Le Matin : Le Forum des droits humains à Essaouira insiste sur le rôle des mobilités humaines dans la transformation des identités culturelles, tant dans les pays d'accueil que d'origine. Comment percevez-vous cette transformation au sein de la communauté marocaine à l'étranger, et diriez-vous qu'il s'agit d'un enrichissement mutuel systématique, ou observe-t-on aussi des dynamiques plus asymétriques, voire conflictuelles ?
Driss El Yazami : Les mobilités humaines peuvent en effet être source d’enrichissement individuel et collectif, mais peuvent aussi générer des difficultés et des tensions. Les communautés marocaines réparties à travers le monde contribuent, de toute évidence, à l’enrichissement économique, culturel, social et politique de leurs sociétés d’installation, désormais durables. Tout comme elles élargissent le pluralisme de la société marocaine et contribuent à son développement. Cependant, ces communautés connaissent, pour une partie d’entre elles, des difficultés principalement socio-économiques qu’elles partagent avec les autres couches populaires des pays de résidence, ou sont confrontées à des discriminations. En outre, une des problématiques nouvelles de ces dernières décennies est l’instrumentalisation politicienne de la question migratoire. La relation avec la société d’origine se complexifie à son tour. Au-delà de l’attachement indéniable, toutes générations confondues, au Maroc, il y a une certaine distance, un éloignement qui se manifestent, et qui sont la conséquence naturelle, pourrions-nous dire, de dynamiques politiques, sociales et économiques différentes.
Dans un monde de plus en plus connecté, mais aussi parfois fermé, il est paradoxal que la libre circulation soit contrainte. Quels sont, selon vous, les principaux freins à une mobilité plus équitable, et comment le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME) œuvre-t-il, à son échelle, à la résilience et à l’innovation des migrants face à ces barrières ?
La réalité semble un peu plus complexe. Il y a eu, en effet, à partir des années 1980, de plus en plus d’entraves à la libre circulation des êtres humains, avec l’imposition de visas, la négociation d’accords bilatéraux, l’adoption de lois de plus en plus drastiques sur l’entrée et le séjour des étrangers, la mise en place d’outils, de politiques et d’organismes de plus en plus élaborés de surveillance des frontières, comme Frontex, par exemple. Mais les migrations n’ont pas cessé pour autant. Elles se sont même développées, comme en témoigne d’ailleurs l’expansion des communautés marocaines durant ces dernières décennies. Les politiques des États influent sur les mobilités humaines, mais elles ne les contrôlent pas totalement. Les ressorts qui poussent les humains à bouger et les raisons qui sont derrière l’appel à l’immigration sont autrement plus complexes et échappent, pour une grande part, à la seule raison politique.
Regardez ce qui se passe aujourd’hui en Europe : il y a à la fois des discours anti-immigration qui se développent, en même temps que des politiques, pratiquement dans tous les pays d’Europe notamment, d’encouragement de l’immigration et d’attractivité des compétences – et pas seulement hautement qualifiées. Le CCME agit dans le cadre de ses prérogatives : il ne fait pas partie de l’exécutif, faut-il le rappeler, et reste une instance constitutionnelle consultative et de prospective.
Face donc aux multiples barrières qui essaient d’entraver les mobilités humaines, nous contribuons modestement à la circulation des idées et des personnes entre les deux rives, par la tenue de séminaires de réflexion (par exemple ce forum), la traduction et la publication d’ouvrages, l’organisation d’expositions d’arts plastiques ou de photographies de Marocains du monde, le soutien à de nombreuses activités associatives ou académiques...
La dimension culturelle des migrations est trop souvent reléguée derrière les considérations sécuritaires ou économiques. Pourquoi, selon vous, cette relégation est-elle si persistante, et quelles stratégies le CCME met-il en place pour contrer les discours populistes qui présentent la migration comme une menace identitaire ?
