Nabila Bakkass
15 Août 2024
À 17:37
L'été, généralement associé à la détente et aux
vacances, représente en réalité une période critique pour les centres de transfusion sanguine du Royaume. Tandis que de nombreux citoyens profitent de cette saison pour se reposer, ces centres doivent faire face à une demande en sang qui reste constante, exacerbée par une augmentation des
accidents de la route. La diminution des dons pendant cette période aggrave la pénurie et menace l'approvisionnement en produits sanguins essentiels. Contactée par nos soins, la directrice du
Centre national de transfusion sanguine et d'hématologie (CNTSH), Najia El Amraoui, nous assure que la situation est actuellement «sous contrôle», mais elle appelle à une mobilisation collective pour maintenir l'équilibre. Dre Hind Zejli, chef du Service de promotion et de coordination au
Centre régional de transfusion sanguine (CRTS), partage également cette préoccupation. Elle souligne que la pénurie estivale est un phénomène mondial, auquel le Maroc ne fait pas exception.
Cette dernière explique que parmi les causes principales de la pénurie de l’été, figurent les départs en vacances des donneurs, des étudiants universitaires, et du personnel des établissements de transfusion, déjà en sous-effectif en temps normal. De plus, ajoute-t-elle, la coïncidence des vacances de Aïd AlAdha avec celles de l'été entraîne des congés massifs. Dre Zejli précise que les réserves au CRTS de Casablanca-Settat ne dépassent pas les trois jours, rendant difficile la satisfaction des besoins en sang. Et de noter que le CRTS de Casablanca-Settat doit fournir au moins 600 poches de sang par jour pour desservir plus de 610 établissements, dont des institutions publiques et privées, des centres d'hémodialyse et le Centre hospitalier universitaire (CHU) de la région.
Une approche de proximité
Pour faire face à cette situation, les centres régionaux ont opté pour une approche de proximité accrue avec les citoyens. Selon Najia El Amraoui, des campagnes de sensibilisation ont été menées dans les corniches et lors des «Moussems». «Les partenariats avec la société civile ont également joué un rôle crucial, tout comme l’utilisation croissante des réseaux sociaux», ajoute la directrice du CNTSH qui tient à saluer l’effort qui a été déployé par l’ensemble des responsables et du personnel des différents centres régionaux. De son côté, Dre Hind Zejli indique que face à la pression que connaît le CRTS de Casablanca-Settat, ce dernier a dû diversifier ses actions. «Nous avons mis en place deux équipes mobiles par jour, réorienté les associations à petit effectif vers les centres, et utilisé les groupes Facebook pour promouvoir les dons», explique-t-elle. Et de préciser que son établissement collabore aussi avec les supporters des clubs sportifs de football comme le Raja et le Wydad, dont l’engagement citoyen dépasse les stades.
Dre Zejli note que les efforts déployés sont importants. Elle tient, toutefois, à alerter sur le fait que le Royaume peine encore à atteindre l'autosuffisance en produits sanguins et que le taux de donneurs par rapport à la population générale est actuellement de 0,92%, alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande un minimum de 1%. Dans ce sens, Najia El Amraoui précise que le Maroc a besoin de plus de 1.000 dons par jour pour satisfaire les besoins, un objectif difficile à atteindre en l'absence de donneurs réguliers. Elle rappelle également que la durée de conservation des produits sanguins varie : 42 jours pour les globules rouges et 5 jours pour les plaquettes.
Au-delà de l’été...
«Les efforts doivent être maintenus, car même si le défi du mois d'août est relevé, un autre obstacle se profile en septembre avec la rentrée scolaire qui détourne l'attention des parents et des élèves», souligne Najia El Amraoui. Pour gérer cette situation, la spécialiste appelle à une mobilisation générale et insiste sur l'importance de la participation active de chaque citoyen aux campagnes de don de sang. «Les efforts des centres de transfusion, des partenaires sociaux et des bénévoles sont cruciaux, mais ils doivent être soutenus par une mobilisation plus large et continue», précise notre interlocutrice.
Il est donc clair que le défi des dons de sang est présent tout au long de l'année, nécessitant un engagement constant des donneurs et une sensibilisation continue du public. Grâce à la solidarité et à l'engagement de chacun, le Maroc pourra espérer atteindre l'autosuffisance en produits sanguins et garantir des réserves suffisantes pour répondre aux besoins urgents de la population.