Yousra Amrani
08 Février 2024
À 21:08
Les présidents des groupes et groupements parlementaires de l’
opposition ont vertement critiqué jeudi l’emprise du
gouvernement sur la
Chambre des représentants qu’il a «transformée en caisse de résonance de ses réalisations», en étouffant toutes les initiatives de l’opposition. Lors d’une conférence de presse organisée jeudi à la Chambre des représentants, au lendemain de la présentation du bilan de cette Chambre, les quatre partis politiques rangés dans l’opposition (le
PPS, l’USFP, le MP et le PJD) ont visiblement mis leurs divergences de côté pour jouer la même partition. En tous cas, les présidents des groupes parlementaires n’ont ménagé aucun effort pour montrer qu’ils étaient sur la même longueur d’onde.
C’était le cas en particulier d’
Ahmed Chahid, président du groupe parlementaire de l’
USFP, et
Abdellah Bouanou, président du groupement parlementaire du
PJD, étant donné que les deux formations politiques se regardaient depuis toujours en chiens de faïence. «La coordination n’a jamais cessé entre les partis de l’opposition et cela s’est reflété lors de la présentation des amendements relatifs à la loi de Finances 2024», note Ahmed Chahid. Une déclaration corroborée par Abdellah Bouanou, qui a déclaré à son tour que «les partis de l’opposition n’ont pas besoin de coordonner toutes leurs initiatives, car ils ne sont pas liés par un programme commun, comme c’est le cas pour les partis de la majorité. Mais cela ne nous empêche pas d’accorder nos violons dans l’intérêt de l’action parlementaire», confie le député pjdiste.
Il faut dire que le bilan de la Chambre des représentants dressé mardi par son président Rachid Talbi Alami a eu le don d’agacer l’opposition. En effet, aucune de ses initiatives législatives n’a réussi à franchir le cap du Parlement lors de cette session automnale, tandis que 45% des questions orales posées sont restées sans réponse, témoignant ainsi de la faible interaction du gouvernement avec le Parlement.
«Il est malheureux de reconnaître que le Parlement ne représente désormais plus un espace de débat pour les questions qui préoccupent l’opinion publique. Il s’apparente plutôt à une annexe du gouvernement qui a pour principale mission de faire passer les lois élaborées par l’Exécutif. Sinon comment justifier le fait que sept des ministres formant le gouvernement n’ont jamais répondu présent à aucune des séances des questions orales qui les concernaient, tandis que le Chef de gouvernement n’a assisté qu’à 12 séances sur les 20 programmés. Ce genre de pratiques tue l’action politique et vide le travail parlementaire de sa substance», déplore Rachid Hamouni, président du groupe parlementaire du PPS.
Par ailleurs, les représentants des quatre partis de l’opposition n’ont pas manqué de critiquer le bilan gouvernemental à mi-mandat. À cet égard, le président du groupe parlementaire du Mouvement populaire,
Driss Sentissi, a fustigé l’approche du gouvernement en matière de gestion des crises, notamment celle des enseignants, soulignant non sans sarcasme que «l’Exécutif, qui se targue de disposer de hautes compétences, semble en manquer cruellement». Et d’ajouter que les réalisations à mi-mandat ne dépassent pas 25% de ce qui a été annoncé dans le cadre du programme gouvernemental. «Il faut reconnaître que ce gouvernement a échoué à mettre en œuvre bon nombre des promesses électorales, sans parler des projets abandonnés alors qu’ils faisaient partie du programme gouvernemental, sans parler de son approche aléatoire dans le secteur de l’éducation et qui a contribué à faire perdre aux élèves plus de deux mois de temps scolaire», note-t-il.
Abdellah Bouanou président du groupement parlementaire du Parti de la justice et du développement (PJD), n’y est pas allé non plus de main morte. Dans de son intervention, il a tiré à boulets rouges sur le Chef du gouvernement, l’accusant d’être l’exemple incarné «du conflit d’intérêts». Allant plus loin dans ses déclarations, le député pjdiste a souligné que l’exemple doit être donné par le Chef du gouvernement en vue de redonner confiance aux citoyens dans leurs institutions.
Visiblement remontée contre la majorité gouvernementale, la coordination de l’opposition n’a toutefois pas évoqué la question d’un éventuel recours à la motion de censure en vue de faire pression sur l’Exécutif. Elle s’est contentée de déclarer que ce sujet n’a pas encore été abordé entre les chefs de file des quatre partis formant l’opposition. Pour rappel, l’USFP avait parlé de la possibilité d’entamer une telle démarche dans l’unique but de faire pression sur le gouvernement, étant convaincue que la supériorité numérique de la majorité au sein de l’Institution législative fait que la présentation d’une motion de censure n’a aucune chance d’aboutir.