Brahim Mokhliss
29 Juin 2025
À 17:32
Le siège central de l’
Union socialiste des forces populaires à Rabat a été, samedi 28 juin, le théâtre d'un débat politique intense. Face aux défis actuels, le parti historique de la gauche marocaine a choisi d'associer le monde académique et des intellectuels à la préparation de son douzième congrès national, prévu en octobre prochain (les 17, 18 et 19 du mois). Une démarche présentée par l'
USFP comme une volonté de repenser son projet politique dans un cadre scientifique et participatif, loin des logiques partisanes fermées.
Une évaluation critique de quatorze années d'application constitutionnelle
La première session, consacrée aux «Réformes constitutionnelles et construction démocratique au Maroc : acquis et défis», a constitué le moment fort de cette rencontre. Sous la direction de Abderrahim Chahid, président du groupe socialiste à la Chambre des représentants et président de la commission politique, cette session a réuni des personnalités influentes de la scène académique telles que Abdallah Saaf, Nadia Bernoussi et Abderrahim Manar Slimi.
«Le débat actuel porte sur la prospective d'une nouvelle vague de réformes constitutionnelles», a déclaré Abderrahim Chahid, pointant la «faiblesse» de certaines dispositions de la Constitution de 2011 qui n'ont pas trouvé leur voie vers la concrétisation. Le responsable socialiste s'est interrogé sur l'étendue de l'interprétation démocratique qu'a connue cette Constitution à travers trois expériences gouvernementales successives : celles dirigées par Abdelilah Benkirane, Saad Eddine El Othmani et Aziz Akhannouch.
Le professeur universitaire Abdallah Saaf, professeur de science politiques et directeur du Centre des études et recherches en sciences sociales, a souligné que «le développement démocratique ne passe pas nécessairement par une modification de la Constitution, mais plutôt par le développement des institutions». Il a insisté sur le fait que l'implication de l'USFP avec les universitaires et intellectuels constituait «un choix stratégique» face aux défis actuels.
De son côté, la professeure de droit constitutionnel Nadia Bernoussi a rappelé que «les revendications de réformes politiques et constitutionnelles ont été historiquement liées au parti de l'Union socialiste depuis la Constitution de 1962 jusqu'à aujourd'hui».
Les élections au cœur des enjeux démocratiques
La deuxième session, animée par Younes Moujahid, membre du bureau politique, s'est penchée sur les «Réformes politiques, élections et enjeux de la pratique démocratique». Cette session a vu les interventions de Kamal Lahbib, Saïd Khomri et Kamal El Hachoumi, qui ont disséqué les défis du processus électoral marocain.
Kamal Lahbib a insisté sur «l'importance des échéances électorales et le défi de la démocratie en tant que pratique effective basée sur l'intégrité et la transparence». Il a souligné la nécessité pour l'USFP «de faire partie d'un gouvernement fort pour mettre en œuvre ses programmes» et appelé à «rompre avec les pratiques négatives qui dominent le paysage électoral».
Kamal El Hachoumi a posé, pour sa part, une question centrale : celle de «la possibilité de l'action politique face aux contraintes et transformations actuelles». Il a dénoncé «l'absence d'un véritable espace de compétition politique honnête et intègre» et les imperfections d'un processus électoral qui «est parfois devenu un moyen de consommer la légitimité au lieu de la produire».
Le constitutionnaliste Saïd Khomri, abordant le sujet sous l'angle de la réforme constitutionnelle, a insisté sur le fait que «la construction démocratique et sa relation avec les échéances électorales dépendent de l'existence de véritables critères de concurrence entre les acteurs partisans».
Vers un renouvellement du projet politique
Vu les thématiques abordées, il clair que les enjeux en question sont de taille. Au-delà des débats sur les droits de l'Homme, l'État social et la régionalisation avancée qui ont ponctué cette journée, c'est bien la volonté de l'USFP de se renouveler qui transparaît. Comme l'a souligné Abderrahim Chahid : «Le document politique sera riche de toutes ces idées qui ont été soulevées lors de cette journée d'étude qui a ouvert des fenêtres sur des idées multiples».
Cette démarche participative, associant experts et militants, marque une rupture avec les pratiques adoptées jusqu’alors. Elle témoigne de l'ambition du parti de présenter en octobre prochain un projet politique à la hauteur des défis du Maroc contemporain, ancré dans ses valeurs historiques, mais résolument tourné vers l'avenir.
Un travail préparatoire tous azimuts
La rencontre politique de samedi 28 juin 2025 dernier s'inscrit dans un dispositif préparatoire plus large. Selon le secrétariat de la commission préparatoire, réunie le 24 juin sous la présidence de Youssef Iddi (président du groupe socialiste à la Chambre des conseillers), dix commissions thématiques travaillent actuellement à l'élaboration des documents du congrès : commission politique, commission des lois et règlements, commission des questions féminines, commission des Marocains du monde, commission de l'information du parti, commission culturelle, commission jeunesse et sports, commission économique et sociale, commission des relations extérieures et commission finances et logistique.