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Agilité marketing : libérer le potentiel

Consacrer plusieurs semaines à l’élaboration d’un dépliant ou plusieurs mois au lancement d’un produit est un signal de l’incapacité de la fonction marketing à suivre l’évolution d’un consommateur qui compte ses interactions avec l’entreprise en minutes, quand celle-ci réagit à ses attentes au mieux en semaines, au pire en mois et en années. Les dirigeants doivent prendre très au sérieux ces signaux. Bien souvent, le problème n’est pas celui des délais de réalisation. L’inefficacité provient souvent de la coordination entre différentes entités de l’entreprise et de la validation par le top management. Deux actions souvent sans valeur ajoutée pour le client.

Agilité marketing : libérer le potentiel

Changement de mentalités
En marketing, comme dans beaucoup de fonctions de l’entreprise, un équilibre doit être trouvé entre contraintes de contrôle interne et de bureaucratie, et d’agilité nécessaire à la réponse aux besoins de clients qui passent trois secondes sur une page web pour décider de son contenu et prendre ou non la décision d’achat. Consciemment ou inconsciemment, les dirigeants ligotent leur marketing et l’enferment dans une bureaucratie, fatale à sa performance. Et pour cause, les organisations modernes sont souvent soumises à de fortes contradictions entre les différentes fonctions du management. Les unes voulant plus d’émancipation ; les autres exigeant plus de contrôle. Ceci ralentit le mouvement d’ensemble des entreprises et se traduit par des pertes de parts de marchés pour les moins réactives d’entre elles. Il est temps que les directions générales lâchent du lest et composent avec un environnement où l’obsession de tout contrôler doit céder la place au souci de bien contrôler ; et laisser beaucoup de marges à l’action et à l’innovation.

Nous avons vu des tâches, devant prendre quelques jours, prendre plusieurs semaines ou plusieurs mois. Du temps perdu dans des validations par des départements éloignés du sujet et en approbations par des directions générales, imposant un contrôle exhaustif de tout ce que réalisent leurs directions marketing. Souvent, elles n’en ont pas les compétences. Les entreprises qui souhaitent explorer pleinement l’agilité de leur marketing doivent le libérer des contingences organisationnelles exagérées, imposées par le contrôle interne et le risk-management. Le top management doit mettre sur pied des équipes pluridisciplinaires dotées de pouvoirs décisionnaires, en vue d’accélérer le processus de mise sur le marché de leurs innovations.Par ailleurs, les processus mêmes de travail du marketing doivent subir une profonde transformation, dans le sens du raccourcissement de la taille des projets, d’apprentissage dans l’action, d’itération continue avec les clients et de consommation sans modération des données, avant la prise de décision. Beaucoup de directions marketing n’ont pas encore compris la profonde évolution des modes de consommation qui s’opèrent sous leurs yeux et continuent à utiliser de vieilles recettes, en total déphasage avec l’évolution des clients. Les directions générales doivent investir lourdement dans l’adaptation de leur marketing à un monde qui ne parle plus le langage que les équipes marketing ont appris dans les écoles et dans les manuels de Philip Kotler. L’apprentissage du nouveau marketing se fait sur les réseaux sociaux et les forums et dans l’échange permanent avec le client et les chaines de distribution.

Usage des technologies
Les éléments traditionnels du marketing connaissent un chamboulement radical, en raison de l’hyperconnexion des clients. Autrefois isolés, les clients échangent aujourd’hui sur tout ; et ils ont désormais le pouvoir d’agir sur la marque de l’entreprise (ils ont réussi à changer des régimes politiques grâce à cette connexion). Une simple page sur «Facebook» ou une vidéo sur «YouTube» font l’affaire. On voit régulièrement des pages ou des vidéos dénonçant certaines marques, avec des millions de «Views» en quelques jours. C’est loin de tout ce que l’entreprise aurait pu imaginer, il y a à peine dix ans. Désormais, elle n’a plus le contrôle exclusif de son offre. Cette nouvelle donne exerce des pressions fortes sur les équipes marketing qui doivent désormais être dotées, outre les compétences marketing, des connaissances technologiques requises pour retourner ces situations et utiliser les ruptures de l’Internet en leur faveur, au lieu de les subir.


L’usage des technologies s’étend également à l’organisation de la connaissance des clients et à l’interaction permanente avec eux. Les outils d’analyse comportementale et l’apport des technologies de «Big Data» tendent à démystifier le client. Les réseaux sociaux apportent, pour leur part, une grande facilité à être constamment dans sa peau (le client), grâce à un échange permanent et riche en contenu. Elles facilitent également l’agilité des équipes. Tout d’abord en simplifiant la communication et les échanges entre les membres (SMS, chats, posts dans les réseaux sociaux, etc.). Ensuite, en accélérant les transferts de données, ce qui impacte considérablement la réactivité des équipes. Enfin, en rendant plus aisé le recueil de l’avis des clients, sur chacune des étapes de conception (tests, prototypage, versions bêta, etc.).

Non seulement les avis des clients sont plus accessibles, mais sont également aisément échangés entre les différentes parties impliquées dans le processus, ce qui permet une plus grande réactivité et capacité d’adaptation au retour des publics, très tôt dans le processus d’innovation. Il n’y a plus besoin d’attendre le lancement à grande échelle pour découvrir le détail qui fait faillir toute l’action. Entre l’idée et sa mise sur le marché, les équipes performantes mettent entre 6 et 8 semaines, selon un article du cabinet McKinsey sur le Marketing agile. Dans l’atteinte de cette performance, le rôle du chef d’équipe est crucial. Sa performance dépendra de son expérience dans la conduite d’équipes agiles, de la marge de manœuvre que lui laisse le top management dans la prise de décision, ainsi que de la souplesse ou de la rigidité des processus d’obtention des ressources et de validation des livrables. Or, dans bien des cas, le chef de l’équipe agile est limité dans son action, ou pis encore, ce poste n’existe même pas.

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Par Nabil Adel
M. Adel est chef d'entreprise, consultant et professeur d’Économie, de stratégie et de finance. Il est également directeur général de l'Institut de Recherche en Géopolitique et
Géo-économie à l'ESCA.
[email protected]

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