Le Matin : Le 8 juillet 2023, vous êtes entré dans le cœur des Marocains en décrochant le premier titre de champion d’Afrique U23, est-ce que ce jour a changé votre vie ? Est-ce que les gens vous reconnaissent facilement dans la rue, est-ce qu’ils viennent vous saluer ?
Issam Charaï : Beaucoup de choses ont changé dans ma vie. Nous avons écrit l’histoire du football marocain tous ensemble, avec la Fédération. Ma vie personnelle a beaucoup changé depuis. Dans la rue, beaucoup de gens me montrent leur affection et cela fait plaisir de voir que ce titre, cette victoire en terre marocaine, ont fait beaucoup de bien aux Marocains.
Je dois dire que les images de la finale contre les Égyptiens étaient extraordinaires. L’Égypte était le champion sortant, alors que nous nous étions une équipe en phase de construction. C’était une finale contre une équipe bien huilée avec des joueurs qui se connaissent très bien et qui ont des automatismes. C’était un grand défi à relever et on l’a relevé. Je remercie les joueurs et tous les gens qui ont contribué à remporter ce titre. L’image des parents des joueurs émus et touchés et la fierté des Marocains sont de fortes images qui resteront toujours gravées dans ma mémoire.
Qu’est-ce qu’un titre comme celui-ci peut comporter comme risque pour ces jeunes joueurs champions d’Afrique ?
Le risque, heu...
La grosse tête par exemple ?
Non je ne pense pas. Cette victoire est importante pour nous pour acquérir la mentalité de gagneur. Nous voulions mettre fin à cette étiquette de l’équipe qui jouait bien, talentueuse, mais qui n’arrivait pas à aller jusqu’au bout. On voulait se débarrasser de cette étiquette. Après, le risque d’attraper la grosse tête est possible si demain nous commençons à gagner tous les tournois disputés. Mais pour le moment, ce risque n’existe pas, parce que nous encadrons nos joueurs pour qu’ils puissent réussir leur carrière.
Êtes-vous plutôt autoritaire ou souple ?
Un peu les deux. Quand il faut être strict, je le suis, sinon après, on peut aussi rigoler, parce que le football, c’est du bonheur. C’est important aussi de donner cette joie aux joueurs, mais dans le respect des règles.
La Coupe d’Afrique est dernière nous, c’est un titre dont on est fier, maintenant on se projette vers les Jeux olympiques qui sont un grand rendez-vous sportif mondial. Qu’est-ce qui primera dans le choix des 18 joueurs, car vous n’aurez droit qu’à 18 joueurs, au lieu de 25 à la CAN ?
J’ai informé les joueurs juste après la victoire en Coupe d’Afrique que la liste pour les JO sera de seulement 18 joueurs. Nous étions 25 en Coupe d’Afrique. Maintenant, la liste est beaucoup plus réduite, mais ça c’est le football. C’est quelque chose que les joueurs doivent gérer mentalement. Nos choix dépendront de leur forme, des blessures, des clubs, parce que les JO se dérouleront en dehors de la date FIFA. J’ai confiance en la Fédération pour convaincre les clubs de libérer les joueurs dont nous aurons besoin. C’est un peu trop tôt pour le dire maintenant, mais toutes ces choses-là seront prises en compte. J’ai dit aux joueurs de disputer des minutes, de se montrer et Inchallah ils seront dans la liste.
Vous allez préférer les joueurs talentueux ou polyvalents, capables d’évoluer dans plusieurs postes ? Comment allez-vous procéder ?
Les joueurs polyvalents auront un petit avantage parce que l'effectif sera de 18 y compris les gardiens. Cela devient un peu compliqué dès qu’il y a un ou deux blessés. Les joueurs qui peuvent jouer dans plusieurs postes auront un petit avantage, mais bien évidemment, les autres qui jouent dans un seul poste doivent être les meilleurs à leur poste.
Avez-vous déjà une idée des 18 joueurs qui pourront faire le voyage à Paris ?
