Ayda Benyahia
11 Août 2025
À 15:43
Le bureau de la Chambre des représentants a reçu, de la part du gouvernement, un projet de loi visant à encadrer la gestion des animaux errants et à prévenir les risques qu’ils représentent. Parmi ses dispositions, l’interdiction de nourrir ou de soigner ces animaux sans autorisation a déclenché une vague d’indignation sur les réseaux sociaux. Associations, citoyens et militant pour la cause animale y voient une mesure contraire à l’esprit même de la protection animale et en contestent la pertinence.
Un texte à visée sanitaire et sécuritaire
Pour l’Exécutif, la prolifération des animaux errants dans les espaces publics n’est pas qu’un enjeu de cohabitation urbaine : elle représente un risque réel pour
la santé et
la sécurité des citoyens. Présenté par
Ahmed El Bouari, ministre de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, le projet de
loi n°19.25 adopté récemment en Conseil de gouvernement ambitionne de répondre à ce double impératif.
Le texte prévoit un ensemble de mesures structurantes : obligation pour les propriétaires d’enregistrer leurs animaux sur une plateforme électronique nationale, attribution d’un numéro d’identification, déclaration obligatoire en cas de perte, cession ou décès, et interdiction de l’abandon. Les communes et les associations agréées se verront confier la gestion de centres spécialisés, chargés de la capture, de la stérilisation, de la vaccination, du soin et de l’identification des animaux errants.
Une base de données nationale viendra renforcer la traçabilité et la coordination des actions.
Les sanctions sont à la hauteur des ambitions affichées : amendes allant jusqu’à
500.000 dirhams, peines privatives de liberté en cas de récidive ou de faute grave et fermeture administrative des centres non conformes. En cas de crise sanitaire, le gouvernement pourra recourir à des pouvoirs exceptionnels pour agir rapidement.
Une disposition qui cristallise la contestation
Parmi l’ensemble des mesures, une en particulier concentre l’essentiel des critiques : l’interdiction de nourrir ou de soigner un animal errant sans autorisation, passible d’une amende pouvant atteindre
3.000 dirhams. Pour le gouvernement, cette disposition vise à éviter
les regroupements d’animaux susceptibles de propager des maladies ou de créer des situations dangereuses pour la population.
Mais pour les associations de protection animale, cette justification ne tient pas. Elles rappellent qu’en l’absence d’un réseau public suffisant de refuges et de structures vétérinaires, ces gestes de nourrissage ou de soins constituent souvent la seule aide dont bénéficient les animaux abandonnés. «Ce sont les citoyens qui compensent, avec leurs moyens, le manque d’action de l’État. Les sanctionner, c’est inverser la responsabilité», affirment plusieurs collectifs.
La question des moyens et de la faisabilité
Au-delà de la controverse éthique, la mise en œuvre du projet de loi soulève la question des moyens. Le texte impose aux centres d’accueil de respecter des normes strictes, d’assurer un suivi vétérinaire et de disposer d’un personnel qualifié. Or aujourd’hui, la grande majorité des structures existantes sont gérées par des bénévoles et financées par des dons. Sans soutien financier clair, nombre d’entre elles pourraient ne pas être en mesure de se conformer aux nouvelles obligations. Les associations s’inquiètent également du délai de mise en conformité prévu par la loi, jugé trop court pour permettre une adaptation réaliste. Selon elles, un tel calendrier risque de fragiliser les structures déjà en place et de laisser davantage d’animaux sans prise en charge.
Deux visions qui peinent à se rencontrer
Le gouvernement met en avant une logique de santé publique, centrée sur
la prévention des maladies et
la réduction des risques. Les associations, elles, défendent une approche fondée sur la protection animale et le maintien des gestes de solidarité. Entre ces deux positions, le projet de loi n°19.25 apparaît comme un texte charnière : porteur d’une volonté de structuration, mais confronté à la réalité d’un terrain où l’action publique reste incomplète. La question qui se pose désormais est celle de l’équilibre : comment instaurer un cadre légal efficace sans compromettre la survie des animaux qui dépendent, au quotidien, de l’engagement bénévole ?
Les complémentaires santé s’ouvrent à l’assurance animale
Certaines compagnies d’assurance élargissent désormais leurs offres à la couverture santé des animaux de compagnie. Au Maroc, une première formule dédiée aux chiens et chats vient d’être lancée. Destinée aux animaux âgés de trois mois à quinze ans, elle inclut consultations médicales, interventions chirurgicales, médicaments, analyses, hospitalisations et certains soins préventifs, tels que vaccinations et traitements antiparasitaires. Une indemnité en cas de décès est également prévue, avec un plafond variant selon l’animal assuré. La souscription, entièrement digitalisée, est accessible en ligne et via les intermédiaires agréés. Cette initiative vise à accompagner la hausse des dépenses vétérinaires et l’intérêt croissant des propriétaires pour la protection de leurs animaux.