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«De choses et d'autres» : «IA : attentes et conséquences» avec Ahmed Chitachni

Invité dans l'émission «De choses et d'autres», le politiste, essayiste et chercheur en anthropologie urbaine Ahmed Chitachni parle de l’IA, de ses usages et de ses conséquences potentielles sur la société marocaine, marquée par un fort illectronisme.

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Pour l’essayiste Ahmed Chitachni, parler d'intelligence artificielle dans le contexte marocain, c'est se poser la question de quelle intelligence artificielle (IA) nous parlons et si nous avons les moyens de concrétiser nos désirs et nos aspirations. «L’IA représente une évolution technologique irrémédiable et il est crucial de déterminer si nous avons les moyens d'éviter de manquer cette évolution, comme cela a été le cas pour l'industrialisation. Se contenter d'importer des applications toutes faites de l'étranger pourrait poser un problème de souveraineté nationale sur l'IA et le numérique», explique Chitachni.

En effet, si le désir de développer l'IA est présent au Maroc, le pays ne dispose pas encore de la souveraineté nécessaire sur cette technologie ni sur l'économie du savoir qui l'accompagne. «Il est impératif de développer ce savoir, car derrière chaque machine se trouve un être humain, avec ses propres désirs et idées. La question fondamentale est de savoir si l'IA prend en compte les spécificités culturelles propres à chaque pays», explique le politiste.

L’IA face à la bureaucratie

Selon Ahmed Chitachni, le principal problème auquel le Maroc est confronté est la nécessité de disposer de données (Data), sans lesquelles, tout désir de développer l'IA serait peine perdue. «Par exemple, l'une des administrations les plus avancées en matière de numérique est la Direction des impôts. Qu'en est-il des autres administrations ?», se demande le chercheur.

Poser la question sur l’état d’avancement du pays, en termes de numérisation et de dématérialisation des processus administratifs, soulève d'autres enjeux. «Le Maroc dispose d'une démocratie embryonnaire, dans laquelle le mastodonte bureaucratique gère encore la plupart des affaires. Cette bureaucratie est-elle prête à se dessaisir de ses prérogatives et de ses secrets professionnels pour permettre la dématérialisation des processus ? La bureaucratie peut-elle se défaire de l'autorité qu'elle détient pour permettre une véritable dématérialisation des données ?», énumère Ahmed Chitachni, qui estime qu’il est d’abord primordial d'élargir le réseau informatique, de généraliser la numérisation et la dématérialisation, avant de discuter de l'IA.

L’éthique et l’humain

D'un point de vue sociétal, Ahmed Chitachni pense que le Maroc n'est pas encore prêt à accueillir l'IA. Il souligne que la société marocaine est marquée par l'illettrisme et l'illectronisme. «Ceux qui n'ont pas un smartphone, une tablette ou une adresse IP sont comme des sans-abri numériques. Et ceux qui en possèdent, ont-ils les compétences et la culture nécessaires pour les manipuler ? Les infopauvres représentent une fracture numérique qui vient s'ajouter aux fractures sociale et culturelle, déjà existantes», estime le chercheur qui souligne qu’en absence d'autorité régulatrice sur l'IA, «n’importe qui peut faire n'importe quoi, ce qui représente un dilemme éthique majeur».

Les pathologies du numérique, telles que l'isolement, la dépendance, le harcèlement, les fake news, sans parler du dark web et de ses pratiques illégales, peuvent être aggravées par l'IA. Cependant, «l'IA peut également aider à résoudre certains de ces problèmes, notamment dans le domaine de la santé. Tout est toujours une question d'éthique», rappelle Ahmed Chitachni.

À l’adresse des cellules de recherche sur l’IA au Maroc, le politiste rappelle l'importance d'encourager la multidisciplinarité pour développer une IA adaptée à la société marocaine. Car le Maroc ne veut plus être un simple consommateur ou artisan du savoir, mais aspire à créer une véritable industrie du savoir.
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