L'Association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin (AMLAC) est plutôt satisfaite des nouvelles dispositions sur l’avortement prévues dans le projet de loi complétant le Code pénal adopté jeudi dernier par le Conseil de gouvernement. Pour le docteur Chafik Chraïbi, président de l’AMLAC, qui s’exprimait lors d’une conférence ayant rassemblé les associations militantes dans ce domaine mardi dernier à Rabat, «le gouvernement a montré, par l’adoption de ces dispositions, qu’il était à l’écoute du citoyen et des associations. Le texte prévoit certes des restrictions, mais il est nécessaire d’avoir des garde-fous pour éviter les dérapages. Pour notre association, c’est un grand pas en avant». Toutefois, M. Chraïbi estime qu’il reste encore des efforts à consentir pour élargir ce droit à d’autres situations. «Certaines remarques faites par les associations n’ont pas été prises en compte, notamment la définition du terme “santé” lorsqu’on évoque un avortement pour un état de santé critique. Il faut savoir ici que la santé ne signifie pas uniquement le bien-être physique, mais aussi psychique et social», relève M. Chraïbi. C’est justement pour tenir compte de ces remarques et dispositions que le président de l'AMLAC mène de larges concertations avec les associations. «Nous voulons recueillir les propositions des composantes de la société civile en vue d’élaborer un mémorandum qui sera transmis au secrétariat général du gouvernement avant le démarrage de l’examen de ce texte par le Parlement», souligne-t-il.
Le projet de loi complétant les dispositions du Code pénal prévoit de nouvelles dispositions concernant l'article 453 sur l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Ainsi, en vertu du nouveau texte, l'avortement sera permis dans quatre cas. Le premier concerne les grossesses qui résultent d'un viol ou d'un crime d'inceste. Dans ce cas, l’interruption de la grossesse devra avoir lieu avant un délai de 90 jours, à condition qu'une enquête judiciaire ait été ouverte et présentée au procureur général du Roi qui prendra en considération le sérieux de la plainte. Le texte prévoit que la femme soit accueillie par une assistante sociale qui l’informera des alternatives à l’avortement, notamment la soumission de l’enfant à la procédure de la kafala. La victime du viol devra également être sensibilisée aux risques de l’avortement et bénéficiera de trois jours de réflexion avant de prendre sa décision finale. «Une bonne mesure» souligne M. Chraïbi qui permettra certes de résoudre le problème des femmes violées, mais qui, en somme, ne règle la situation que de 10% des femmes qui recourent à l’avortement clandestin. Le deuxième cas où l'avortement serait autorisé concerne les femmes atteintes de troubles mentaux.
La liste de ces troubles n'a pas encore été définie dans le projet de loi, mais sera établie ultérieurement par le ministère de la Santé après consultation de l'Ordre national des médecins. L'opération devra être effectuée avant le 90e jour de grossesse, avec l'autorisation préalable de l'époux, des parents ou du tuteur légal au cas où la femme serait célibataire. Le troisième cas, c’est lorsque la grossesse menace l'état de santé de la mère. Dans cette situation, la femme pourra recourir à l’IVG avec l’autorisation de son époux ou encore du médecin-chef de la préfecture ou de la province. Enfin, pour ce qui est du quatrième cas, la loi autorise un avortement en cas de malformation fœtale, à savoir une maladie génétique ou une malformation grave du fœtus qui ne peut être traitée. Dans ce cas, l'avortement peut être effectué avant le 120e jour de grossesse. Une liste des malformations devra être fixée dans ce sens par l’Ordre national des médecins.