Cette approche sécuritaire et économiciste est non seulement persistante, mais elle s’est singulièrement renforcée, malheureusement, ces dernières décennies, en raison, notamment, de cette instrumentalisation politicienne évoquée ci-dessus. Le CCME peut, en effet, contribuer à combattre ces dérives populistes – et le plus souvent xénophobes – sans oublier qu’il est avant tout une institution publique marocaine, installée au Maroc, qui ne peut en aucun cas agir en lieu et place des acteurs de la communauté (élus, acteurs associatifs, syndicalistes, intellectuels, responsables religieux, sportifs, entrepreneurs, artistes, chercheurs, journalistes, etc.) qui se comptent aujourd’hui par milliers. Le Conseil peut, sous certaines conditions, agir en appui, en respectant leur autonomie et leurs rythmes. Le CCME peut aussi agir avec les acteurs internationaux similaires, comme les différents conseils de la diaspora, les organes des Nations unies, etc.
La culture est un puissant vecteur d'expression. Quel rôle peut jouer la société civile, notamment les artistes et les créateurs, pour raconter une autre histoire des migrations ?
Cette approche qui fait de la culture une dimension centrale des migrations marocaines est, de notre point de vue, essentielle. À la vérité, les artistes et les créateurs marocains du monde racontent depuis longtemps une autre histoire de la migration, sans qu’elle soit visible à nos yeux, obnubilés que nous étions par l’apport économique des mobilités humaines – apport tout aussi essentiel, bien évidemment. Il faut aussi dire qu’il fallait que le temps fasse son œuvre et que la recherche académique avance.
Quelle autre histoire nous racontent donc les migrants marocains ?
Tout d’abord, nous savons aujourd’hui que les mobilités marocaines sont anciennes dans le temps, diverses et aux ressorts multiples. Je pense à ces paysans du Rif qui jouent un rôle essentiel dans la mise en valeur de l’Oranie coloniale dès la moitié du XIXᵉ siècle, et que nous connaissons mieux grâce aux travaux de Mimoun Aziza, et que célèbre la poésie populaire féminine du Rif. Je pense aussi à ces étudiants envoyés, toujours au XIXeᵉ siècle, en Europe par le Sultan Hassan Ier. À la suite de ces pionniers, des dizaines de milliers de soldats et de travailleurs sont mobilisés durant la Première Guerre mondiale, alors que de nouveaux étudiants se dirigent du nord du Maroc vers les universités de Naplouse, du Caire ou de Damas, alors que d’autres s’inscrivent dans les universités françaises. Peu nombreux, il est vrai, ces étudiants jouent un rôle essentiel dans la cristallisation du nationalisme indépendantiste.
C’est aussi assez tôt (durant l’entre-deux-guerres) que les premiers artistes inaugurent ce qui deviendra une tradition : partir vers l’Orient (Le Caire principalement) ou vers la métropole pour apprendre, se produire, découvrir d’autres univers culturels et enrichir à leur tour la culture marocaine dans tous les domaines. En cela, «Le voyage de Paris», titre d’une chanson de l’immense artiste amazigh Lhadj Belaïd, présent à Paris à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, est emblématique d’une tradition toujours vivace. C’est par le voyage, le dialogue avec les autres cultures et les emprunts féconds, la confrontation à l’altérité que le Maroc s’est fait aussi. Les enfants de l’immigration, qui nous émerveillent et nous enrichissent aujourd’hui par leur créativité, reprennent et renouvellent cette longue tradition.
Avec l'émergence de l'intelligence artificielle, du métavers et des plateformes numériques, assiste-t-on à de nouvelles formes de mobilités culturelles, voire de migrations dématérialisées ?
La circulation culturelle en migration a changé de visage. Les frontières s’effacent derrière les écrans, et on peut désormais «habiter» plusieurs espaces à la fois. On est passé de la «double absence», décrite par feu le sociologue Abdelmalek Sayad, à la figure du «migrant connecté», pour qui le lien avec le pays d’origine est quotidien, interactif et immédiat.
Les plateformes numériques facilitent le partage de langues, de traditions, d’expressions artistiques, qui circulent en temps réel et sans frontières physiques. Elles donnent naissance à des communautés diasporiques virtuelles où émergent des identités hybrides. Les migrants peuvent ainsi rester enracinés tout en s’ouvrant à d’autres cultures.
