La Grande Mosquée de Strasbourg donne à l'Islam son «envergure, son éclat, sa grandeur et toute sa place» en France, a affirmé le ministre français de l'Intérieur, Manuel Valls, jeudi à l'occasion de l'inauguration officielle de ce lieu de culte construit grâce au concours de plusieurs donateurs, à leur tête le Maroc, qui a contribué à hauteur de 37% au financement du projet.
«Cette Grande Mosquée, implantée à moins de deux kilomètres de la Cathédrale Notre Dame, a la force du symbole. Elle donne à l'Islam son envergure, son éclat, sa grandeur (...) et toute sa place» en France, a souligné Valls qui représentait le Président François Hollande à cette cérémonie inaugurale, en présence du ministre des Habous et des affaires islamiques, Ahmed Toufiq.
«Oui, l'Islam a toute sa place en France, car l'Islam de France, c'est aussi la France», a ajouté le ministre, en charge également des Cultes. Il a saisi l'occasion pour féliciter les musulmans de France pour la «sagesse», le «discernement» et la «maturité» dont ils ont fait preuve le week-end dernier, en renonçant à manifester contre la vidéo et les caricatures blasphématoires à l'égard du Prophète Sidna Mohammed.
«Samedi dernier, quelque chose d'important s'est produit dans notre pays (...) Musulmans de France, soyez fiers de l'Islam que vous bâtissez ! Un Islam nourri des valeurs d'humanisme, de respect de son prochain, de solidarité qui sont au cœur de son message», a-t-il dit à leur adresse. Selon lui, l'Islam de France «a démontré, de la manière la plus équilibrée, la plus fine, sa capacité à répondre sereinement à la caricature et aux instrumentalisations de tous bords». Après avoir rappelé les «vicissitudes» et les «épreuves» qu'il a fallu surmonter «pour que cette grande Mosquée voie le jour», il a remercié «très sincèrement» les donateurs qui ont contribué à sa réalisation, citant en premier lieu le Maroc.
S'agissant de la gestion de l'Islam dans son pays, le ministre a estimé qu'il était «temps que l'Islam de France prenne ses responsabilités et s'organise pour traiter avec l'Etat les vrais problèmes : financement des lieux de culte, formation des imams et des aumôniers -alors que l'islam radical prospère dans nos prisons-, gestion du pèlerinage à La Mecque», a relevé le ministre. «Mon horizon est clair : je veux des aumôniers français, des imams français, des financements français. La République tend la main. C'est à l'Islam d'aller avec confiance» vers elle, a-t-il ajouté en s'adressant aux nouvelles générations issues de l'immigration.
Le ministre s'est, également, dit intransigeant face aux islamistes radicaux qui menacent gravement l'ordre public. «La République sera intransigeante avec ceux qui entendent la contester et je n'hésiterai pas à faire expulser ceux qui se réclament de l'Islam et représentent une menace grave pour l'ordre public et qui, étrangers dans notre pays, ne respectent pas nos lois et nos valeurs», a-t-il affirmé. «Je n'accepterai pas les comportements des salafistes et autres groupes qui défient la république», a-t-il ajouté.
Valls n'a pas manqué de rappeler que le projet de la Grande Mosquée de Strasbourg «s'est imposé contre les agitateurs, contre les discours de rejet, contre ceux qui, en détournant l'idée de la laïcité, trahissent ce qu'est notre république». «La laïcité n'est pas la négation de la religion. Au contraire, elle est acceptation et ouverture. Elle est protection et tolérance», a relevé le ministre en commentant les récentes déclarations de Marine Le Pen, président du parti d'extrême droite, le Front National (FN), qui a appelé à l'interdiction du voile dans l'espace public en France.
«Marine Le Pen fait mal à la France. Marine Le Pen ne peut se targuer d'aucun brevet de laïcité. Marine Le Pen est une incendiaire qui crie ‘Au feu’», a-t-il lancé, en précisant que «la laïcité apaise, protège et garantit la liberté religieuse à chacun». Au nom des musulmans de France, le Président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohamed Moussaoui, a dit «adhérer pleinement» à cette vision de la laïcité présentée par le ministre.
Moussaoui a souligné que les musulmans de France «sont dans leur immense majorité des citoyens responsables qui respectent le pacte civique et adhèrent totalement aux valeurs qui régissent notre pays». Mais, a-t-il poursuivi, ils «ne comprennent pas et n'acceptent pas que certains, ouvertement ou insidieusement, mettent en doute leur adhésion pleine et entière aux valeurs de la République».
Le président du CFCM a, par ailleurs, passé en revue l'état des lieux des mosquées en France, précisant que «l'espace total alloué au culte musulman en 2005, était de l'ordre de 250.000 m2 pour environ 1 million de fidèles qui souhaitaient participer à la prière hebdomadaire du vendredi». «C'est dire qu'il fallait, au moins, doubler la surface dont disposait le culte musulman pour faire face à la demande d'espace de prière pour les fidèles», a-t-il ajouté, affirmant que depuis quelques années, il y a une «remarquable phase de rattrapage» comme en témoigne les nouvelles inaugurations, notamment celle de cette mosquée de Strasbourg, «parmi les plus belles en Europe». Moussaoui a par ailleurs appelé à «la conscience et à la responsabilité de chacun», en attirant l'attention sur les «offenses méprisantes ou haineuses, les profanations de mosquées, de temples, de synagogues, d'églises ou de tombes dans les cimetières» en France.