Les journalistes arabes adoptent la déclaration de Laâyoune et réaffirment la marocanité du Sahara
Des journalistes venus de nombreux pays arabes se sont donné rendez-vous les 19 et 20 octobre dans la capitale du Sahara marocain, Laayoune. Une occasion qui a permis de tenir une réunion importante du secrétariat général de la Fédération des journalistes arabes (FAJ). Une assemblée qui a une signification à forte connotation politique par rapport au dossier du Sahara Marocain et qui a abouti à des recommandations stratégiques pour contrer les campagnes de manipulation informationnelle.
Brahim Mokhliss
20 Octobre 2025
À 17:35
En visite au Maroc depuis quelques jours, les journalistes arabes membres de la Fédération des journalistes arabes (FAJ) se sont rendus au cœur des provinces du Sud pour participer à deux événements majeurs : la réunion de haut niveau du secrétariat général de la FAJ et la rencontre panarabe sur la souveraineté médiatique, placée sous le thème «La souveraineté médiatique : défendre la raison et la conscience face à la désinformation». Mais la délégation arabe a également été témoin d’un moment d’euphorie collective lorsque la population de Laâyoune a envahi les rues pour célébrer le sacre historique de l’équipe nationale marocaine U20, championne du monde de football au Chili.
Le plan d’autonomie, seul cadre pour une solution définitive
Réunie dimanche 19 octobre à Laâyoune sous la présidence de Mouayad Al-Lami, en présence de la majorité absolue de ses membres, la FAJ a considéré que le projet d’autonomie présenté par le Maroc constituait «le seul cadre garantissant un règlement juste et définitif de ce conflit artificiel». La Fédération a particulièrement salué les efforts de développement observés dans les provinces du Sud, après avoir visité plusieurs infrastructures structurantes de la région : le Centre hospitalier universitaire (CHU), le nouveau stade, les terrains de proximité, les piscines, la médiathèque, les espaces verts et les établissements scolaires, Khaymat Sahafa – en construction –, des projets dont beaucoup ont été réalisés par la municipalité de Laâyoune. Au-delà des questions liées au Sahara marocain, les participants ont débattu de diverses problématiques d’ordre professionnel, politique et relatives aux droits de l’Homme qui prévalent dans les pays arabes.
La déclaration de Laâyoune
Après la présentation politique et organisationnelle importante par laquelle le président de la Fédération a inauguré les travaux de cette réunion, et après des discussions approfondies et responsables, les participants ont convenu de publier ce qu’ils ont appelé «la déclaration de Laâyoune». Selon ce document, «la Fédération des journalistes arabes, alors qu’elle tient la réunion de sa direction dans ces circonstances délicates et difficiles que traverse la nation arabe, réaffirme ses positions constantes envers les causes justes de la nation arabe, au premier rang desquelles la cause palestinienne qui fait face, dans les circonstances actuelles, aux menaces les plus graves visant à enterrer cette cause juste et les revendications légitimes qui y sont liées».
Crimes de guerre : les journalistes, cibles délibérées
La Fédération a également renouvelé «la condamnation des crimes de guerre, de génocide et de purification perpétrés par les forces d’occupation israéliennes contre le peuple palestinien à Gaza, en Cisjordanie, au Liban, en Syrie et au Yémen, depuis plus de deux ans. Ces crimes ont fait jusqu’à présent plus de 70.000 martyrs et des milliers d’autres martyrs sous les décombres, des centaines de milliers de blessés et de personnes handicapées, ainsi qu’une destruction totale de toutes les manifestations de la vie à Gaza, au Liban et en
Syrie».
La FAJ a également enregistré que «l’occupation israélienne a délibérément ciblé les journalistes et les médias, tuant délibérément et de manière planifiée plus de 250 journalistes à Gaza et plus de 12 journalistes au Liban et en Syrie, ce qui représente un crime sans précédent dans l’histoire des conflits dans le monde. Elle a insisté pour empêcher l’entrée de journalistes étrangers, empêchant ainsi la présence de témoins directs de l’atrocité des crimes perpétrés contre le peuple palestinien».
En conséquence, la Fédération a appelé les organisations professionnelles internationales à former une commission d’enquête internationale pour établir tous les faits concernant les crimes commis par l’occupation contre les journalistes et les médias, et à déposer une plainte officielle devant la Cour pénale internationale pour garantir que les criminels ne restent pas impunis. Dans ce contexte, la FAJ a annoncé qu’elle était en train de préparer une initiative arabe pour un soutien effectif et réel aux collègues journalistes palestiniens à Gaza. Cette initiative sera précédée par une visite d’une délégation formées des dirigeantes de la Fédération à Gaza pour rencontrer les collègues journalistes et les familles des martyrs.
