28 Février 2023 À 14:44
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Les temps sont durs. En une année, les prix des denrées alimentaires ont explosé et cette situation semble s’éterniser. Malgré de légères baisses enregistrées ces deux dernières semaines pour certains produits comme l'affirme le gouvernement, la majorité des prix reste élevée pour les ménages marocains, d'autant plus que le mois de Ramadan approche à grands pas.
«Le gouvernement a promis que les prix baisseront progressivement d’ici Ramadan, alors nous attendons. Pour l’instant, les prix des légumes et la viande sont toujours très élevés. Il n’y a que le prix de la tomate qui a reculé de 13 à 8 DH, ce qui n’est pas vraiment à la portée. Les prix de certains produits essentiels dans nos cuisines comme l’huile et le beurre ont connu une hausse importante ces derniers mois et personne n’en parle », se plaint Fatiha, 50 ans. «C’est très dur de faire face à la cherté des denrées alimentaires. Nous nous privons de plusieurs plats que nous aimons et que nous avions l’habitude de consommer. Pourtant, nous déboursons aujourd’hui pratiquement le double de ce que nous dépensions avant, alors que nos revenus n’ont pas augmenté », ajoute-t-elle.
Face à l’inflation, les Marocains se débrouillent comme ils peuvent. Chacun sa formule. Pour gagner quelques dirhams sur les fruits et légumes, certaines personnes font leurs achats en groupe au marché de gros. «Quand j’ai vu des collègues au travail faire leurs courses en groupe au marché de gros, j’ai décidé de proposer cela à mes voisins. J’ai réussi finalement à convaincre quatre d’entre eux. Nous achetons les besoins de la semaine en fruits et légumes ensemble et nous les partageons. Chacun de nous fait les courses à tour de rôle chaque samedi matin. Cela revient moins cher et nous permet d’économiser entre 20 et 100 DH par semaine, ce qui n’est pas rien par ces temps», témoigne Mehdi, 34 ans.
Pour gratter sur leurs dépenses, des gens passent leur temps à scruter les bonnes affaires. Sur les réseaux sociaux, dans les marchés, les grandes surfaces… elles ne font leurs achats que si elles sont sûres d’avoir le meilleur prix. «Avec l’inflation, il faut apprendre à dépenser intelligemment. Je suis devenue la Pro des promotions et des bonnes affaires ces derniers temps. Avant je n’y accordais pas une grande importance, mais aujourd’hui je n’achète rien si ce n’est pas une bonne affaire», nous confie Hasnaa, 42 ans. «Je fais le tour des épiciers, super marchés, grande surfaces, réseaux sociaux… pour m’assurer d’avoir le meilleur prix. J’ai découvert que les mêmes produits sont proposés à des prix différents chez divers commerçants. Même si cette méthode me prend plus de temps, cela me permet de faire des économies et d’acheter d’autres choses pour me faire plaisir ainsi qu’à ma famille», poursuit-elle.
Les réseaux sociaux, en particulier Instagram et Youtube, sont devenus un moyen de partager les opérations "petits prix" sur des produits de consommation courante. De nombreux influenceurs traquent les meilleures promotions au grand bonheur de leurs followers qui attendent avec impatience qu’ils les partagent avec eux. Ils passent leurs journées à parcourir les rayons des grandes surfaces et magasins de grande distribution. Ils font même parfois le tour des souks et filment les bonnes affaires pour les compiler ensuite dans des vidéos ,qui sont généralement très appréciées du public marocain, et enregistrent rapidement un grand nombre de vues. Et pour fidéliser leur communauté, les influenceurs, en particulier les femmes, enchainent souvent avec des vidéos «astuces» pour les aider à adopter de nouvelles habitudes qui leur permettent de mieux gérer leur temps et éviter de faire des courses inutiles.
La hausse des prix des denrées alimentaires est le sujet de préoccupation dominant dans les conversations des citoyens, mais aussi de certains professionnels tels que les restaurateurs. Ces derniers se disent être à bout de souffle. Ils souffrent depuis plusieurs mois et ont du mal à s’adapter à la situation actuelle. «Alors que l’activité des restaurateurs n’a pas encore retrouvé son niveau d'avant-pandémie, nous sommes obligés aujourd’hui de faire face à la cherté des denrées alimentaires. Cette situation a un impact direct sur le chiffre d’affaires des restaurateurs qui a chuté», déclare au «Matin» Noureddine El Harrak, président de l’Association nationale des propriétaires et gérants des cafés et restaurants (ANCRM), qui regroupe 30.000 établissements. «Les marges de bénéfices ont diminué considérablement.
Pour certains, il n’y a même plus aucune marge de bénéfice mais ils préfèrent attendre que la situation s’arrange prochainement au lieu d'augmenter les tarifs. Cela pourrait décourager les clients qui souffrent aussi à cause de la flambée des prix. Malheureusement, 20% des professionnels ont été obligés de fermer leur café ou restaurants ou changer d’activité car les pertes étaient énormes», déplore-t-il. A noter que de nombreux cafés et restaurants ont revu leurs tarifs à la hausse. Le président de l’ANCRM estime que la situation critique du secteur n’est pas uniquement due à la cherté des prix des produits alimentaires mais également aux fortes hausses des taxes urbaines adoptées par certaines collectivités territoriales, notamment dans les villes de Casablanca et Rabat.
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