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Nouvelle charte de l’investissement : priorité aux projets créateurs d'emplois (Entretien)

Les mesures d’accompagnement prévues par la nouvelle charte de l’investissement, l’agenda de publication des textes d’application, investissement et disparités territoriales... autant de points abordés par Hicham Chaoudri, le directeur de l’investissement au ministère de l’Investissement, de la convergence et de l’évaluation des politiques publiques, dans cet entretien accordé au «Matin».

Hicham Chaoudri, le directeur de l’investissement au ministère de l’Investissement, de la convergence et de l’évaluation des politiques publiques

15 Février 2023 À 16:20

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Le Matin : La création de l’emploi et la libération des énergies du secteur privé sont les principaux objectifs attendus de la nouvelle charte de l’investissement. Quelle est la stratégie qui a été mise en place pour les atteindre ?

Hicham Chaoudri : Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu L’assiste, avait appelé, lors de son discours d’ouverture au Parlement le 8 octobre 2021, à l’adoption, dans les meilleurs délais, d’une «nouvelle charte compétitive de l’investissement». Nous sommes donc aujourd’hui très satisfaits du fait qu’après son adoption en Conseil des ministres et au Parlement, la loi-cadre 03.22 a été publiée au Bulletin officiel en décembre dernier. De plus, le premier décret d’application, relatif au dispositif de soutien principal et au dispositif de soutien aux projets stratégiques, a été adopté en Conseil du gouvernement le 26 janvier 2023.r>Les mutations économiques, sociales et environnementales de ces dernières années ont rendu impérative une réforme de la politique de l’État en matière d’investissement. De plus, la conjoncture actuelle, en dépit des difficultés qu’elle implique, présente des opportunités que le Maroc doit saisir et nous estimons que cette nouvelle charte peut être un outil clé pour la dynamisation de l’investissement privé dans notre pays.

En effet, le principal objectif de cette nouvelle charte est la création d’emplois stables et pérennes. Comme vous le savez, le niveau d’investissement dans notre pays est parmi les plus élevés au monde, mais son rendement demeure faible puisqu’il est porté majoritairement par le secteur public et qu’il est notamment orienté vers des secteurs peu créateurs de valeur ajoutée et d’emplois. Cet investissement public a permis au Maroc de bâtir, pendant deux décennies, des infrastructures aux standards internationaux. Toutefois, il est devenu aujourd’hui impératif de donner le relais à l’investissement privé et d’améliorer son impact sur la croissance économique.r>La nouvelle charte a donc été conçue pour inciter le secteur privé à investir plus et à investir mieux. En effet, ce sont les secteurs les plus créateurs d’emplois qui sont fortement primés dans le dispositif. La charte a été conçue avec une vision claire : qu’elle soit transparente et facilement lisible par l’investisseur, qu’elle soit très attractive et que les critères d’éligibilité et les primes soient objectifs et ne laissent aucune place à l’interprétation. Cette charte de l’investissement s’adresse, pour la première fois, à tous les investissements, petits et grands, et à tous les investisseurs, étrangers comme nationaux.

La correction des disparités territoriales constitue également un contenu central de la nouvelle charte de l’investissement. Pensez-vous que cet objectif est facile à atteindre ?

En effet, la nouvelle charte accorde une place très importante à la réduction des disparités territoriales en matière d’investissement. Le constat est clair : les investissements privés dans notre pays sont concentrés à plus de 60% dans l’axe Casablanca-Rabat-Tanger. Or le potentiel en matière d’investissement dans les autres régions est considérable. À cet effet, la charte de l’investissement prévoit des primes territoriales pouvant aller jusqu’à 15% du montant total de l’investissement si le projet est réalisé dans des provinces ou préfectures accusant un retard en matière de développement humain.

Pour définir le niveau de prime par territoire, un travail d’analyse du niveau de développement des 75 provinces et préfectures a été réalisé en tenant compte de critères objectifs tels que le PIB par habitant, le taux de chômage et le taux de pauvreté. Ce travail de fond a permis de segmenter ces provinces et préfectures en 3 catégories qui bénéficieront d’une prime additionnelle variant entre 0 et 15%. La liste des provinces et préfectures par catégorie sera fixée par arrêté du Chef du gouvernement, sur proposition du ministère de l’Intérieur. Par ailleurs, dans l’esprit de la Régionalisation avancée, il convient de noter une avancée majeure prévue par la nouvelle charte de l’investissement en matière de déconcentration administrative : toutes les conventions d’investissement du dispositif principal d’un montant inférieur à 250 millions de dirhams seront élaborées, approuvées et signées à l’échelle régionale.

Quels sont les autres apports de la charte d’investissement, particulièrement dans ce contexte marqué par l’implémentation d’un nouveau modèle de développement ?

