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«Book Club Le Matin» : Une rencontre joyeusement sérieuse avec Fouad Laroui

On l’attendait, il a fait mieux que répondre présent. Fouad Laroui, fidèle à sa réputation, a électrisé le «Book Club Le Matin» avec une rencontre à la fois drôle, déroutante et profondément humaine. Face à une salle complice, l’auteur a partagé bien plus qu’un simple échange autour de son nouveau livre «Hooligans et Talibans», il a offert un moment suspendu, mêlant anecdotes et réflexions littéraires.

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Le recueil «Hooligans et Talibans», publié en avril 2025 aux éditions Rive Gauche, rassemble 99 chroniques écrites entre 2015 et 2017 pour le média «Le360.ma». Le titre, clin d’œil à une des chroniques les plus marquantes, fait le parallèle entre des supporteurs ivres détruisant une fontaine à Rome, et les talibans dynamitant les bouddhas de Bamiyan. «C’est la même bêtise, drapée dans deux bannières différentes», tranche Laroui.

S’il fait rire, c’est pour mieux faire réfléchir. Derrière la verve et les éclats de rire se cache une plume fine, qui interroge sans relâche la condition humaine, la société marocaine, et l’absurde du quotidien. Sa critique sociale, nourrie par dix années de chroniques hebdomadaires, ne tombe jamais dans la méchanceté gratuite. Au contraire, elle est empreinte de tendresse – et souvent dictée, dit-il, par l’indignation des autres : «Parfois, je ne suis que le porte-voix de quelqu’un qui m’a dit : “Tu peux écrire sur ça, s’il te plaît ?”»

Interrogé sur son goût pour les chroniques et les nouvelles, Laroui avoue préférer les formats courts aux romans-fleuves. «Le roman, c’est comme un 1500 mètres. La nouvelle, c’est l’art du plongeon. Il faut que la dernière phrase touche l’eau dans une perfection absolue.» Il se laisse même aller à quelques confidences sur ses rapports avec son éditeur, qui lui demande de produire des romans pour «être pris au sérieux en France». Résultat : «un roman, un recueil, un roman, un recueil... je fais les deux».

La critique comme acte d’amour

Laroui n’élude rien. La bureaucratie absurde, l'esprit «Mouqataâ», les travers culturels ou les incohérences sociales sont abordés avec un franc-parler savoureux. Mais toujours avec bienveillance : «Je critique parce que je veux qu’on avance.» Même lorsqu’il raconte, hilare, une mésaventure dans un taxi casablancais avec un chauffeur en quête d’amour, c’est pour pointer les fragilités, les solitudes, et les petits drames qui façonnent le Maroc d’aujourd’hui.

L’histoire de la publication de «Hooligans et Talibans» mérite à elle seule une chronique : un éditeur déterminé, un Riad à Azemmour, une porte verrouillée de l’extérieur, un contrat sur la table... et un hamster volé. Laroui en rit encore : «J’ai signé parce que j’avais faim.» Résultat : un ouvrage publié aux éditions Rive Gauche – non pas celles de Paris, mais de l’Oum Er-Rbia.

Enfin, en réponse à une question sur ses motivations, l’auteur conclut avec gravité et chaleur : «Un bon prof, c’est un prof généreux. Celui qui ne quitte pas la classe tant que tout le monde n’a pas compris.» Un propos salué par une salve d’applaudissements, à l’image de cette soirée : drôle, humaine, lucide et pleine d’esprit. Fouad Laroui, c’est un éclat de rire qui pense, une indignation qui fait sourire. Et si l’humour est bien «la politesse du désespoir», alors rarement désespoir aura été aussi joyeux.
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