Société

Digitalisation de la santé: Voici les recommandations de l'Ordre des médecins

Oui à la digitalisation des systèmes de santé mais pas au détriment de l’éthique et de la déontologie médicales. Le Conseil national de l'Ordre des médecins affirme veiller au grain dans ce mouvement de numérisation qui a gagné la santé aussi.

L’éthique ne doit pas être considérée comme un frein au déploiement du numérique, mais un garant de sa qualité́ et de son humanisme dans les usages, estime Pre Amal Bourquia.

07 Décembre 2023 À 17:44

La première édition du Forum international de la santé digitale (e-Health), qui a eu lieu les 29 et 30 novembre dernier, a été l’occasion de mettre en lumière l'importance croissante de la technologie dans le domaine de la santé. Suite à cette rencontre, le Conseil national de l'Ordre des médecins (CNOM) a formulé des recommandations pour accompagner la transformation numérique du secteur de la santé.

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Le Conseil souligne ainsi que la digitalisation des systèmes de santé est aujourd’hui nécessaire, mais cela ne devrait pas se faire au détriment du respect de l’éthique et de la déontologie médicales. «Les avantages de la e-santé sont nombreux. On peut en citer une approche de soins plus personnalisée, une meilleure communication entre les prestataires de soins et les patients, un accès plus simple à l'information sur la santé et une meilleure gestion des données... Cependant, le potentiel des solutions numériques de santé est vaste et l’utilisation d’algorithmes et de données doit tenir compte de l’éthique et la déontologie médicale», déclare au quotidien «Matin» Pr Najib Amghar, secrétaire général du CNOM. Il rappelle également que les professionnels de la santé disposent d’un code de déontologie médicale qui régit l'exercice de la médecine en vue du respect de l'éthique. «Le Conseil national de l’Ordre des médecins veille au respect de ce Code par les médecins et essaye aujourd’hui de faire face aux contraintes et défis qu’impose la e-santé», souligne-t-il.

Pre Amal Bourquia, néphrologue et experte en éthique et communication médicales, indique, de son côté, que l’éthique ne doit pas être considérée comme un frein au déploiement du numérique, mais un garant de sa qualité́ et de son humanisme dans les usages. «L’application des principes de l’éthique médicale peut permettre d’avoir une réflexion sociétale sur ces nouveaux usages et de mobiliser des valeurs pour rendre les opérations de la e-santé légitimes», précise-t-elle.

e-santé, la transparence est de mise

D’après le CNOM, les principaux domaines de la e-santé qui nécessitent des lignes directrices en matière d'éthique médicale sont la relation médecin-patient, la médecine en ligne, la recherche en ligne, la qualité de l'information et la conduite éthique sur les sites web médicaux et de santé. Le Conseil appelle aussi à assurer la confidentialité et le respect du droit à l’information préalable aux soins et le consentement aux soins. «Le respect des principales règles éthiques permettra d’assurer le droit d’accès du patient à l'ensemble des informations concernant sa santé. D’où, l’importance d’encadrer l’accès aux données de santé, particulièrement lors d’échange et de partage de ces données», affirme Pre Bourquia. «Le contrôle des dispositifs médicaux nécessite également plus de transparence notamment dans le processus de certification des dispositifs médicaux. Les cliniciens ont besoin d’être informés des performances et des limites d’utilisation des éventuels dispositifs qu’ils pourraient recommander aux patients».

Le CNOM appelle, par ailleurs, à améliorer la télémédecine. «Cette pratique médicale utilise les nouvelles technologies d’informations et de communication. Elle est complémentaire et non concurrente à la médecine classique et ses avantages ne sont plus à démontrer. Elle est régie par un cadre juridique bien défini par : la Loi 09-08, la Loi 131-13 et ses articles 99-1000-102, le Décret n° 2.18.378 (2018) et le Décret n° 2.20.675 (2021)», indique Pr Amghar. «En revanche, il est nécessaire de créer un cadre réglementaire clair pour une intelligence artificielle (IA) plus éthique digne de confiance. Compte tenu du manque d’exigences actuelles en matière de transparence, de traçabilité et de surveillance humaine, l’adoption d’une loi dans ce sens paraît nécessaire. Elle permettra une meilleure évaluation de la manière d'intégrer correctement l'IA en tant qu'outil de santé numérique dans la pratique des soins de santé», poursuit le secrétaire général du CNOM. Ce dernier affirme, en outre, que pour atteindre ces objectifs, il est nécessaire d’avoir recours à des amendements réglementaires portant sur le Code de déontologie et les lois régissant l’exercice de la médecine et l’instance ordinale (Code de déontologie publié au BO le 17 juin 2021). Ces règles concernent surtout le respect du principe de consentement éclairé et du secret médical, la protection des données sensibles à caractère personnel, l’utilisation des moyens de communication sécurisés et des sites d’hébergement répondant aux normes de sécurité et promouvoir le principe d’équipe à l’accès aux soins.
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