Ces technologies font des individus des acteurs transnationaux, capables de s’inscrire dans plusieurs communautés culturelles à la fois. La communauté marocaine à l’étranger l’illustre bien : sur Facebook, WhatsApp, TikTok ou Instagram, des centaines de groupes partagent souvenirs, recettes, fêtes, débats et récits. Ces espaces deviennent des archives vivantes de la mémoire migrante.
Une première étude du CCME, menée sur la présence des Marocains du monde sur Facebook notamment, révèle l’importance et la densité de ces échanges, où se croisent Marocains du monde, Marocains d’ici et membres d’autres diasporas. Cette interconnexion favorise une mémoire collective partagée et la construction de nouveaux récits identitaires.
Conscient de ces dynamiques, le CCME s’engage sur les réseaux sociaux. Nous soutenons la création de contenus numériques culturels comme les podcasts lancés il y a quelques mois sur les parcours et savoirs des Marocains du monde et sur les migrations. L’objectif est de partager, transmettre, relier, et être dans le monde. Ce type d’initiative contribue à visibiliser les récits, à valoriser des savoirs issus de la migration et à inscrire la migration dans un imaginaire positif.
Cependant, ces nouvelles formes de mobilités culturelles dématérialisées ne sont pas sans limites ni risques. Pour que ces espaces restent inclusifs et porteurs de sens, ils doivent rester connectés aux réalités et faire face à des défis, notamment au risque de la désinformation.
Quel message souhaitez-vous adresser lors du Forum des droits humains à Essaouira pour que la culture devienne un véritable levier d’intégration et d’affirmation de soi, et non un facteur de stigmatisation ?
Je ne crois pas que ce soit un hasard s’il y a eu cette rencontre entre l’équipe du CCME et l’équipe du Festival Gnaoua et musiques du monde, qui a placé au cœur de son projet la réhabilitation d’une tradition musicale populaire autrefois marginale, et qui a érigé la rencontre, le dialogue et le métissage des musiques en principes cardinaux. À partir de cette philosophie d’action profondément humaniste, qui inscrit l’ouverture dans la longue durée, nous voulons en effet contribuer à mettre la culture au cœur du développement, mettre en place un espace de débat pluraliste et fraternel, un espace civique inscrit dans les réalités marocaines, mais ouvert au monde.
Driss El Yazami : Les mobilités humaines peuvent en effet être source d’enrichissement individuel et collectif, mais peuvent aussi générer des difficultés et des tensions. Les communautés marocaines réparties à travers le monde contribuent, de toute évidence, à l’enrichissement économique, culturel, social et politique de leurs sociétés d’installation, désormais durables. Tout comme elles élargissent le pluralisme de la société marocaine et contribuent à son développement. Cependant, ces communautés connaissent, pour une partie d’entre elles, des difficultés principalement socio-économiques qu’elles partagent avec les autres couches populaires des pays de résidence, ou sont confrontées à des discriminations. En outre, une des problématiques nouvelles de ces dernières décennies est l’instrumentalisation politicienne de la question migratoire. La relation avec la société d’origine se complexifie à son tour. Au-delà de l’attachement indéniable, toutes générations confondues, au Maroc, il y a une certaine distance, un éloignement qui se manifestent, et qui sont la conséquence naturelle, pourrions-nous dire, de dynamiques politiques, sociales et économiques différentes.
Dans un monde de plus en plus connecté, mais aussi parfois fermé, il est paradoxal que la libre circulation soit contrainte. Quels sont, selon vous, les principaux freins à une mobilité plus équitable, et comment le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME) œuvre-t-il, à son échelle, à la résilience et à l’innovation des migrants face à ces barrières ?
La réalité semble un peu plus complexe. Il y a eu, en effet, à partir des années 1980, de plus en plus d’entraves à la libre circulation des êtres humains, avec l’imposition de visas, la négociation d’accords bilatéraux, l’adoption de lois de plus en plus drastiques sur l’entrée et le séjour des étrangers, la mise en place d’outils, de politiques et d’organismes de plus en plus élaborés de surveillance des frontières, comme Frontex, par exemple. Mais les migrations n’ont pas cessé pour autant. Elles se sont même développées, comme en témoigne d’ailleurs l’expansion des communautés marocaines durant ces dernières décennies. Les politiques des États influent sur les mobilités humaines, mais elles ne les contrôlent pas totalement. Les ressorts qui poussent les humains à bouger et les raisons qui sont derrière l’appel à l’immigration sont autrement plus complexes et échappent, pour une grande part, à la seule raison politique.
