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Cannabis thérapeutique : 5.430 opérations de contrôle réalisées en 2025

De la clandestinité à la lumière, la filière marocaine du cannabis vit une métamorphose historique. Le bilan inédit dressé par le ministre de l'Intérieur, Abdelouafi Laftit, pour l'année 2025, l'atteste : une expansion spectaculaire, avec 7.052 agriculteurs et près de 5.000 hectares cultivés, mais une croissance farouchement encadrée. L'État brandit en effet l'étendard de la rigueur, comme en témoigne le retrait de 111 licences et la réalisation de plus de 5.400 opérations de contrôle. Preuve que cette nouvelle ère légale se veut, dès ses fondations, celle de la traçabilité et de la conformité la plus stricte.

16 Octobre 2025 À 18:13

Le Ministère de l'intérieur a dressé un bilan sans précédent de la régulation du cannabis à usage industriel et médical. Son chef, Abdelouafi Laftit, a dévoilé le retrait de 111 licences d’exploitation en 2025 dans le cadre du processus de la régulation du cannabis à usage industriel et médical. D’après le ministre, cette mesure a été prise à l’encontre d’opérateurs pour manquements aux règles. Cette décision s’inscrit également dans le cadre d’une vaste campagne de contrôle menée par l’Agence nationale de régulation des activités liées au cannabis, garante du respect du cadre légal de cette filière en construction.

Un maillage serré de contrôles sur l’ensemble du territoire

Répondant à une question écrite du groupe parlementaire du Mouvement populaire, le ministre a dressé un bilan général destiné à l’usage industriel et médical. Le haut responsable gouvernemental a indiqué dans ce sens que l’agence a réalisé 5 430 opérations de contrôle jusqu’à la fin août 2025. Ces inspections ont couvert l’intégralité de la chaîne de valeur : de la culture à la commercialisation, en passant par la transformation et le transport.

Dans le détail, les contrôles agricoles sont ainsi arrivés en tête avec 2 801 opérations, suivis de 1 557 vérifications concernant le transport de la plante et de ses dérivés. Viennent ensuite 642 opérations liées à la commercialisation, 300 sur l’importation de semences, 71 sur la transformation et 59 sur l’exportation. Des chiffres qui témoignent, selon le ministre, d'une volonté affirmée de garantir la traçabilité et d’imposer une rigueur normative dans un secteur encore en phase de consolidation.

Une filière agricole en profonde métamorphose

On apprend par ailleurs que la régularisation a provoqué une transformation radicale du monde rural dans les zones concernées. Le nombre d’agriculteurs engagés dans la culture légale du cannabis est ainsi passé de 430 en 2023 à 7 052 en 2025, soit une multiplication par plus de seize. Ces cultivateurs sont désormais structurés au sein de 413 coopératives de production, bénéficiant d’un encadrement technique et administratif renforcé.



Notons que cette dynamique s’est accompagnée d’une explosion des surfaces cultivées, passées de 192 hectares en 2023 à 4.729 hectares en 2025, sachant que la province de Taounate concentre la plus grande part avec 2.045 hectares exploités par 2.612 agriculteurs, suivie de Chefchaouen (1.341 hectares pour 1.417 exploitants) et d’Al Hoceïma (1.343 hectares pour 1.492 agriculteurs). Des chiffres qui illustrent la rapide structuration d’une filière autrefois informelle, désormais intégrée à l’économie légale.

Sélection renforcée et montée en gamme

Toutefois, il convient de souligner que malgré l'expansion spectaculaire des superficies, le nombre total de licences délivrées a, contre toute attente, légèrement baissé : de 291 en 2023 (au profit de 138 opérateurs) à 235 en 2025 (bénéficiant à 165 opérateurs). Selon M. Laftit, ce recul s’explique par une politique de sélection plus exigeante des bénéficiaires sachant que les 165 opérateurs autorisés se répartissent entre 44 coopératives de transformation, 23 exploitants individuels et 98 entreprises marocaines. Les autorisations couvrent quant à elle désormais tous les maillons de la chaîne : importation de semences, transformation, transport, commercialisation, exportation et création de pépinières. Cette approche intégrée, «de la graine au produit fini», reflète la volonté gouvernementale d’instaurer un modèle économique vertueux et durable.

L’émergence d’un marché national structuré

Côté commercialisation, la dynamique est également significative. L’Agence marocaine des médicaments a enregistré 68 produits à base de cannabis (42 compléments alimentaires et 26 produits cosmétiques). Dix d’entre eux, conformes aux normes de sécurité sanitaire, sont déjà disponibles sur le marché national via 644 points de vente (475 pharmacies, 95 parapharmacies, 71 grossistes et 3 boutiques spécialisées). Cette diversification marque l’ancrage progressif des produits légaux du cannabis dans les circuits de distribution classiques.

Le Maroc s’impose sur la scène internationale

Sur le plan extérieur, le Royaume a franchi une étape stratégique. Une commission technique interministérielle a supervisé les premières exportations de résine de cannabis réglementée vers plusieurs pays, dont la Suisse, la République tchèque, le Portugal, le Canada, l’Afrique du Sud et l’Australie. En parallèle, des compléments alimentaires, des cosmétiques et de l’huile de CBD ont été exportés vers la France et l’Afrique du Sud. Ces premières transactions inaugurent une diplomatie économique fondée sur la qualité, la conformité et la transparence. Il est clair que l’année 2025 confirme ainsi que le Maroc ne se contente plus d’encadrer une culture historique : il construit un écosystème économique complet et intégré, résolument tourné vers l’avenir.
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