Faut-il fermer les yeux pour sauver son ménage, comme le lui suggère sa mère ? Faut-il faire comme la tante qui découvre, à la mort de son mari, qu’il avait une deuxième épouse, ou comme sa belle-mère qui voit sa fille adoptive prendre sa place ? Non ! Animée d’une colère sourde, Malika ne veut pas entendre son mâle ou du moins écouter ce qu’il a à dire. Son divorce choque tout le monde, mais la réconcilie avec elle-même. Elle reprend la vie, là où elle l’avait arrêtée, et multiplie les rencontres et les expériences de vie.
Dans «Mâle entendu», les relations amoureuses de Malika illustrent sa quête de sens et d’identité, tout en mettant en lumière les problèmes qu’elle rencontre face à des figures masculines incapables de répondre à ses attentes. Lorsqu’elle s’envole à Paris, reprendre ses études, son rapport à son professeur, juif marocain quinquagénaire, est intellectuellement stimulant. Mais il se mue en attachement qui reflète une tentative de trouver chez un homme mûr la stabilité et la sagesse qu’elle associe à son émancipation. Pourtant, elle croit comprendre que cet homme est étouffé par un amour maternel oppressant et exclusif. Ce constat renvoie à la désillusion qui imprègne le parcours de Malika, mais aussi à la manière dont elle apprend à reconnaître les limites des autres, sans se définir par leurs échecs.Invitée aux États-Unis, par son amie d’enfance Soha, Malika rencontre William et semble trouver la perle rare. La jeune femme explore l’idéal masculin dans toute sa superficialité séduisante. Cependant, le désenchantement n’est pas loin, lorsqu’elle découvre le passé trouble qui menace d’entacher sa propre réputation. Cette énième déception met en évidence une réalité plus profonde : aucun partenaire, aussi «parfait» soit-il, ne peut combler un vide identitaire ou effacer les blessures du passé. Et lorsqu’avec son amie Soha, Malika entame un nouveau projet de vie, abandonnant l’illusion de l’idylle romantique, elle a enfin l’occasion d’entendre son ex-mari. Une révélation pour le moins bouleversante lui permet de réévaluer sa vie et ses projets, ainsi que de se réconcilier avec elle-même. Bien que dépourvue du triomphe éclatant d’une happy end classique, cette conclusion occasionne une forme d’éveil et de lucidité émotionnelle caractéristiques de la guérison. Professeure universitaire de Lettres et membre de la Chaire Icesco Rabat, Amina Achour fait partie du Parlement des écrivaines francophones. Autrice de plusieurs publications académiques, elle avait publié en 2015 «Kilito en questions», composé de plusieurs entretiens avec cette grande figure de la littérature marocaine (La Croisée des Chemins).