Moncef Ben Hayoun
12 Décembre 2023
À 19:25
La
Banque mondiale s’apprête à accorder au
Maroc un nouveau financement majeur. Il s’agit d’un prêt de 300 millions de dollars pour l’accélération de la
réforme de l’écosystème de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation. S’appuyant sur le programme du gouvernement, ce
prêt pour les résultats (PPR) aidera l’Exécutif à traduire sa vision en performances concrètes, en se concentrant sur des éléments clés et des objectifs qui vont accélérer le progrès de l’
enseignement supérieur et de la
recherche scientifique.
Le projet de réforme se penchera sur trois axes principaux visant à améliorer la pertinence des programmes prioritaires des universités publiques pour le
marché de l’emploi et à renforcer la
gouvernance de l’
enseignement supérieur et de la
recherche. Il s’agit de (1) l’amélioration de l’adéquation des programmes avec le marché du travail, (2) l’alignement de la recherche scientifique sur les standards internationaux et les priorités nationales ainsi que (3) l’amélioration de la gouvernance au niveau central et des universités. Selon le document du prêt, dont le journal «Le Matin» détient copie, le
Maroc a réalisé plusieurs avancées majeures dans le secteur de l’
enseignement supérieur au cours de la dernière décennie, mais pour que l’enseignement supérieur puisse jouer son rôle dans la transformation économique du pays, plusieurs obstacles profonds doivent être surmontés. Le nombre d’étudiants a plus que triplé en l’espace de huit ans, mais les allocations budgétaires du
gouvernement n’ont pas suivi le rythme de l’augmentation des inscriptions. La baisse du budget alloué à chaque étudiant a entraîné une détérioration de l’
environnement d’enseignement et d’
apprentissage dans les
universités publiques, en particulier du
ratio étudiants-professeurs. Bien que le nombre d’enseignants permanents soit passé de 12.036 en 2012 à 13.820 en 2017 et à 15.325 en 2021 dans les universités publiques, le ratio global étudiants/enseignants demeure élevé. En outre, la qualité académique globale et la pertinence des programmes diplômants pour le
marché de l’emploi nécessitent une amélioration pour aider à réduire certaines des contraintes liées à l’offre pour l’emploi des diplômés. Ceci bien que les réformes liées à la demande sur le marché de l’emploi soient encore plus cruciales, car le marché ne génère pas suffisamment d’opportunités pour les jeunes, en particulier ceux qui ont un niveau d’éducation élevé.
D’autres indicateurs, tels que la faible participation au
marché du travail et le sous-emploi, soulignent également les problèmes que rencontrent les
jeunes diplômés sur le marché de l’emploi. «Le fonctionnement de ce dernier et du système de développement des compétences limitent effectivement les perspectives d’emploi des jeunes Marocains», est-il souligné.
Au sujet de l’approche genre, même si des niveaux d’éducation plus élevés améliorent considérablement la situation des femmes sur le marché de l’emploi, réduisant ainsi l’écart avec les hommes, le système d’enseignement supérieur et les universités devraient déployer des efforts plus ciblés pour faciliter l’employabilité et la transition des femmes diplômées vers le marché de l’emploi.
Le système doctoral est confronté à plusieurs défis majeurs
Par ailleurs, le
système doctoral est confronté à plusieurs défis majeurs, notamment l’absence de sélection rigoureuse des candidats au
doctorat et de critères et processus d’admission structurés. S’ajoutent l’internationalisation, la qualité et la pertinence insuffisantes des programmes. Et ce n’est pas tout. Parmi les défis, la
Banque mondiale cite également la longue durée moyenne d’achèvement du doctorat, les taux d’abandon élevés et l’insuffisance du soutien financier et de l’environnement propice à l’apprentissage et à la recherche pour les
étudiants en doctorat.
D’un autre côté, l’un des principaux déterminants de la qualité des
programmes de doctorat est la qualité de l’environnement de recherche global dans lequel les candidats au doctorat poursuivent leurs études et leurs recherches. Cependant, la production de recherche au Maroc est en retard par rapport à d’autres pays de la région
Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), pour plusieurs raisons. Entre autres, on cite la faible participation des étudiants en doctorat aux groupes/réseaux de recherche (ce qui affecte la qualité des programmes de doctorat) ainsi que le faible niveau de recherche interdisciplinaire, de
partenariats de recherche université-industrie et d’internationalisation de la recherche. L’analyse de la Banque mondiale souligne, également, le manque de financement et de ressources pour créer un environnement de recherche favorable et attrayant ainsi que des problèmes de gouvernance, tels que le manque d’autonomie dans la prise de décision ou encore l’absence de normes minimales établies ou d’accréditation pour les centres de recherche, qui ont un impact sur la qualité de l’environnement de recherche et, en fin de compte, sur les résultats de la recherche.
Pour relever tous ces défis et mettre en œuvre le
nouveau modèle de développement, le ministère de tutelle a préparé donc un plan sectoriel transformateur : le
Plan national d’accélération de la transformation de l’écosystème de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, avec un accent mis sur les leviers accélérateurs de changement tels que la transformation numérique et la performance de la gouvernance. S’appuyant ainsi sur ce plan gouvernemental, le financement de la Banque mondiale aidera le gouvernement à traduire sa vision en résultats concrets pour accélérer le progrès de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, en assurant un suivi solide et un soutien important à la mise en œuvre.