Une nouvelle page commence, non sans appréhension, pour les héritiers d’Allal El Fassi. Au grand dam des poids lourds de l’Istiqlal, le tonitruant Hamid Chabat a coupé l’herbe sous le pied d’Abdelouahed El Fassi qu’on voulait présenter, il y a quelques mois, comme le seul candidat pour ce poste. Désormais, les Istiqlaliens sont appelés à accepter la nouvelle culture de démocratie qui marque une rupture avec la mentalité de consensus. Les déclarations de Chabat, d’Abbas El Fassi et d’Abdelouahed El Fassi, après l’annonce du nom du vainqueur, appellent à l’unité du parti. Mais malgré tout, des craintes sont véhiculées de part et d’autre. Les accusations et remarques acerbes formulées par les deux camps au cours des dernières semaines étaient musclées. Ainsi, la victoire de Chabat ne passera pas sans laisser de séquelles. Les prochains jours s’annoncent décisifs.
D’ailleurs, les premiers différends et bras de fer ont déjà commencé. Il s’avère, en effet, difficile pour certains ténors d’ouvrir une nouvelle page sans rancune. D’ailleurs, dès que le résultat a été annoncé, Nizar Baraka a distribué un communiqué annonçant le retrait de sa candidature pour le comité exécutif. Les échanges verbaux entre lui et le nouveau chef de file ont été si intenses qu’il est difficile de coopérer pour «des raisons de manque d’harmonie». Il est à noter que le règlement intérieur stipule que les ministres sont tous membres du comité exécutif, cependant leurs voix ne sont pas décisionnelles s’ils ne sont pas élus directement par le conseil national. Par ailleurs, d’autres ténors relevant du clan d’Abdelouahed El Fassi ont également retiré leur candidature après le refus de Chabat d’ajourner l’élection pour le comité exécutif, la plus haute instance du parti. Selon un Istiqlalien, la demande de report a été faite en raison du départ de bon nombre de membres du conseil national relevant du camp d’Abdelouahed El Fassi suite à l’échec de ce dernier. Aussi, plusieurs candidats ont décidé de rejoindre Nizar Baraka dans sa décision.
On peut citer, entre autres, Latifa Bennani Smires, Allal Mahnine, Hassan Sentissi, Abdeljebbar Rachdi… Le président du congrès Mohamed El Anasri tient à véhiculer un message rassurant. Pour lui, le parti arrivera à dépasser les différends et aller de l’avant malgré ce qui s’est passé. Pour sa part, Chabat affiche la mine des grands jours. Il insinue que personne n’est indispensable et que c’est la construction de l’avenir qui compte pour le moment d’autant plus que le PI «vient d’entrer dans le club des partis démocratiques et devient ainsi une institution, alors qu’auparavant il était un parti de personnes».Le nouveau secrétaire général promet le renouveau. Il estime que le parti s’est affaibli au cours des dernières années et qu’il est on ne peut plus nécessaire de redresser les dysfonctionnements. Le maire de Fès semble être conscient de la lourdeur de cette tâche. Aussi, signale-t-il que la première mission est de réhabiliter les affaires internes du parti et d’unir les Istiqlaliens, dont ceux qui n’apprécient pas la gestion passée. L’action gouvernementale est également dans la ligne de mire. Depuis la nomination du gouvernement d’Abdelilah Benkirane, nombreuses sont les voix dissonantes au sein du PI qui s’indignent du choix des profils des ministres istiqlaliens. Le rendement des responsables gouvernementaux de la formation de la balance est également pointé du doigt. On estime qu’ils sont très discrets et effacés en comparaison avec les ministres des autres partis de la coalition gouvernementale. Chabat, dans sa campagne auprès des militants, a promis un remaniement ministériel. A-t-il les moyens d’aller jusqu’au bout de son engagement ? Ses détracteurs en doutent. En tout cas, il promet un renforcement de l’action gouvernementale dans le cadre de l’unité du parti. Une unité qui demeure pour le moment fragile même si le secrétaire général sortant Abbas El Fassi avait tenu à indiquer que Chabat est désormais le secrétaire général de tous les Istiqlaliens et qu’il est appelé à ne pas faire de distinction entre les militants.