En plus des apports en matière de promotion des secteurs productifs fortement créateurs d’emplois et de recherche de réduction des disparités territoriales, la nouvelle charte de l’investissement prévoit plusieurs autres nouveautés. La première est qu’elle offre, pour la première fois, un cadre pour les investissements stratégiques. Les projets seront considérés stratégiques s’ils sont réalisés dans le secteur de l’industrie de la défense ou s’ils sont d’un montant d’investissement supérieur ou égal à 2 milliards de dirhams et qu’ils ont un impact considérable sur l’économie nationale. L’impact est jugé «considérable» si le projet :r>• contribue à assurer la sécurité hydrique, énergétique, alimentaire ou sanitaire du Maroc,r>• a un impact important sur le nombre d’emplois directs ou indirects à créer,r>• a un impact sur le rayonnement économique et le positionnement stratégique du Maroc à l’échelle internationale,r>• a des effets d’entraînement sur le développement d’écosystèmes,r>• contribue au développement et à l’appropriation des technologies d’avant-garde.r>La deuxième nouveauté de la charte de l’investissement est qu’elle prévoit également, pour la première, fois un dispositif de soutien pour les investissements directs marocains à l’étranger. En effet, l’État soutiendra les projets d’entreprises marocaines à l’international si, bien entendu, ils ne détruisent pas de valeur ou d’emplois dans le Royaume. Ces investissements sont déterminants pour notre pays puisqu’en plus d’avoir un impact économique direct sur la croissance des entreprises nationales, ils contribuent également au rayonnement du Royaume dans le monde et notamment en Afrique. Pour ce dispositif, un décret d’application est en cours de préparation pour définir les critères d’éligibilité et le type de soutien que l’État mettra en place.

Une troisième nouveauté, et pas des moindres, est que la charte de l’investissement soutiendra également les projets portés par les très petites, petites et moyennes entreprises. En effet, aujourd’hui, 96% de l’investissement privé dans notre pays est réalisé par les grandes entreprises, or ce sont les TPME qui créent le plus d’emplois. Par conséquent, un dispositif pour soutenir l’investissement de ces entreprises, qui devront être traitées de manière différenciée s’il s’agit de PME, de TPE ou de startups, sera décliné dans un décret d’application propre.

Parallèlement aux dispositions de la charte, ne pensez-vous pas qu’il y a aussi des mesures d’accompagnement qui doivent être décidées ?

La loi-cadre 03.22 portant charte de l’investissement est articulée autour de 3 axes. En plus des dispositifs de soutien, elle instaure également le cadre de mise en œuvre et de suivi des chantiers structurants relatifs à l’amélioration de l’environnement des affaires et à la facilitation de l’acte d’investir et d’entreprendre. Ces chantiers sont au nombre de sept :r>1. La simplification et la digitalisation des principales procédures liées à l’acte d’investir et d’entreprendre ainsi que la finalisation de la déconcentration des mesures en relation avec l’acte d’investir.r>2. L’amélioration de l’accès au foncier, notamment public.r>3. Le renforcement de la compétitivité logistique.r>4. L’amélioration de l’accès à une énergie décarbonée et compétitive.r>5. La facilitation de l’accès au financement et la diversification des modes de financement.r>6. Le renforcement et l’ajustement de l’offre de formation professionnelle aux besoins des entreprises.r>7. La promotion de la recherche & développement et de l’innovation.r>Ces chantiers d’amélioration de l’environnement des affaires, qui ont connu des progrès importants ces dernières années, seront accélérés pour faciliter au maximum l’acte d’investir et d’entreprendre et répondre aux principales problématiques rencontrées aujourd’hui par le secteur privé.

Après l’adoption du premier texte d’application en lien avec la charte de l’investissement, peut-on s’attendre prochainement à une libération des autres textes réglementaires prévus ?

Afin de donner de la visibilité à l’ensemble de nos concitoyens, nous avons tenu à inscrire clairement dans la loi-cadre 03.22 les délais d’approbation et de publication des 3 décrets d’application de cette charte de l’investissement. Ainsi, le décret d’application relatif au dispositif de soutien principal et au dispositif de soutien spécifique applicable aux projets à caractère stratégique devait être approuvé au maximum 3 mois après la publication de la loi-cadre au Bulletin officiel. Il a été approuvé en Conseil de gouvernement après seulement un mois et demi. Le deuxième décret d’application, relatif au dispositif de soutien destiné à encourager le développement des entreprises marocaines à l’international, devra être approuvé dans un délai n’excédant pas 6 mois à compter de la même date, soit juin 2023. Le travail est en cours et devrait être finalisé avant les délais fixés.

Enfin, le troisième et dernier décret d’application, relatif au dispositif de soutien spécifique destiné aux très petites, petites et moyennes entreprises, doit être publié dans un délai n’excédant pas 12 mois à partir de la date de publication de la loi-cadre au Bulletin officiel, soit décembre 2023. Les délais sont clairs et tous les acteurs concernés sont mobilisés pour mettre en œuvre la nouvelle charte de l’investissement afin de recueillir rapidement ses premiers effets sur notre économie.

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