Souad Badri
17 Juillet 2025
À 19:08
Le
MTF 2025 se veut un rendez-vous à la croisée du sport et du développement. «Il ne s’agit pas de réussir une vingtaine de matchs de football. Il s’agit de réussir une transformation nationale», résume
Mohammed Haitami, président du
Groupe Le Matin. Pour lui, le
Mondial n’est pas une finalité mais un levier. «C’est une chance unique de mobiliser le pays autour d’un projet structurant, de moderniser nos infrastructures, de faire converger nos efforts vers un même cap». L’investissement prévu avoisine les 500 milliards de dirhams. Une somme qui, selon le président du groupe média, doit servir une ambition durable : «Si, après 2030, nous ne sommes pas dans une nouvelle dynamique, c’est que nous aurons manqué quelque chose.»
Un horizon ne se décrète pas. Il se prépare, s’anticipe, se mérite. À l’heure où les Nations s’interrogent sur leur place dans un monde fragmenté, le Maroc trace, avec constance et détermination, la voie d’un avenir qu’il veut à la hauteur de ses ambitions. Loin d’un exercice incantatoire, la perspective de 2030 présage d’une élévation annoncée. Car 2030 ne sera pas simplement une date sur un calendrier diplomatique ou sportif. Elle incarne une dynamique. Celle d’un pays qui, depuis plusieurs années déjà, a fait le choix d’un modèle singulier : un modèle d’ouverture enracinée, de pluralité assumée, de modernité maîtrisée.
Trois panels pour poser les fondations du Maroc de demain
Le MTF 2025 s’articulera autour de trois grands axes :
• Placer l’humain au cœur du projet : ce premier panel réunira notamment les ministres de la Jeunesse, de l’Éducation, ainsi qu’un sociologue et un philosophe. Objectif : réfléchir à l’appropriation citoyenne du projet 2030. «Cette Coupe du monde n’est pas celle de l’État, mais celle de tous les Marocains», insiste Mohammed Haitami. Sensibilisation, civisme, hospitalité : autant de dimensions essentielles pour réussir l’accueil de millions de visiteurs.
• Accélérer la croissance économique durable et inclusive : en présence de la ministre des Finances, du ministre de l’Industrie, de celui de l’Investissement, du président de la CGEM et du PDG d’Attijariwafa bank, ce panel s’attaquera à la question cruciale : comment faire du Mondial un moteur de création d’emplois, de richesse et de convergence territoriale ? «Toute transformation a un coût, mais elle crée aussi une valeur inestimable. C’est une opportunité historique qu’il ne faut pas rater», souligne M. Haitami.
• Bâtir une Digital Nation résiliente : le troisième temps fort du forum se concentrera sur les enjeux technologiques et de cybersécurité. Objectif : faire du Maroc un pays connecté, intelligent et souverain à l’ère du numérique. «L’expérience du supporter doit être fluide, sécurisée et comparable à celle des autres pays co-organisateurs. Cela passe par une réforme profonde de l’administration, une digitalisation accrue et une vigilance renforcée face aux cybermenaces», explique M. Haitami.
Une programmation de haut niveau
Le Morocco Today Forum 2025 réunira des figures majeures de la sphère gouvernementale et internationale. Le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, ouvrira les travaux, aux côtés notamment de Fouzi Lekjaâ, président du Comité Coupe du monde 2030, Miguel Ángel Moratinos, ancien ministre espagnol et haut représentant de l’ONU pour l’Alliance des civilisations, ou encore de plusieurs ministres et experts nationaux et étrangers.
Un forum d’impact, fidèle à la Vision Royale
Depuis 2016, le MTF s’est imposé comme un espace de réflexion stratégique ancré dans la Vision Royale. Après avoir abordé l’État social, la régionalisation avancée, la place de la femme ou encore l’Afrique atlantique, cette 8e édition se concentre sur un horizon clair : 2030. «Ce forum n’est pas une simple tribune. C’est une fabrique d’idées. Chaque édition donne lieu à un Livre blanc remis aux décideurs. C’est notre façon de contribuer à la dynamique nationale», insiste Mohammed Haitami. Le MTF 2025 affiche déjà complet, avec un millier de participants attendus sur place et des milliers d’autres en ligne via les plateformes du Groupe Le Matin. Une fan zone a même été aménagée pour permettre à un public élargi de suivre les débats. «Ce n’est pas un rendez-vous. C’est le rendez-vous à ne pas manquer», martèle le président du Groupe Le Matin. Le ton est donné. À cinq ans de l’échéance 2030, il est temps de passer de l’intention à l’action. Et de faire de cette Coupe du monde, non pas un simple événement, mais un tremplin vers une nation plus forte, plus inclusive et plus innovante.
Invité de L'Info en Face
Mohammed Haitami : «Le MTF est notre manière de contribuer au débat public et d’alimenter la réflexion stratégique»
À la veille de la 8e édition du Morocco Today Forum (MTF), Mohammed Haitami, président du Groupe Le Matin, revient sur les enjeux de cette rencontre stratégique organisée cette année à Rabat. Sous le thème «Maroc 2030 : défi sportif ou enjeu de développement socio-économique ?», l’événement ambitionne de faire du rendez-vous planétaire de la Coupe du monde un levier de transformation structurelle pour le pays. Entretien. Rachid Hallaouy : Vous avez fait le choix fort de déplacer le Morocco Today Forum de Casablanca à Rabat. Pourquoi ce changement de cap ?
