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La transformation digitale commence d’abord en interne

La digitalisation interne de l’entreprise est un processus qui s’impose et qui impose une nouvelle architecture managériale avec comme mots d’ordre : agilité, collaboration et inclusion. Le point avec Emily Metais-Wiersch, Directrice Conseil chez Infosys Finacle, et auteur du livre «La Transformation Digitale des Entreprises» (Eyrolles).

La transformation digitale commence d’abord en interne
Le dirigeant doit «autoriser» le corps social de l’entreprise à générer, évaluer des idées et expérimenter en donnant aux employés le «droit à l’erreur», et à sortir – le temps du chemin vers l’entreprise transformée – de l’habituelle logique «ROIste

Éco-Conseil : Quels sont les catalyseurs de la digitalisation «interne» de l’entreprise ?
Emily Metais-Wiersch : Le premier levier, le plus fondamental, est de l’ordre de l’impulsion culturelle et doit être actionné par le dirigeant. Il doit éclairer la vision, communiquer et donner le cap et le sens de la transformation digitale au profit des enjeux stratégiques de l’entreprise : efficience par l’intégration horizontale et la collaboration, agilité au profit d’un rythme d’exploration et d’innovation plus soutenu, nouvelle mission centrée sur les clients et les usagers et orientée protection et service, ouverture aux co-développements avec l’écosystème des startups, des universités... À l’instar des pratiques des startups appelées «lean», le dirigeant doit «autoriser» le corps social de l’entreprise à générer, évaluer des idées et expérimenter en donnant aux employés le «droit à l’erreur», et à sortir – le temps du chemin vers l’entreprise transformée – de l’habituelle logique «ROIste». Ainsi, il libère l’esprit entrepreneurial des collaborateurs au profit d’un positionnement stratégique porteur de sens pour le marché et les collaborateurs. On parle d’alignement interne-externe. Ensuite, il faut poser concrètement le cadre de digitalisation et ses priorités et faire co-construire la «roadmap digitale». Les managers partagent ainsi à ce stade la même vision, les mêmes objectifs transversaux et le même «langage digital». Sous un angle technique, les premiers leviers clés sont l’ouverture du système d’information (API, Application Programming Interface) pour le rendre communicant, agile et omnicanal, et la réécriture d’applications au profit de la libération d’informations et de l'automatisation des opérations pour les partenaires et les clients.

Quels sont, à votre avis, les best practices pour cette transformation ?
Pour que le dirigeant soit en mesure de lancer cette nouvelle culture avec congruence, l’incarner, puis entretenir l’énergie motrice de digitalisation, il doit être lui-même exposé au digital et aux approches lean startups. Pour ce faire, il existe des pratiques éprouvées de digital safaris (rencontres des GAFA, Google, Apple, Facebook et Amazon, et des entreprises innovantes), de Learning Expeditions (rencontres avec d’autres dirigeants de sociétés transformées ou en cours de transformation) et de reverse mentoring. Pour co-engager les managers dans la réalisation conjointe de la roadmap digitale, le comité de direction doit refixer les KPI (key performance indicator) de ces entités et leur donner de nouveaux moyens supports d’ordre technologique. C’est notamment pourquoi un CDO (chief digital officer) apparaît dans l’organisation avec des collaborateurs, ou encore une webfactory, capable de développer et faire évoluer très régulièrement des approches multidevices et multicanales, ou une identité numérique de l’entreprise homogène. La meilleure pratique observée est que les personnes de cette entité fonctionnent en binôme avec les lignes métiers, en réel partenaire, le temps que la courbe d’expérience et d’apprentissage du digital se fasse via les projets concrets codélivrés.Les dispositifs de formation au digital sont performants s’ils mixent le présentiel, l’expérientiel et le digital avec des systèmes de rewards, ce qui fonctionne également bien pour le mentoring. Un dispositif d’information, de feedback, et de dialogue régulier et transparent de la direction vers les employés est essentiel pour humaniser, donner confiance et énergie, encourager, maintenir le sens de l’effort, souligner et se congratuler ensemble pour les étapes de transformation franchies en mettant en lumière les quick-wins issus d’une démarche collective. Cette approche s’apparente à la «flat» entreprise, qui donne aux employés la sensation d’être en ligne de travail directe avec et pour le dirigeant d’entreprise. Cette bonne pratique, couplée avec l’autonomie accordée, donne un niveau d’engagement très élevé.

Quel est le rôle des managers dans la conduite de la transformation interne ?
Après le discours initial de lancement de la nouvelle culture par le top management, le binôme DRH-managers est la clé pour répercuter et perpétuer la culture et l’usage des nouveaux outils et modes de travail auprès des employés. Un premier travail d’écoute, de dialogue et de «relevé» de climat est une approche favorisante. Pour ensuite libérer les énergies, le management dans son ensemble doit passer du mode reproche et contrôle au mode confiance et encouragement.
Au-delà de l’apport des moyens évoqués précédemment, les managers peuvent basculer d’un management hiérarchique à une approche plus horizontale et transversale. Ils deviennent des animateurs de «communautés de compétences», focalisées sur un objectif commun qui est de générer un élément de valeur pour l’entreprise.
Les managers peuvent regrouper des compétences pluridisciplinaires au même endroit, métier et technologie, pour que le fonctionnement soit plus associé que séquentiel, ce que favorise aussi le mode de développement agile. Le travail du groupe de collaborateurs se structure autour d’une unité de valeur. On parle de «feature team», fonctionnant comme une micro-entreprise responsable de tout le cycle de vie de l’unité de valeur. Certaines entreprises vont même jusqu’à regrouper ces compétences et collaborateurs complémentaires dans une même et unique organisation. Le recours au partage de pratiques entre entreprises et aux témoignages est également sollicité.

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