Hajjar El Haïti
09 Octobre 2025
À 17:45
Face à la grogne des jeunes et aux critiques croissantes sur l’état du système de santé, le ministre
Amine Tahraoui est plus que jamais sous pression. Les chantiers sont nombreux et
la confiance des citoyens vacille. Conscient de l’urgence, le ministère a annoncé ces derniers jours une série de mesures pour redresser la situation. Dans ce contexte, le Syndicat indépendant des infirmiers (SII) remet sur la table un dossier brûlant :
la défaillance du transport sanitaire. Un secteur qu’il qualifie de révélateur des failles structurelles du système de santé et pour lequel il appelle à une réforme urgente.
Dans une lettre officielle adressée au ministre, le Syndicat rappelle qu’il s’agit là de sa deuxième alerte concernant les difficultés rencontrées par le personnel lors du transport des patients entre les hôpitaux régionaux. Le SII appelle à l’ouverture, dans les plus brefs délais, d’un véritable
débat national afin de présenter des propositions concrètes pour revitaliser ce service vital, notamment à la veille d’un chantier royal majeur relatif à la réforme et à la généralisation du système de santé et de protection sociale.
Un service vital en crise«Le transport des patients et des femmes enceintes en état critique est un service nécessitant des soins intensifs, des techniques complexes et une coordination stricte entre établissements. Pourtant, il repose sur des équipes souvent contraintes de travailler dans des conditions extrêmes, au détriment de leurs droits matériels et moraux. Le manque de moyens et l’absence de protocoles clairs transforment chaque mission en épreuve pour le personnel infirmier», déplore
le Syndicat dans sa lettre.
Le Syndicat pointe également la
non-conformité des ambulances aux normes de sécurité, l’absence de cahier des charges pour leur maintenance, ainsi que des réparations de fortune qui exposent les équipes à un risque permanent. À cela s’ajoutent des poursuites judiciaires répétées, la facturation abusive du transport et du carburant malgré la gratuité prévue dans certains cas, ainsi que l’absence de coordination entre hôpitaux, provoquant engorgements, retards et tensions entre équipes expéditrices et réceptrices.
Des dysfonctionnements administratifs et juridiques persistantsLe Syndicat dénonce en outre de graves défaillances administratives : signature du bon de mission en l’absence de représentants officiels, non-inscription des agents dans les plannings de garde ou d’astreinte, dépassement des heures de travail réglementaires et absence de protocoles médicaux validés.Ces dysfonctionnements sont aggravés par
un vide juridique : absence d’ordonnance médicale ou de supervision directe lors des transferts, rétention du personnel en cas de décès du patient avant l’arrivée, et recours à des véhicules non officiels, sans cadre légal. Même la circulaire ministérielle du 1er octobre 2025, rappelant la nécessité de respecter la procédure de régulation médicale avant tout transfert, est jugée insuffisante. «Le texte ne présente aucune avancée substantielle et demeure vague», estime le Syndicat, qui regrette que le transport sanitaire ne soit toujours pas reconnu comme un acte infirmier à part entière.
Des recommandations pour une réforme urgenteFace à cette situation critique, le SII appelle à une réforme profonde et structurée du transport sanitaire. Il insiste d’abord sur la
clarification du cadre réglementaire, afin de définir précisément les missions et responsabilités de chaque acteur, et de reconnaître le transport sanitaire comme un véritable acte infirmier. Il réclame, également, une protection juridique effective pour les infirmiers, afin qu’ils soient couverts légalement lors des missions critiques, y compris en cas de complications ou d’accidents.
En parallèle, le Syndicat propose de renforcer
les moyens humains et matériels : recrutement de personnel qualifié, modernisation des ambulances et création d’unités intégrées capables de répondre efficacement aux urgences. Il suggère, également, une adaptation du système d’indemnisation, afin que la rémunération tienne compte de la dangerosité, des risques routiers et des conditions extrêmes rencontrées lors des transferts.
Le SII insiste aussi sur l’importance de
la formation et de la coordination : organisation de sessions sur le transport sécurisé, la gestion des urgences et la responsabilité légale, ainsi que l’amélioration de la communication entre hôpitaux expéditeurs et récepteurs.
Enfin, le Syndicat revendique sa participation aux concertations relatives au
transport sanitaire, afin de concevoir des solutions réalistes et durables, en phase avec les contraintes du terrain.
Pour le SII, ces mesures ne relèvent pas de simples recommandations administratives, mais constituent « la condition sine qua non d’un système de santé fonctionnel, capable de répondre aux urgences et de protéger le personnel qui en assure le service au quotidien».