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Faouzi Skali et Amal Ayouch, invités de «Ramadaniyate» Book Club Le Matin

Pour la deuxième année consécutive, Book Club Le Matin adapte ses rendez-vous littéraires à ce mois sacré en organisant une série de rencontres baptisées «Ramadaniyate». Et cette année, le choix s’est porté sur l’une des personnalités marocaines qui marque le monde du soufisme : j’ai nommé Faouzi Skali ! Et pour marquer ce début du cycle, les organisateurs ont voulu apporter de l’originalité en associant la talentueuse actrice Amal Ayouch et le coach fondateur de l’École du sens, Younes Lahiaoui. Un trio qui a emporté l’assistance dans le monde fou de Joha.

Le mythique siège de la région de Casablanca-Settat, situé au cœur du quartier des Habous, a accueilli la première rencontre du cycle «Ramadaniyate» de Book Club Le Matin. Quoi de plus de inspirant que ce cadre enchanteur pour une soirée débat autour du livre de Faouzi Skali «Sagesses et facéties de Joha», rythmée par une lecture poétique de ces contes par Amal Ayouche.


Les contes de Joha, personnage légendaire à la fois excentrique, sage et narquois, ont été transmis oralement de génération en génération, de la Méditerranée à l'Extrême-Orient. Dans le sillage d'une sagesse populaire, ces histoires sont irriguées par les enseignements du soufisme. «Joha est un personnage énigmatique qui a existé à travers l’histoire et dans plusieurs cultures de l’Islam et au-delà», souligne M. Skali. Mais pourquoi n’arrive-t-on pas à cerner ce personnage ni à l’identifier avec exactitude, Cette question a préoccupé notre invité qui a voulu en savoir plus sur son identité. D’où l’idée de réunir 70 récits drolatiques, et d’en expliquer les messages cachés et profonds, laissant les mots de Joha venir comme par fulgurance inspirer notre façon d'être et d'agir. «Joha est une personnalité ambiguë, à la fois bouffon, excentrique et sage».


Un humour philosophique

Pour M. Skali, à travers ses innombrables péripéties, Joha nous enseigne des choses fondamentales et d’une grande subtilité». Et de poursuivre : «Joha nous permet de saisir, comme une prémonition, une vérité dont on n’a pas su trouver l’expression». Dans le même ordre d'idées, M. Skali a expliqué devant les invités de Ramadaniyate Book Club que «par leurs aspects intemporels, les contes de Joha demeurent d'une étonnante actualité. Tels des miroirs de notre âme, ils reflètent notre propre vanité, nos illusions, nos errements. Cette personnalité nous bouscule et nous interroge».

Bien heureux ceux qui savent rire d’eux-mêmes, ils n’ont pas fini de s’amuser

Cette citation empruntée à Joseph Folliet traduit parfaitement, selon le maître soufi, l’effet des contes de Joha sur ceux qui les écoutent depuis des décennies. Joha représente en cela une figure spirituelle, dont l'attitude déconcertante vise à susciter en nous une perplexité, un choc salvateur. «Et si on apprenait à nous distancier, à nous voir dans nos façons d’être, dans nos illusions, dans nos folies intérieures... Nous sommes tous habités par cela, mais on résiste et on gère. Mais si on arrive à regarder ces caractères avec un effet de miroir, on va pouvoir nous créer un espace d’amusement», dit l’auteur. Pour lui, l’humour est cette capacité de se distancier par rapport à soi-même.
Cette capacité à saisir l’humour caractérise justement Faouzi Skali qui n’hésite pas lui-même à prendre de la distance et de savourer des instants d’amusement. Il en fait d’ailleurs la preuve devant l’assistance de ce soir en racontant un des contes de Joha. «Joha était juge, et il y a quelqu’un qui passe près de son village et se fait dépouiller pas des voleurs. Ce dernier, habillé d’une simple chemise, va voir le juge et lui dit : M. le juge, on m’a tout volé et je n’ai plus rien. Le juge répond : et cette chemise, vous l’aviez, pourquoi on ne vous l’a pas volée aussi ? Le voyageur répond : mais c’est tout ce qu’ils m’ont laissé ! Alors le juge lui dit : ce ne sont pas les nôtres ! Si c’étaient des voleurs du village, ils ne vous auraient rien laissé !»
Mais le maître soufi ne se contente pas du sens amusant de ce conte, il va lui trouver une signification philosophique pleine de sens. «C’est une histoire improbable à laquelle on peut apporter un sens. Dans un enseignement spirituel, on doit se dépouiller de tout, de toutes les sphères, de tous les sédiments de l’ego et de tous les masques. Un bon enseignement spirituel finit par nous dépouiller entièrement et nous rendre à nous-mêmes et à notre vérité première. Et donc qu’elle belle façon de le dire et d’en rire sans oublier de lire les messages cachés», souligne M. Skali.


«Connais-toi toi-même»
Celui qui observe de près les contes de Joha, se rend compte qu’ils traduisent des situations réelles de nos sens et nos caractères. Cette capacité de se connaître et de se distancier de soi et devenir soi-même l’objet de sa propre connaissance. C’est d’ailleurs cette réflexion que l’on retrouve au cœur de la thématique retenue pour la 16e édition du Festival de Fès de la culture soufie et des spiritualités du monde, qui se tiendra du 20 au 27 avril 2024. «Plusieurs contes de Joha sont une invitation à une introspection vivante pour réfléchir à comment nous fonctionnons et donc apprendre à nous connaître. Au-delà des multiples voiles de nos identités illusoires, on doit pouvoir atteindre la source de notre être le plus profond. Se rapprocher de cette source c’est, selon les différentes voies de la sagesse, nous rapprocher d’un bonheur et d’une liberté intérieurs inconditionnels».
Comme elle a débuté, la soirée s’est clôturée par une lecture mélodieuse des contes de Joha par l’actrice Amal Ayouch qui ont enchanté le public, l'on fait rire et poussé à rechercher les sens enfouis dans les paroles d’un sage légendaire.
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