Mohammed Haitami : Nous avions déjà organisé l’édition 2024 à Dakhla, autour de l’Initiative Royale pour l’Atlantique et les pays du Sahel. Cette année, nous avons voulu rapprocher l’événement des décideurs politiques. Le Chef du gouvernement, six ministres et des experts de haut niveau seront présents. Il fallait donc logiquement l’organiser à Rabat.
Le thème de cette édition est très évocateur : Maroc 2030. Est-ce avant tout un défi sportif ou un enjeu de développement plus large ?
C’est clairement un enjeu de développement socio-économique. Le choix de Sa Majesté d’organiser la Coupe du monde 2030 ne vise pas uniquement la réussite d’une vingtaine de matchs. Il s’agit d’un accélérateur de projets, d’une transformation profonde du pays. Mobilité, infrastructures, hôpitaux, formation... tous les secteurs sont concernés. L’objectif est de franchir un cap, de hisser le Maroc dans la cour des grandes nations.
Vous insistez sur le fait que cette Coupe du monde n’est pas seulement celle de l’État, mais celle de tous les Marocains. Pourquoi cette précision ?
Parce que c’est essentiel. L’un des grands constats de notre workshop d’orientation stratégique (WOS) organisé en avril, c’est que l’humain est au cœur du défi 2030. Il ne s’agit pas seulement d’accueillir deux millions de visiteurs. Il faut que chaque Marocain devienne un ambassadeur du pays. Accueil, civisme, hospitalité, respect de l’autre : ce sont les vraies clés du succès. Et cela suppose une véritable pédagogie à tous les niveaux – école, médias, société.
D’où ce premier panel consacré à l’humain comme facteur clé de réussite...
Absolument. Ce panel associe le ministre de la Jeunesse, le ministre de l’Éducation, un ambassadeur, un sociologue et un philosophe. L’idée est de réfléchir à la construction d’un nouveau mindset marocain : tolérant, ouvert, respectueux des différences. Organiser une Coupe du monde, c’est recevoir le monde. Il faut donc bâtir, en parallèle des stades et des routes, une société préparée à cette ouverture.
Le deuxième panel abordera la croissance économique. Qu’en attendez-vous concrètement ?
Nous avons réuni autour de cette table la ministre des Finances, le ministre de l’Industrie, celui de l’Investissement, la ministre de la Transition numérique et administrative, le patron de la CGEM, ainsi que celui d’Attijariwafa bank. L’objectif est de voir comment faire du Mondial 2030 un accélérateur de création de richesses, d’emplois, d’innovation. Pas une simple opération comptable. Si on regarde uniquement les chiffres bruts, on peut conclure à un déficit. Mais si l’on mesure l’impact sur le mindset collectif, sur les infrastructures durables, sur l’élan généré, alors l’investissement est largement justifié.
Cette idée de durabilité revient souvent dans vos propos...
C’est un enjeu crucial. Développement durable, croissance verte, décarbonation, inclusion sociale... Tous ces aspects doivent être intégrés dans la feuille de route. Le Maroc s’est fixé des objectifs ambitieux à l’horizon 2030. Il faut les tenir. Et ce Forum est justement une plateforme pour faire converger les efforts publics et privés autour de cette vision.
Le troisième panel, enfin, est consacré à la transformation numérique...
Oui. Faire du Maroc une «Digital Nation», ce n’est plus une option. Connectivité, intelligence artificielle, cybersécurité, administration digitale : tout cela fait partie de l’écosystème à mettre en place. Le supporter qui viendra en 2030 doit pouvoir vivre une expérience fluide, sécurisée, sans couture, que ce soit à Lisbonne, Madrid ou Fès. C’est à cela que nous devons nous préparer.
Vous parlez également de la cybersécurité comme d’un enjeu central...
C’est un des risques majeurs. Dès que vous digitalisez, vous vous exposez. Il faut donc investir massivement dans la cyberdéfense. Nous aurons d’ailleurs un haut représentant de la Direction générale de la sécurité des systèmes d’information dans ce panel. La Coupe du monde sera une cible. Il faut s’y préparer dès maintenant.
L’objectif de ce MTF 2025, c’est donc aussi de nourrir une feuille de route collective ?
Exactement. Le Morocco Today Forum est un espace de propositions. Chaque année, nous publions un Livre blanc. C’est notre manière de contribuer au débat public et d’alimenter la réflexion stratégique. Cette 8e édition se veut plus ambitieuse que jamais, parce que l’enjeu est national. Nous avons une échéance à ne pas rater.
Une dernière question : certains craignent qu’après 2030, tout cet élan retombe. Que leur répondez-vous ?
Je ne le pense pas. Beaucoup d’acquis seront irréversibles. Quand vous mettez en place une carte de secours héliportée, quand vous structurez une mobilité intelligente, quand vous traitez sérieusement les problématiques de la mendicité ou des chiens errants, vous améliorez durablement le quotidien. Ce sont des transformations de fond. Le Maroc est assez intelligent pour capitaliser sur cet effort.
Et vous, personnellement, comment vivez-vous ce Forum 2025 ? Comme un sommet, un tournant ?
Chaque édition est un défi, mais celle-ci est peut-être la plus symbolique. Parce qu’elle s’inscrit dans une dynamique nationale portée par une Vision Royale. Et parce qu’elle concerne l’avenir immédiat. À cinq ans seulement de 2030, il faut mobiliser toutes les énergies. Ce n’est pas juste un rendez-vous : c’est LE rendez-vous.