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Le délitement du polisario et le terrorisme au Sahel

L'enlisement du conflit du Sahara et l'absence de perspectives de résolution ont considérablement accru la vulnérabilité du polisario et fortement entamé la légitimité de la direction du mouvement, affirme jeudi l'Institut européen des études stratégiques (ESISC), basé à Bruxelles.

Le délitement du polisario et le terrorisme au Sahel
Sur la scène internationale, le polisario a pâti de son intransigeance et de son incapacité à négocier mais aussi de l'évolution du contexte géopolitique, indique l'Esisc dans un rapport, soulignant que le nombre des Etats reconnaissant la soi-disant rasd n'a cessé de baisser. «De plus, poursuit le rapport, le soutien de nombreux pays occidentaux, comme les Etats-Unis et la France, au plan d'autonomie proposé par le Maroc, qu'ils décrivent comme +sérieux et crédible+», a affaibli encore le polisario sur la scène diplomatique internationale.

«Aujourd'hui, le seul véritable soutien sur lequel le polisario peut compter est celui de l'Algérie», qui instrumentalise les Sahraouis pour «tenter de déstabiliser» le Maroc, ajoute le document. L'Esisc souligne par ailleurs que l'isolement et la sclérose de la direction du polisario transparaissent également dans une attitude de plus en plus agressive à l'égard de toute forme de contestation de son mode de gestion et de fonctionnement. Cette direction du polisario «s'est encore un peu plus isolée de sa base», se contentant de défendre ses intérêts particuliers et financiers, note le rapport, ajoutant que les dérives de cette direction combinées à l'échec de sa politique ont également participé à sa perte de légitimité vis-à-vis de la population.

La perte de légitimité du polisario se traduit également par l'émergence de courants dissidents, indique l'Esisc, citant l'exemple du mouvement +Khat Achahid+, créé en juillet 2004, qui conteste la légitimité de l'actuelle direction et dénonce son caractère antidémocratique. Le rapport souligne en outre que depuis de nombreuses années, le polisario est régulièrement accusé de détournement des aides humanitaires, financières et matérielles, attribuées par des organisations non gouvernementales (ONG) ainsi que par des organisations internationales. Cette tendance a été accentuée par le processus de délitement du mouvement qui s'est accéléré ces dernières années, relève l'Esisc, rappelant qu'en 2003, l'Union européenne avait décidé de renforcer le système de contrôle de son aide humanitaire mais a «rencontré des résistances de la part du polisario dans l'exécution de sa mission».

Le fait que le polisario n'ait toujours pas autorisé le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (UNHCR) à se rendre dans les camps de Tindouf, ni même à effectuer un recensement, n'augure pas d'une évolution positive à propos de cette pratique du détournement, ajoute la même source. Une enquête récente de l'Office européen de lutte antifraude (OLAF) établit une possible coresponsabilité de l'Algérie et du polisario dans ces détournements, indique l'Esisc. Parallèlement à ces dérives, poursuit le rapport, l'extrême pauvreté qui règne dans les camps du polisario a favorisé le développement de la criminalité.

Ce développement de la criminalité doit également être mis en relation avec l'impunité qui existe dans le Sahel et qui a, comme pour le terrorisme, favorisé le développement de trafics en tout genre, estime l'Esisc, soulignant que la région est à la fois une importante zone de production de drogue et un couloir de transit vers l'Europe pour la cocaïne en provenance d'Amérique latine. L'implication du polisario dans le trafic de drogue a été confirmée par le démantèlement, en janvier 2007, d'un réseau de trafic de stupéfiants dans le nord de la Mauritanie, note le document. Le mouvement profite également de sa position privilégiée dans une région échappant au contrôle des Etats pour s'enrichir en participant au trafic d'armes, ajoute l'Esisc.

«Cette faillite aussi bien morale qu'économique du polisario, qui n'est pas nouvelle mais qui a été accélérée par le cessez-le-feu de 1991 et la fin de la Guerre froide, a permis à un nombre important de Sahraouis de prendre conscience du caractère vain de la lutte indépendantiste. Si, comme on le sait, de nombreux anciens cadres du polisario ont rompu avec le mouvement, préférant l'exil vers l'Espagne, le Maroc ou la Mauritanie, les Sahraouis les plus jeunes et/ou les plus modestes partageant ce constat d'échec ont également cherché à s'émanciper «, écrit l'Esisc.

Dans ce rapport, l'Esisc a également donné un aperçu des origines du conflit du Sahara et établi une comparaison de l'évolution du polisario à celle du Mouvement républicain irlandais (IRA). A cet égard, le document relève que «longtemps considérée comme un rassemblement de tueurs fanatiques et sans scrupules, l'IRA fut capable de faire preuve d'une maturité politique suffisante et d'assez de clairvoyance pour tourner le dos à la violence et devenir partie prenante du jeu politique irlandais à l'intérieur d'un territoire qui continuerait à être administré par la Couronne britannique». «Confronté à une situation au fond assez similaire-l'impossibilité de concilier ses buts premiers et fondateurs et la réalité géopolitique du moment-le polisario refuse d'effectuer sa mutation et se cramponne au rêve indépendantiste, au risque de sacrifier ceux qui le suivent encore», affirme la même source. Le maintien de la même ligne politique radicale, alors que la position du Maroc a évolué, constitue une véritable prise en otage des dizaines de milliers de séquestrés dans les camps de Tindouf, ajoute le rapport.
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