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Manifestations violentes des jeunes : l’Intérieur fait le bilan et affiche sa fermeté

À la suite des manifestations non autorisées qui ont dégénéré dans plusieurs villes du Maroc le 30 septembre 2025, le ministère de l’Intérieur a publié un communiqué dressant un bilan alarmant : 263 membres des forces de l’ordre blessés, 23 civils touchés, de nombreux actes de vandalisme et 409 personnes placées en garde à vue. Tout en condamnant les débordements, les autorités promettent d'agir avec fermeté et dans le respect du droit et des libertés publiques.

01 Octobre 2025 À 16:20

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Le mardi 30 septembre 2025, plusieurs localités du Royaume ont été le théâtre de manifestations déclenchées par des appels anonymes relayés sur les réseaux sociaux. Organisés en dehors de tout cadre légal, ces rassemblements ont dégénéré en troubles à l’ordre public dans plusieurs villes, a indiqué le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Rachid El Khalfi, dans un communiqué.

Les protestataires, a précisé M. El Khalfi, ont fait irruption dans plusieurs administrations, établissements, agences bancaires et locaux commerciaux où ils ont procédé à des actes de pillage et destruction à Aït Amira dans la province de Chtouka Aït Baha, la province d’Inezgane-Aït Melloul, Agadir-Ida Outanane, Tiznit et Oujda. Pis encore, certains protestataires à Oujda ont bloqué le passage d’une ambulance de la Protection civile qui devait apporter de l‘assistance et évacuer les blessés.

Un bilan humain et matériel préoccupant

Le ministère de l’Intérieur recense un total de 263 blessés parmi les forces de l’ordre et 23 civils touchés, dont un cas grave nécessitant une prise en charge médicale à Oujda. Le communiqué fait également état de 142 véhicules officiels endommagés, en plus de 20 voitures de particuliers.

Les violences ont également visé plusieurs structures : agences bancaires, pharmacies, commerces et institutions publiques ont été vandalisées. À Oujda, des manifestants ont même intercepté une ambulance, empêchant la prise en charge des blessés.

Les détails par région se présentent comme suit :
  • Préfecture d’Inezgane-Aït Melloul : 69 membres des forces de l’ordre blessés ; 3 véhicules officiels et 4 véhicules privés endommagés ; 3 agences bancaires, une agence d’assurance, une pharmacie et plusieurs commerces saccagés.
  • Préfecture d’Oujda-Angad : 51 membres des forces de l’ordre blessés ; 40 véhicules et 2 commerces endommagés.
  • Préfecture de Skhirat-Témara : 44 membres des forces de l’ordre blessés ; 47 véhicules officiels et 13 véhicules privés endommagés.
  • Province de Béni Mellal : 28 membres blessés ; 7 véhicules officiels endommagés.
  • Province d’Errachidia : 13 membres blessés ; 8 véhicules endommagés.
  • Province de Berkane : 10 membres blessés ; 12 véhicules officiels endommagés.
  • Province de Tiznit : 8 membres blessés ; un véhicule privé endommagé.
  • Province de Kénitra : 8 membres blessés. Province de Chtouka-Aït Baha : 5 membres blessés ; 12 véhicules, officiels et privés, endommagés.
  • Préfecture de Rabat : 5 membres blessés.
  • Province de Guelmim : 5 membres blessés ; un véhicule endommagé.
  • Province de Nador : 4 membres blessés ; 10 véhicules officiels endommagés.
  • Province de Khénifra : 4 membres blessés.
  • Préfecture de Meknès : 4 membres blessés ; un véhicule officiel endommagé.
  • Province de Ouarzazate : 2 membres blessés.
  • Préfecture de Casablanca : 2 membres blessés ; un véhicule privé endommagé.
  • Province de Taroudant : 1 membre blessé ; un véhicule endommagé.


Face à la gravité des incidents, les forces de l’ordre ont procédé à de nombreuses interpellations. Certaines personnes ont été identifiées et relâchées après vérification, tandis que 409 individus ont été placés en garde à vue, sur instruction du parquet compétent.

Les autorités indiquent que l’ensemble de ces procédures ont été menées dans le strict respect du cadre légal, sous supervision judiciaire.

Rappel à l’ordre

En rendant public ce bilan, le ministère de l’Intérieur a tenu à réaffirmer que les pouvoirs publics continueront « d’assumer leur devoir avec un sens élevé des responsabilités » afin de préserver l’ordre public, tout en garantissant l’exercice des libertés, y compris « le droit de manifester pacifiquement, dans les limites prévues par la loi ».

Les autorités insistent sur leur volonté d’agir « dans un esprit de retenue et de professionnalisme », mais préviennent que « toute personne impliquée dans des actes répréhensibles sera traitée avec rigueur et conformément aux dispositions légales en vigueur ». Les responsabilités seront établies et « les conséquences juridiques appropriées » appliquées sous la supervision du parquet.

Rachid El Khalfi : Les services du ministère continueront de remplir leur devoir constitutionnel de protection de la sécurité et de l’ordre publics

Le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Rachid El Khalfi, a affirmé que les services du ministère poursuivront l’accomplissement de leur devoir constitutionnel consistant à garantir la sécurité et l’ordre publics, tout en veillant à la protection des droits et libertés, tant individuels que collectifs. Dans une déclaration à la presse, le responsable a rappelé que le Maroc a accompli des avancées importantes en matière de liberté d’expression, y compris la liberté de manifester pacifiquement, dans le respect des dispositions légales. À ce titre, il a relevé que plus de 600 mouvements de protestation sont enregistrés chaque mois et se déroulent, pour la grande majorité, dans des conditions normales.

S’agissant des récentes manifestations, le porte-parole a précisé que la majorité des interpellations ont concerné de simples vérifications d’identité, tandis que les gardes à vue ont touché uniquement des personnes soupçonnées d’infractions avérées, telles que l’entrave à la circulation, l’incendie volontaire, les jets de pierres contre les forces publiques ou encore les atteintes aux biens publics et privés.

Il a insisté sur le fait que toutes les interventions se sont déroulées dans le strict respect des normes légales et professionnelles, conformément aux textes législatifs et réglementaires en vigueur et aux protocoles sécuritaires et de droits humains reconnus à l’échelle internationale. Ces interventions, a-t-il ajouté, visaient à préserver l’ordre public, à assurer la sécurité des personnes, à protéger les biens et à garantir l’exercice des droits et libertés dans leur cadre légal.

M. El Khalfi a souligné que l’action des forces de l’ordre repose sur trois principes fondamentaux : la progressivité, la proportionnalité et la légalité. Il a noté que le recours à la force n’a eu lieu que dans des limites minimales, après l’épuisement de tous les moyens pacifiques et réglementaires, et qu’avant chaque intervention, plusieurs tentatives avaient été entreprises pour éviter tout affrontement.

Revenant sur l’interdiction de certaines manifestations, il a expliqué que cette décision est intervenue en raison du non-respect des dispositions légales en vigueur, certains attroupements étant « non encadrés et de source inconnue ». Il a précisé que cette interdiction s’inscrit dans la nécessité de concilier le droit constitutionnel des citoyens à la manifestation pacifique (article 29) et le droit de la société à la sécurité, à la stabilité et à l’ordre public (article 21).

Enfin, le porte-parole a conclu que l’établissement de cet équilibre constitue l’une des missions fondamentales des autorités publiques et que l’ensemble des interventions menées l’ont été en toute transparence, sous l’œil libre des médias, témoignant du respect du droit à l’information et de la confiance dans les institutions.
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