Regardez ce qui se passe aujourd’hui en Europe : il y a à la fois des discours anti-immigration qui se développent, en même temps que des politiques, pratiquement dans tous les pays d’Europe notamment, d’encouragement de l’immigration et d’attractivité des compétences – et pas seulement hautement qualifiées. Le CCME agit dans le cadre de ses prérogatives : il ne fait pas partie de l’exécutif, faut-il le rappeler, et reste une instance constitutionnelle consultative et de prospective.
Face donc aux multiples barrières qui essaient d’entraver les mobilités humaines, nous contribuons modestement à la circulation des idées et des personnes entre les deux rives, par la tenue de séminaires de réflexion (par exemple ce forum), la traduction et la publication d’ouvrages, l’organisation d’expositions d’arts plastiques ou de photographies de Marocains du monde, le soutien à de nombreuses activités associatives ou académiques...
La dimension culturelle des migrations est trop souvent reléguée derrière les considérations sécuritaires ou économiques. Pourquoi, selon vous, cette relégation est-elle si persistante, et quelles stratégies le CCME met-il en place pour contrer les discours populistes qui présentent la migration comme une menace identitaire ?
Cette approche sécuritaire et économiciste est non seulement persistante, mais elle s’est singulièrement renforcée, malheureusement, ces dernières décennies, en raison, notamment, de cette instrumentalisation politicienne évoquée ci-dessus. Le CCME peut, en effet, contribuer à combattre ces dérives populistes – et le plus souvent xénophobes – sans oublier qu’il est avant tout une institution publique marocaine, installée au Maroc, qui ne peut en aucun cas agir en lieu et place des acteurs de la communauté (élus, acteurs associatifs, syndicalistes, intellectuels, responsables religieux, sportifs, entrepreneurs, artistes, chercheurs, journalistes, etc.) qui se comptent aujourd’hui par milliers. Le Conseil peut, sous certaines conditions, agir en appui, en respectant leur autonomie et leurs rythmes. Le CCME peut aussi agir avec les acteurs internationaux similaires, comme les différents conseils de la diaspora, les organes des Nations unies, etc.
La culture est un puissant vecteur d'expression. Quel rôle peut jouer la société civile, notamment les artistes et les créateurs, pour raconter une autre histoire des migrations ?
Cette approche qui fait de la culture une dimension centrale des migrations marocaines est, de notre point de vue, essentielle. À la vérité, les artistes et les créateurs marocains du monde racontent depuis longtemps une autre histoire de la migration, sans qu’elle soit visible à nos yeux, obnubilés que nous étions par l’apport économique des mobilités humaines – apport tout aussi essentiel, bien évidemment. Il faut aussi dire qu’il fallait que le temps fasse son œuvre et que la recherche académique avance.
Quelle autre histoire nous racontent donc les migrants marocains ?
Tout d’abord, nous savons aujourd’hui que les mobilités marocaines sont anciennes dans le temps, diverses et aux ressorts multiples. Je pense à ces paysans du Rif qui jouent un rôle essentiel dans la mise en valeur de l’Oranie coloniale dès la moitié du XIXᵉ siècle, et que nous connaissons mieux grâce aux travaux de Mimoun Aziza, et que célèbre la poésie populaire féminine du Rif. Je pense aussi à ces étudiants envoyés, toujours au XIXeᵉ siècle, en Europe par le Sultan Hassan Ier. À la suite de ces pionniers, des dizaines de milliers de soldats et de travailleurs sont mobilisés durant la Première Guerre mondiale, alors que de nouveaux étudiants se dirigent du nord du Maroc vers les universités de Naplouse, du Caire ou de Damas, alors que d’autres s’inscrivent dans les universités françaises. Peu nombreux, il est vrai, ces étudiants jouent un rôle essentiel dans la cristallisation du nationalisme indépendantiste.
