Abderrahman Ichi
13 Décembre 2023
À 18:47
Pour que le sport au Maroc connaisse le même succès que le football, il devient urgent de trouver un financement durable et à la hauteur des aspirations. Le sport, qu’on le veuille ou pas, compte. Le sport a un impact sur tous les segments de la société, par l’insertion, la santé, l’
éducation, la mixité, l’inclusion, le
soft power... Les bénéfices récoltés par le Maroc lors de la dernière Coupe du monde 2022 sont inestimables. Ces bénéfices pourraient être multipliés par 10, voire plus, si toutes les disciplines sportives rayonnaient à l’international. Aujourd’hui, toutes les disciplines ne peuvent pas briller comme le
football, faute de moyens financiers conséquents et durables.
Aujourd’hui, le financement du sport se fait en grande partie par l’État à travers le ministère de l’Éducation, du préscolaire et des sports, a indiqué au «Matin»,
Moncef El Yazghi, spécialiste en politiques sportives au Maroc. «Le financement essentiel du sport provient de l’État, par le truchement du ministère des Sports qui délègue ses pouvoirs d’organisation aux fédérations. Chaque fédération est responsable, essentiellement, de la réglementation et du développement de la discipline sportive dont elle a la charge et qu’elle régit sur l’ensemble du territoire marocain». Ce financement étatique trouve sa source dans l’article 26 de la
Constitution : «Les pouvoirs publics apportent, par des moyens appropriés, leur appui au développement de la création culturelle et artistique, et de la recherche scientifique et technique, et à la promotion du sport. Ils favorisent le développement et l’organisation de ces secteurs de manière indépendante et sur des bases démocratiques et professionnelles précises».
2 milliards de dirhams de subventions du budget de l'Etat
En se référant à la loi de Finances 2022, le ministère de tutelle a réservé une enveloppe de 2 milliards de dirhams aux sports (hors investissement). Ce montant a été octroyé sous forme de subventions aux 55
fédérations sportives nationales existant au Maroc et qui opèrent dans divers domaines : sport collectif, sport individuel, sport de combat, sport mécanique, sport nautique, sport de cible, sport de raquette, sport de force, sport équestre, sport aérien, sport urbain, sport de montagne et sport d’esprit. Cet argent est distribué aux fédérations selon des critères qui ne sont pas bien définis. Officiellement, les aides versées aux 55 fédérations se font selon des contrats d’objectifs liant le ministère et les associations sportives et un cahier des charges à respecter. Mais ces deux critères ne sont que rarement respectés. Souvent, c’est le poids d’un président de fédération qui pèse au moment de mettre un chiffre sur le chèque. L’absence d’un système définissant les modalités d’octroi des subventions a donné lieu à des inégalités entre les fédérations. Moncef El Yazghi distingue dans ce sens trois sortes de fédérations : d’un côté celles qui n’ont que l’aide de l’état comme seul moyen de financement. Ces fédérations, note El Yazghi vivotent. De l’autre, celles qui ont à leur tête des présidents capables de financer de leurs propres moyens leurs activités sportives ou qui sont en mesure d’aller chercher des sponsors, en raison de leur réseau relationnel et, enfin, celles qui bénéficient d’une aide directe de l’État en plus de la subvention du ministère de tutelle.
El Yazghi a cité à ce sujet les fédérations de l’athlétisme et de football. Effectivement, sur instructions de
S.M.le Roi Mohammed VI, la Fédération de football bénéficie d’une aide annuelle de 75 millions de DH provenant de la CDG, l’OCP et Bank Al-Maghrib. Le fait que l’aide de l’État se focalise plus sur la
FRMF fait dire à Moncef El Yazghi que le Maroc a une politique footballistique et non pas une politique sportive.
Les collectivités locales, l’autre grand pourvoyeur de fonds des associations sportives
En plus de l’aide étatique, le financement des
associations sportives repose également en grande partie sur les collectivités locales (Conseil de la ville, Conseil de la région, Conseil préfectoral). Certes, il n’y a pas de chiffres exacts du montant global octroyé aux associations sur l’ensemble du territoire national, mais les collectivités apportent un soutien multiforme. L’aide peut être financière, en accordant des subventions directes aux clubs : c’est le cas des clubs de Casablanca qui bénéficient de l’aide du Conseil de la ville et de la région. Elle peut être sous forme d’équipements sportifs et parfois même sous forme d’organisation d’événements sportifs. Il faut noter que la majorité des terrains et des salles couvertes au Maroc appartiennent aux collectivités locales. Des infrastructures mises à la disposition des associations.
Le Fonds national de développement du sport, c’est 700 millions de DH par an
L’autre levier du financement du sport au Maroc est le Fonds de développement national du sport (FNDS). Ce fonds est alimenté par la Marocaine des jeux et des sports à hauteur de 700 millions de DH par an. Le FNDS constitue un levier financier au service de la politique du ministère des Sports. Ses ressources sont utilisées pour subventionner les fédérations sportives, pour accompagner les sportifs de haut niveau lors de leurs participations aux compétitions régionales, nationales et internationales et pour financer les grands projets d’infrastructures sportives, entre autres.
Le sponsoring, l’autre levier de financement des associations sportives
Ce levier marketing est utilisé généralement par les clubs de football professionnel et par la FRMF. La dynamique de sponsoring dans le football est créée par les résultats positifs du football marocain ces dernières années. D’autres sports, comme le golf, l’athlétisme et l’équitation, attirent également des sponsors.
En revanche, cette manne de sponsoring n’arrive pas aux autres disciplines sportives pour plusieurs raisons, à savoir la mauvaise gouvernance et l’absence d’une grande base qui suit ces disciplines. Il existe d’autres sources de financement, notamment les droits TV pour le football. La Fédération a cédé les
droits TV du football national à la SNRT moyennant 133 millions de DH par an. À cela s’ajoutent les recettes de la billetterie et de la vente d’article de sport. L’apport de ces deux derniers leviers restent faibles, sauf pour les clubs du Raja et du WAC qui disposent d’une grande base de supporters.