Depuis 25 ans, sous le règne de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le Maroc a placé au cœur de ses priorités la modernisation de ses forces armées et la consolidation de son autonomie stratégique. Des réformes multidimensionnelles et multisectorielles ont été mises en œuvre, incluant la création de zones dédiées à l’industrie de défense pour réduire la dépendance à l’étranger et diversifier les sources d’approvisionnement. Sur le plan géopolitique, la diplomatie Royale a permis de sceller des alliances stratégiques solides et durables, visant à renforcer la paix et la sécurité tant au niveau régional que mondial.Par Dr Cherkaoui Roudani, expert en géostratégie et sécurité
Partenariats stratégiques
Il est certain que le paysage mondial futur se réorganisera autour de trois pôles principaux : les États-Unis, la Chine et l’Inde, acteur clé entre le Global North et le Global South. Dans ce contexte, le Maroc se positionne comme un acteur pivot dans l’espace méditerranéen et atlantique, notamment en renforçant ses relations économiques et commerciales avec le continent africain. L’importance géostratégique du Royaume, qui façonne l’architecture de ses relations à l’échelle des grands espaces, l’a conduit à renforcer activement ses partenariats à l’échelle mondiale. À travers une coopération bilatérale approfondie avec les États-Unis et d’autres pays, le Maroc s’engage dans des domaines cruciaux tels que la sécurité, la sécurité alimentaire, les énergies renouvelables, le climat et les infrastructures. Cette vision géostratégique se manifeste également par l’engagement du Royaume dans le dialogue méditerranéen et l’initiative d’intégrer les pays afro-atlantiques dans la géostratégie de l’espace atlantique, témoignant d’une volonté Royale de positionner l’Afrique au centre de la géopolitique mondiale.Sécurité en Afrique, enjeu majeur
À cet égard, la vision Royale pour l’Afrique repose sur la mise en œuvre de projets structurants capables de renforcer l’intégration africaine. Cette stratégie Royale, adoptée par de nombreux États africains, repose sur une étroite collaboration entre les pays du continent. Toutefois, si la sécurité reste un défi majeur, les nations africaines doivent aussi anticiper les nouvelles formes de conflits. Dans ce sens, le discours de Sa Majesté lors du 68e anniversaire des Forces Armées Royales a souligné l’importance de revoir les concepts de sécurité et de défense face aux menaces croissantes. Cette réflexion stratégique se traduit par l’adaptation des programmes et des stratégies pour mieux répondre à l’évolution complexe de la situation mondiale.Nul doute, l’autonomie stratégique de chaque pays étant relative, il est essentiel de diversifier les relations vitales en créant des alliances durables, fondées sur une convergence d’intérêts et une compréhension approfondie des besoins de chaque pays. La coopération militaire entre le Maroc et les États-Unis, illustrée par plusieurs manœuvres militaires, a des implications significatives pour la sécurité et la géopolitique en Méditerranée et dans l’Atlantique. Elle revêt également une dimension stratégique essentielle pour sécuriser le flanc sud de l’Alliance atlantique. En outre, le Maroc se positionne comme un rempart contre le terrorisme, tandis que les diverses crises affectant l’est et le nord de la Méditerranée représentent un défi majeur pour la stabilité et la sécurité mondiales, ainsi que pour le détroit de Gibraltar, un passage vital pour le commerce international.
Face aux nouvelles menaces, une coopération accrue s’impose
Dans ce contexte de menaces protéiformes, la réévaluation des alliances stratégiques est impérative. La transition vers des missions multinationales complexes exige une amélioration de l’interopérabilité entre forces alliées, un nouveau paradigme en matière de commandement et de contrôle, et une adaptation continue des standards. Les manœuvres militaires conjointes, telles qu’African Lion, Flintlock et Arcane Thunder 24, illustrent l’importance de l’harmonisation des concepts d’emploi à tous les niveaux, renforçant ainsi la coopération et la synchronisation entre partenaires et alliés.Cependant, malgré les avancées notables, l’utilisation par des groupes terroristes des technologies duales impose une réalité incontournable : la sécurisation des communications, la surveillance tactique et le renseignement sont désormais cruciaux pour contrer les défis posés par la militarisation des forces du chaos. Sur le plan tactique, plusieurs défis limitent l’efficacité des opérations conjointes entre alliés. Les disparités technologiques freinent la création d’une dynamique interopérable durable. Les systèmes avancés tels que les drones (UAS), le Command Post of the Future (CPOF), le Programme Conventional Prompt Global Strike (CPGS) avec des drones hypersoniques, et le Blue Force Tracker (BFT), utilisés notamment par les États-Unis, mettent en évidence les écarts technologiques entre les alliés. Pour assurer une synchronisation efficace, il est crucial de développer des solutions favorisant une intégration technologique cohérente et une vision globale partagée de la situation opérationnelle.
La modernisation des systèmes de communication et de détection, ainsi que l’intégration de technologies avancées sont essentielles pour maintenir une réponse cohérente aux défis de la cyberstratégie. De fait, la convergence stratégique et la résolution des défis tactiques permettront d’améliorer la préparation des forces alliées face aux menaces émergentes. Dans cette optique, l’exercice Arcane Thunder 24, qui s’est déroulé au Maroc pour la première fois, consolide les engagements définis dans la feuille de route militaire signée pour 2020-2030 lors de la visite de Mark Esper, alors ministre de la Défense américaine. Cette stratégie bilatérale a permis le développement d’initiatives conjointes pour améliorer l’interopérabilité, notamment à travers des programmes qui relèvent de l’art opératif. Ces programmes favorisent une meilleure compréhension et utilisation des systèmes et mécanismes procéduraux, améliorant ainsi la coordination sur le terrain et renforçant la cohésion entre les différentes composantes des forces militaires des deux pays.