L’Institut royal d'études stratégiques (IRES) est en phase de finaliser une étude portant sur les transformations sociopolitiques dans le monde arabe. Analyse qui se focalise sur les incidences et le positionnement régional du Maroc et la reconfiguration des relations entre les deux rives de la Méditerranée. C’est dans ce cadre qu’il vient d’organiser une conférence-débat autour du thème «Éclairage sur les mouvements populaires en cours dans les pays arabes». Débat qui a eu lieu en présence d’un panel d’experts multidisciplinaires afin d’élargir les échanges et approfondir la réflexion sur les axes de cette thématique. Pour cela, l’IRES a invité Jacques Ould Aoudia, spécialiste en économie politique du développement, qui a exposé sa théorie en la matière. Lors de ce séminaire, le directeur général de l’IRES, Mohamed Tawfik Mouline, a rappelé les principales conclusions de l’Institut à ce sujet, dans la mesure où ce dernier a organisé plusieurs séminaires et tables rondes ayant pour objet d’appréhender les mutations sociopolitiques dans le voisinage arabe et de cerner les enjeux et les risques qu’elles suscitent pour le Maroc. Ainsi, le directeur de l’IRES en a rappelé les principales conclusions de l'étude.
Il en ressort, tout d’abord, que l’instabilité sociopolitique dans certains pays de la rive sud de la Méditerranée ne peut être appréhendée en dehors du contexte de la crise économique mondiale et de ses conséquences négatives sur le plan social. Cette crise a révélé la fragilité du modèle de développement poursuivi par ces pays et son incapacité à résorber les déficits accumulés sur le plan économique, social, politique et institutionnel. Aussi, les soulèvements populaires favoriseraient la transition vers un capitalisme démocratique aux perspectives prometteuses. Ces pays seraient vraisemblablement confrontés, du moins à court et à moyen terme, à des difficultés non négligeables, matérialisées par la forte diminution de l’activité économique, l’accentuation des tensions sur les finances publiques sous l’effet des pressions exercées par les revendications des populations et les difficultés du processus d’apprentissage de la démocratie, notamment dans les pays où les institutions ont été mises en veilleuse pendant de longues années.
Les participants ont également mis en avant le fait que le caractère structurel et les mutations à l’œuvre dans certains pays arabes nécessiteraient une refonte du modèle de développement jusque-là adopté. Ce modèle de développement devrait être fondé sur de nouveaux paradigmes, axés notamment sur la démocratie, la cohésion sociale et l’élargissement des espaces de libertés pour libérer les initiatives…
Par ailleurs, il a été admis que, par rapport à son voisinage maghrébin et arabe, le Maroc se démarque par son élan réformateur précurseur et la clarté de ses choix de société. «La réforme constitutionnelle globale en constitue la parfaite consécration. Celle-ci ouvre de grandes perspectives de développement pour le pays, du fait qu’elle consacre l’irréversibilité des choix démocratiques et constitutionnalise la bonne gouvernance des institutions. De même, en élargissant les droits et libertés des citoyens, elle accorde une priorité accrue en faveur des femmes et des jeunes», a souligné l’IRES dans ses conclusions. La réussite de ce chantier d’envergure serait de nature à consolider le positionnement régional du Maroc et de l’ériger en tant que pays modèle pour son voisinage.
De son côté, le spécialiste en économie politique du développement, Jacques Ould Aoudia, a essayé, lors de cette rencontre, de livrer les clés de compréhension des mouvements populaires en cours dans les pays arabes et les perspectives qui en découlent en termes de transition démocratique et de développement économique et social. Or, l’idée marquante qu’Ould Aoudia a mise en avant tourne autour de l’importance d’un compromis entre les différentes forces vives dans toute société pour bien gérer tout pays. «La stabilisation de nos sociétés passe par un compromis entre les deux forces qui se font face aujourd’hui, par des concessions mutuelles, dans l’idée que la partie adverse n’est pas un ennemi que l’on peut écraser, mais un adversaire que l’on respecte, qui a des droits, avec qui on doit trouver une voie pour un nouveau mode de vivre ensemble. Le défi vaut pour tout le monde musulman», a-t-il affirmé. Les deux forces sont, selon lui, les courants islamistes qui ont percé au cours de ces trois dernières années et les autres composantes partisanes.
Par ailleurs, il a également insisté sur le cas particulier du Maroc qui a su sortir son épingle du jeu en ancrant plus de stabilité prenant la voie de la démocratie. Ce qui a été possible grâce à ce qui caractérise le Royaume qui jouit de ce que lui appelle le «point fixe». Terme qui renvoie à l’existence d’un élément fédérateur qui rassemble le pays qui est la royauté dans le cas marocain.