C’est aussi assez tôt (durant l’entre-deux-guerres) que les premiers artistes inaugurent ce qui deviendra une tradition : partir vers l’Orient (Le Caire principalement) ou vers la métropole pour apprendre, se produire, découvrir d’autres univers culturels et enrichir à leur tour la culture marocaine dans tous les domaines. En cela, «Le voyage de Paris», titre d’une chanson de l’immense artiste amazigh Lhadj Belaïd, présent à Paris à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, est emblématique d’une tradition toujours vivace. C’est par le voyage, le dialogue avec les autres cultures et les emprunts féconds, la confrontation à l’altérité que le Maroc s’est fait aussi. Les enfants de l’immigration, qui nous émerveillent et nous enrichissent aujourd’hui par leur créativité, reprennent et renouvellent cette longue tradition.
Avec l'émergence de l'intelligence artificielle, du métavers et des plateformes numériques, assiste-t-on à de nouvelles formes de mobilités culturelles, voire de migrations dématérialisées ?
La circulation culturelle en migration a changé de visage. Les frontières s’effacent derrière les écrans, et on peut désormais «habiter» plusieurs espaces à la fois. On est passé de la «double absence», décrite par feu le sociologue Abdelmalek Sayad, à la figure du «migrant connecté», pour qui le lien avec le pays d’origine est quotidien, interactif et immédiat.
Les plateformes numériques facilitent le partage de langues, de traditions, d’expressions artistiques, qui circulent en temps réel et sans frontières physiques. Elles donnent naissance à des communautés diasporiques virtuelles où émergent des identités hybrides. Les migrants peuvent ainsi rester enracinés tout en s’ouvrant à d’autres cultures.
Ces technologies font des individus des acteurs transnationaux, capables de s’inscrire dans plusieurs communautés culturelles à la fois. La communauté marocaine à l’étranger l’illustre bien : sur Facebook, WhatsApp, TikTok ou Instagram, des centaines de groupes partagent souvenirs, recettes, fêtes, débats et récits. Ces espaces deviennent des archives vivantes de la mémoire migrante.
Une première étude du CCME, menée sur la présence des Marocains du monde sur Facebook notamment, révèle l’importance et la densité de ces échanges, où se croisent Marocains du monde, Marocains d’ici et membres d’autres diasporas. Cette interconnexion favorise une mémoire collective partagée et la construction de nouveaux récits identitaires.
Conscient de ces dynamiques, le CCME s’engage sur les réseaux sociaux. Nous soutenons la création de contenus numériques culturels comme les podcasts lancés il y a quelques mois sur les parcours et savoirs des Marocains du monde et sur les migrations. L’objectif est de partager, transmettre, relier, et être dans le monde. Ce type d’initiative contribue à visibiliser les récits, à valoriser des savoirs issus de la migration et à inscrire la migration dans un imaginaire positif.
Cependant, ces nouvelles formes de mobilités culturelles dématérialisées ne sont pas sans limites ni risques. Pour que ces espaces restent inclusifs et porteurs de sens, ils doivent rester connectés aux réalités et faire face à des défis, notamment au risque de la désinformation.
Quel message souhaitez-vous adresser lors du Forum des droits humains à Essaouira pour que la culture devienne un véritable levier d’intégration et d’affirmation de soi, et non un facteur de stigmatisation ?
Je ne crois pas que ce soit un hasard s’il y a eu cette rencontre entre l’équipe du CCME et l’équipe du Festival Gnaoua et musiques du monde, qui a placé au cœur de son projet la réhabilitation d’une tradition musicale populaire autrefois marginale, et qui a érigé la rencontre, le dialogue et le métissage des musiques en principes cardinaux. À partir de cette philosophie d’action profondément humaniste, qui inscrit l’ouverture dans la longue durée, nous voulons en effet contribuer à mettre la culture au cœur du développement, mettre en place un espace de débat pluraliste et fraternel, un espace civique inscrit dans les réalités marocaines, mais ouvert au monde.