Industrie financière en Afrique : les défis à relever
L’industrie financière africaine vit une véritable révolution. Cette dynamique est portée par la digitalisation, l’open innovation et l’essor des fintechs. Mais ce mouvement positif ne doit pas occulter les nombreux défis qui persistent et qui astreignent le potentiel de ce secteur.
Le Baromètre révèle que la transformation digitale du secteur poursuit sa consolidation à travers l’adoption du Cloud, des outils digitaux et des infrastructures data.
Saïd Naoumi
07 Février 2025
À 11:30
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L’industrie financière africaine a encore de beaux jours devant elle. Accélération de la digitalisation, centralité de l’impact durable dans les modèles, réinvention des modes de partenariat via l’Open Innovation... les chantiers de transformation sont donc nombreux. Mais pour libérer pleinement son potentiel, l’industrie financière du continent doit aussi se repenser elle-même en profondeur. Il s’agit d’adapter sa gouvernance, renforcer sa gestion des risques, investir dans les compétences de demain... Bref, ce sont là autant de défis à relever par les écosystèmes financiers du continent.
C’est en substance la recommandation de Deloitte et Afis, consentie dans le tout dernier Baromètre de l’industrie financière africaine. Ce rapport offre une analyse des dynamiques de transformation actuelles en s’appuyant sur les réponses de plus de 60 acteurs issus de divers métiers et zones géographiques. À la lecture de ce document, 11 enseignements édifiants se dégagent sur les tendances, les dynamiques et les limites du développement de l’industrie financière en Afrique. Concrètement, en termes de prévisions économiques sur les trois ans à venir, le rapport indique que les fintechs sont les plus optimistes (confiance de 9,25/10), tandis que les marchés des capitaux sont les plus prudents. Pour la première fois, l’inflation devient la principale source d’inquiétude des acteurs de l’industrie financière dans le continent. En effet, plus de la moitié des sondés considèrent l’inflation comme leur principale préoccupation, prenant du coup le pas sur l’instabilité politique ou la cybersécurité. Par ailleurs, les professionnels du secteur perçoivent l’industrie financière africaine comme beaucoup moins attractive que par le passé. Quelque 67% estiment, en effet, que l’attractivité stagne ou qu’elle baisse. Le Baromètre révèle, en outre, que la transformation digitale du secteur poursuit sa consolidation à travers l’adoption du Cloud, des outils digitaux et des infrastructures data. Seuls 2% des sondés affirment avoir déployé un projet d’intelligence artificielle tandis que 71% sont en train de le faire ou y pensent. De même, la gouvernance du secteur se renforce avec notamment une croissance des administrateurs indépendants. Seuls 23% des conseils comptent aujourd’hui plus de 25% d’administratrices, mais cette proportion devrait plus que doubler à moyen terme, selon les projections de Deloitte et Afis. Le Baromètre souligne qu’une majorité d’institutions considèrent les risques ESG comme modérés ou faibles. Le fait est que les risques de non-conformité sont jugés les plus élevés devant les cyber-risques et les risques opérationnels.
Le continent gagnerait à clarifier les exigences réglementaires régissant l’industrie financière. D’ailleurs, d’après le sondage, seuls 55% des financiers jugent la clarté des exigences réglementaires comme satisfaisante alors que 66% trouvent que le cadre réglementaire n’est pas adapté à l’innovation. Pour les sondés, l’encadrement de la finance digitale demeure une priorité. S’agissant de la solvabilité et de la rentabilité, le Baromètre indique que 65% des institutions affirment que celles-ci se sont améliorées récemment, mais 28% notent une dégradation de la qualité des actifs. L’inclusion financière, priorité de l’ensemble de la profession, est freinée en premier lieu par le faible niveau d’éducation financière des populations et le manque de solutions digitales. Si les Telcos et les fintechs sont perçues à environ 95% comme des moteurs ou des innovateurs utiles pour la finance, les Gafa et BigTechs sont perçus comme étant encore peu impliqués, mais potentiellement disruptifs.