Nation

Les défis de la protection des droits de l’Homme face à la montée de l’IA et des réseaux sociaux

Dans une société en perpétuelle mutation, marquée par l’essor des technologies numériques, la protection des droits de l’Homme se retrouve face à des défis inédits. C’est ce qu’a souligné Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, lors d’une journée d’étude organisée mercredi dernier à la Chambre des représentants. Si l’usage des technologies numériques, de l’intelligence artificielle et des réseaux sociaux ouvre de nouvelles perspectives pour l’accès aux droits fondamentaux, il génère également des préoccupations majeures, mettant en lumière les risques liés à leur utilisation.

20 Décembre 2024 À 13:10

«La protection des droits de l’Homme fait face à de nombreux défis contemporains», a souligné Abdellatif Ouahbi. Dans un discours prononcé en son nom par Fatima Berkane, secrétaire générale de la Délégation interministérielle aux droits de l’Homme, M. Ouahbi a indiqué que les bouleversements actuels, provoqués par l’émergence de nouvelles questions sociétales, redéfinissent les frontières entre droits et devoirs, libertés et responsabilités, notant que ces technologies numériques occupent une place centrale dans ces mutations. «Ces technologies permettent une égalité d’accès sans précédent à des droits fondamentaux, comme la liberté d’expression ou encore l’éducation et la santé. Toutefois, leur utilisation irresponsable constitue une véritable menace pour nos sociétés», a-t-il averti.



L’ambivalence justement des réseaux sociaux, à la fois vecteurs de liberté et de risques, a été soulignée par le ministre. «Ces plateformes sont devenues le théâtre de pratiques préoccupantes: atteintes à la vie privée, prolifération de fausses informations, incitation à la haine et à la violence. Ces phénomènes, fragilisent la cohésion sociale et nécessitent une réponse adaptée», affirme-t-il. Pour faire face donc à ces défis, le chef du département de la Justice a formulé une série de proposition. M. Ouahbi a souligné d’abord l’urgence d’adapter les lois nationales. Il a préconisé une réglementation claire des violences facilitées par les technologies numériques et une meilleure protection des femmes, tant dans les espaces publics que professionnels. Le ministre a également plaidé pour le renforcement des mécanismes de protection et de recours, en facilitant les signalements de violations des droits et en durcissant les sanctions à l’égard des auteurs de ces actes.

La prévention a constitué aussi un axe central du discours du ministre de la Justice. En effet, M. Ouahbi a appelé à ancrer une véritable culture des droits de l’Homme chez les jeunes et auprès de l’ensemble des citoyens. Cette sensibilisation, estime-t-il, doit s’étendre aux questions émergentes telles que l’usage des technologies numériques, l’intelligence artificielle et les réseaux sociaux, mais aussi les enjeux environnementaux et climatiques. Enfin, le ministre a souligné l’importance de l’engagement dans les efforts internationaux pour développer des normes adaptées aux nouveaux défis.

Droits de l’Homme et espace numérique : vers une régulation éthique

Dans le même sillage, Amina Bouayach, présidente du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), a rappelé que la liberté d’expression devait être élargie pour inclure les nouvelles formes de communication dans l’espace numérique. Dans une intervention lue en son nom par Mohammed Hachimi, directeur des études et de la recherche au Conseil, Mme Bouayach a mis l’accent sur la nécessité de la mobilisation de moyens juridiques, éducatifs et culturels pour lutter contre la désinformation et les discours contraires aux droits humains. Elle a également plaidé pour une culture de la citoyenneté numérique. Cette approche, selon elle, garantit une participation sécurisée et responsable des individus et des groupes, tout en renforçant les capacités des acteurs face aux défis posés par la fragmentation des médias et l’absence de normes éthiques dans les publications virtuelles.

L’intelligence artificielle, a-t-elle poursuivi, impose de nouveaux défis aux droits de l’Homme, notamment en matière de protection de la vie privée et des données personnelles. Le CNDH préconise ainsi l’élaboration d’un cadre juridique national qui régule l’usage de ces technologies dans une perspective fondée sur les droits humains. Les secteurs sensibles, tels que la santé et l’éducation, devraient être prioritaires. Enfin, Mme Bouayach a mis en garde contre les risques posés par certaines applications numériques pour les enfants et les groupes vulnérables. Elle a appelé à un équilibre entre le progrès technologique et la protection des droits et libertés fondamentaux, tout en soulignant l’importance d’anticiper les impacts de ces technologies pour préserver une société inclusive et respectueuse des droits de tous.
Copyright Groupe le Matin © 2024