Non, parce les choix dépendent de plusieurs facteurs. Le football est très dur. Nous avons gagné cette Coupe d’Afrique, c’était magnifique. Maintenant, c’est une nouvelle page qui commence, nous devons gagner ou faire un bon résultat aux JO. Nous opterons pour les joueurs qui seront disponibles, en bonne forme, qui seront au niveau auquel nous voulons les avoir.
Vous aurez droit à trois joueurs âgés de plus de 23 ans, allez-vous faire appel à des joueurs de l’équipe nationale A ?
C’est une bonne question. On me l’a posée à plusieurs reprises, mais il est un peu trop tôt pour se prononcer. D’abord, il faut voir quels sont les postes qu’il faudra renforcer et se concerter avec le sélectionneur des A, Walid Regragui.
Il n’y aura pas de date FIFA durant cette période, Walid Regragui pourrait vous céder des joueurs...
Non, il n’y a pas de date FIFA durant la période des JO, mais les clubs doivent aussi être d’accord pour libérer leurs joueurs. Il y aura aussi une discussion avec l’entraîneur de l’équipe A parce qu’il connaît bien les joueurs. Pour moi, il y a trois critères pour prendre les joueurs de la sélection A, le plus important étant la volonté du joueur. Ce n’est pas toujours évident, car les joueurs font de longues saisons. Il y a également la volonté de l’entraîneur de l’équipe A et puis le besoin. S’il y a un jeune qui a les mêmes qualités qu’un joueur des A, nous pendrons le jeune. Mais si un joueur de l’équipe A possède de grandes qualités et qu’il a la volonté de venir aider les U23 avec son expérience et ses qualités, il sera le bienvenu.
D’ici le coup d’envoi des JO, il reste 4 dates FIFA, quel est votre programme de préparation pour arriver prêt à cette compétition ? Avez-vous un programme bien ficelé ?
Nous avons déjà affronté 11 équipes africaines. Nous connaissons bien le football africain. Je remercie la fédération qui nous arrange toujours des matchs amicaux contre de bons adversaires. Maintenant, nous devons nous préparer à affronter des équipes européennes, sud-américaines et asiatiques. Nous allons jouer plus de matchs contre ces nations-là que contre des équipes africaines. L’idéal serait de disputer encore un match contre une équipe sud-américaine, parce que nous avons déjà affronté le Brésil, un ou deux matchs contre des équipes nord-américaines (CONCACAF), deux équipes européennes et une ou deux équipes de l’Océanie.
Qui seront vos adversaires lors de la trêve internationale du mois d’octobre ?
Nous aurons un match contre l’Irak qui est déjà confirmé. C’est une bonne équipe. Nous sommes en discussion avec plusieurs autres sélections, notamment nord et sud-américaines. Ce n’est pas toujours facile d’organiser ce genre de matchs, surtout au niveau de la logistique. Les discussions sont en cours avec l’Argentine, la République dominicaine et les États-Unis.
Vous espérez jouer combien de matchs d’ici le coup d’envoi des JO ?
Comme je l’ai dit, il reste quatre stages avec deux matchs au minimum pour chaque rassemblement. Nous espérons avoir neuf matchs amicaux. L’idéal serait d’avoir dix matchs de préparation.
Après le titre de champion d’Afrique, est-ce qu’une médaille olympique est possible, peu importe sa couleur ?
Nous devons aller avec cet espoir. Comme je l’ai dit au début, le plus important était de gagner cette Coupe d’Afrique et de casser cette idée que nous ne pouvions pas gagner. Étant champion d’Afrique, nous avons cette responsabilité de bien représenter notre pays et l’Afrique. Nous avons le sentiment de pouvoir gagner une médaille aux JO. Nous irons aux JO avec cette idée de gagner. Nous allons tout faire, nous allons nous préparer pour rendre notre peuple fier. Il faut avoir cette ambition. C’est ce que nous essayons d’inculquer aux joueurs. Nous avons les capacités de décrocher une médaille.