Elle passe à côté du cimetière chrétien et voit un beau bouquet de fleurs déposé sur une tombe. Elle s’en saisit et comme prise par un démon, elle s’en va avec. Ce qu’elle ne voit pas, c’est qu’il y a un gardien et qui la poursuit (…). Heureusement que c’est un gros fumeur, parce qu’il arrête de lui courir après et l’histoire s’arrête là», se désole l’auteur qui y voit le début d’une plus belle histoire. Il décide alors de la finir en imaginant une histoire à la personne enterrée dans ladite tombe. Il présume que c’est une Française venue dans les années 1930, institutrice qui aimait vraiment le Maroc et qui a laissé des traces positives auprès des habitants de la ville, contrairement à ce que l’on peut penser des Français en période du protectorat.

De fin tragique

Les récits du livre peuvent se distinguer en histoires finissant bien et d'autres mal. «Si toutes les histoires finissaient bien ce serait bien mièvre. Il y a des histoires qui se prêtaient à la happy end, d’autres pas», explique l’auteur. C’est le cas de l’histoire de «L’homme qui gâchait tout». Inspirée par la vie d’un cousin mort tragiquement, Fouad Laroui questionne la conduite d’échec chez certaines personnes, qui les pousse à tout gâcher alors qu’ils ont tout pour réussir. «Ma tante m’avait dit : “Il a gâché sa vie, mais heureusement qu’il a eu un bel enterrement !” Cette phrase m’a obsédé. Comment pouvait-il gâcher son enterrement ? Alors j’ai essayé d’écrire l’histoire à l’envers et finir sur cette phrase absolument authentique, pour voir ce que ça peut avoir comme implications philosophiques», s’étend l’écrivain.

Qui connaît l’histoire ?

À travers les différentes histoires racontées dans «30 jours pour trouver un mari», une réflexion se dégage : Nous sommes toutes et tous des personnages dans plusieurs histoires. Et si notre histoire était supérieure à la somme de celles qu’on racontait de nous ? Interpellé sur cette question, l’écrivain se souvient de cet ami décédé, dont la veuve raconte une histoire totalement différente de celle qu’il connaît de lui. «Je ne le reconnaissais pas. La morale serait qu’il ne faut surtout pas se confronter aux histoires qui se racontent sur nous, sinon on est mal partis. D’ailleurs, c’est exactement le sens de cette phrase célèbre, mais très mal comprise de Sartre, quand il dit “L’enfer c’est les autres”. La vraie signification c’est que l’enfer, c’est quand on laisse entrer en nous ce que les autres pensent ou disent de nous. La manière dont les autres nous voient devient pour nous un enfer (…) donc, le mieux pour ne pas vivre dans un enfer perpétuel, c’est d’avoir nous-mêmes notre propre vision de ce que nous sommes, de ce que nous voulons», conclut Fouad Laroui.

Lire aussi : «Book Club Le Matin» : Fouad Laroui invité des Escales littéraires (1/2)

Copyright Groupe le Matin © 2024