Appel à la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu
Après avoir noté l’importance de l’accord de cessez-le-feu contre le peuple palestinien, qui garantit la fin des crimes perpétrés et la libération d’un grand nombre de prisonniers palestiniens, ainsi qu’une fin immédiate du blocus injuste contre le peuple palestinien, en particulier à Gaza, la déclaration de Laâyoune insiste sur «la demande aux États parrains de cet accord et aux pays médiateurs d’obliger l’occupation israélienne à se conformer aux clauses de cet accord, y compris la fin définitive du blocus et des agressions israéliennes contre Gaza, le Liban, la Syrie et le Yémen, et le lancement immédiat des programmes de reconstruction de Gaza, et par conséquent la reconnaissance immédiate de l’établissement d’un État palestinien avec Jérusalem comme capitale».
Liberté de la presse en danger dans le monde arabe
Au-delà des questions géopolitiques, la rencontre de Laâyoune a également permis d’aborder les défis professionnels. En effet, la Fédération a «alerté sur le danger de la détérioration de la liberté de la presse dans de nombreux pays arabes, à travers le ciblage des journalistes et des institutions médiatiques et les restrictions imposées au travail journalistique, avec les graves répercussions que cela a sur l’avenir du journalisme et des médias dans les pays arabes». La FAJ a appelé au développement des lois sur la presse et la publication dans les pays arabes, et au développement des compétences, à travers la formation continue et l’acquisition de compétences pour faire face aux défis posés par les énormes transformations technologiques en cours dans le secteur du journalisme et des médias.
Un diagnostic alarmant de l’espace médiatique arabe
Dans un contexte marqué par l’essor des technologies numériques et la prolifération de la désinformation, la Fédération des journalistes arabes a tablé sur cette rencontre panarabe régionale tenue à Laâyoune les 19 et 20 octobre 2025, en présence de représentants de syndicats de journalistes de plusieurs pays arabes, pour débattre de ce nouveau contexte. Les participants ont dressé un constat préoccupant : les médias se sont transformés en «villages minuscules» à l’ère de la révolution technologique qui a dépassé toutes les frontières géographiques et bouleversé les sociétés. De nouveaux outils sont apparus pour exercer la liberté d’expression, mais ils ont également engendré des effets négatifs à plusieurs niveaux. La rencontre a notamment identifié la prolifération de pratiques malveillantes sur les plateformes de réseaux sociaux, ainsi que l’émergence de défis externes liés à la protection des citoyens contre la désinformation, les fausses nouvelles et la manipulation des faits.
Des campagnes de désinformation ciblant le monde arabe
Les travaux de la rencontre portant sur la «souveraineté médiatique» ont mis en lumière l’existence de campagnes de désinformation sophistiquées visant l’espace arabe. Ces opérations utilisent des mensonges et rumeurs conçus pour apparaître comme des informations authentiques, dans le but de déformer les faits et de semer la division. Ces campagnes s’appuient sur des mécanismes et outils avancés, utilisant des images et des vidéos manipulées, une falsification systématique de l’histoire, et la création de récits et de slogans destinés à semer la confusion parmi les citoyens, instiller la peur et la méfiance, et faire entrer des agendas étrangers.
L’impératif d’une souveraineté médiatique arabe
Face à ces défis, la déclaration de Laâyoune insiste sur la nécessité de développer une souveraineté médiatique comme «extension naturelle de la souveraineté des États». Cela implique la formulation d’un récit national indépendant, le soutien aux médias locaux et l’établissement d’un cadre juridique régulant les plateformes numériques mondiales opérant dans les frontières nationales. La déclaration affirme que la lutte contre la désinformation ne se limite pas à réprimer les voix dissidentes ou à restreindre les libertés. Il s’agit plutôt, dans son essence, «d’une bataille pour défendre la raison et la conscience, l’équilibre entre l’ouverture au monde et la protection de la société contre la falsification de l’information et la manipulation». Les signataires appellent à construire un modèle médiatique basé sur la crédibilité, l’investissement dans la formation d’une génération de professionnels capables de distinguer le vrai du faux, et une coopération intelligente face aux menaces sans limites connues. n