Le développement d’une nation comme d’un continent se fait à travers ses compétences et talents. Le continent africain possède un réservoir de talents considérable, dont le potentiel doit être pleinement exploité. En libérant ces énergies créatives et productives, l’Afrique pourrait non seulement stimuler sa croissance économique, mais aussi transformer son paysage social, culturel et technologique. Ce potentiel humain, allié à l’explosion technologique, permet l’émergence de modèles économiques innovants. Cela se traduira par des niveaux d’engagement plus élevés, entraînant une performance économique supérieure. Le plus important est d’inscrire cette performance dans une logique d’amélioration durable. Pour y arriver il est essentiel que les pays africains coopèrent dans un esprit de partage d’expériences et de best practices. C’est précisément l’objectif de la 22e édition des Journées africaines des ressources humaines (JARH), qui a eu lieu à El Jadida les 22 et 23 novembre 2024, à l’initiative de l’Association des gestionnaires et formateurs du personnel (AGEF) et de l’Association africaine des formateurs du personnel (AFDIP).
Les participants et les professionnels RH ont eu l’opportunité d’échanger les idées et les solutions pratiques aux défis contemporains auxquels le continent est confronté. Les discussions ont permis de mettre en lumière les enjeux clés liés à la gestion des ressources humaines. Parmi les sujets abordés, plusieurs ont retenu une attention particulière, notamment celui du leadership africain pour une intégration et une inclusion économique et sociale. Deux autres sujets clés abordés concernent les nouveaux enjeux des ressources humaines en Afrique et le rôle des acteurs pour attirer la diaspora africaine.
Claude Aimé Tasembedo, universitaire reconnu et homme politique engagé, met en lumière l’importance cruciale du leadership «transformationnel». Pour ce militant, également, président de l’ONG CAP-3ESS, ce modèle de leadership ne se réduit pas à une simple application de techniques de gestion ou à des concepts abstraits de management. Le leadership transformationnel repose sur une vision claire, un sens profond de la mission et une capacité à motiver les individus à dépasser leurs propres limites. Il ne s’agit pas seulement de diriger, mais d’amener les collaborateurs à se réinventer eux-mêmes dans le cadre d’un projet collectif. Tasembedo souligne que ce type de leadership est particulièrement efficace dans des périodes de transition. En milieux professionnels comme dans le domaine académique, il s’agit avant tout d’un processus dynamique où les dirigeants ou les académiciens sont appelés à catalyser un changement profond en fonction des réalités du terrain. Le message est clair : il est impératif de se «décomplexer» face aux défis actuels et de se projeter activement dans l’avenir, en définissant des objectifs clairs, réalistes et réalisables. Cette approche, dit-il, est la clé pour bâtir un futur prospère, fondée sur l’action et l’audace.
Hicham Zouanat, président de la Commission sociale de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), a souligné l’urgence de la gestion des crises sociales sur le continent, notamment la question du chômage des jeunes. «L’Afrique dispose d’un dividende démographique inestimable, une véritable opportunité pour son développement», a-t-il affirmé. Cependant, il pointe du doigt une exploitation insuffisante de ce potentiel. Le véritable défi, selon lui, réside dans la formation et la qualification des jeunes, un maillon essentiel pour transformer ce dividende.
L’un des défis majeurs soulignés par Zouanat est la «guerre des talents», un phénomène croissant et crucial dans le monde actuel. Cette compétition acharnée pour attirer et retenir les meilleurs profils devient de plus en plus présente à mesure que les entreprises cherchent à s’assurer les compétences les plus pointues pour rester compétitives. La guerre des talents ne se limite pas seulement à un enjeu de recrutement, mais touche également à la rétention et à l’attraction des talents dans un contexte économique mondial.
L’une des propositions les plus fortes de Zouanat est la nécessité pour l’Afrique de prendre des décisions audacieuses en matière d’industrialisation. Pour cet expert, l’industrie représente le moteur principal de l’économie dans de nombreux pays, et aucun pays n’a connu une véritable prospérité sans passer par une phase de forte industrialisation. «C’est dans ce secteur que se trouvent les leviers essentiels de l’innovation, de la production de valeurs». Les Directions des ressources humaines (DRH) occupent une place stratégique et essentielle dans le secteur industriel, en particulier face à l’évolution rapide des compétences requises, induite par les avancées technologiques. En effet, l’industrie est un domaine où l’innovation et la transformation numérique redéfinissent constamment les métiers et les processus de production. À cet égard, la fonction RH doit jouer un rôle clé pour garantir que les entreprises disposent des compétences nécessaires pour rester compétitives et adaptées aux défis de demain.
L’enjeu est double : d’une part, il s’agit d’acquérir une maîtrise des outils technologiques, en particulier ceux liés à l’Intelligence artificielle (IA), qui transforment le paysage professionnel et, d’autre part, il est crucial de réinventer les méthodes d’accompagnement, en privilégiant l’écoute et une communication claire et ouverte. Pour encourager le développement personnel et professionnel des collaborateurs, il est impératif de leur accorder une certaine liberté, notamment en leur permettant de faire des erreurs. Cette approche est essentielle, car elle stimule l’initiative individuelle et favorise une culture de l’innovation. En effet, la prise de risque calculée et la possibilité d’apprendre de ses échecs accélèrent la créativité et l’amélioration continue.
En parallèle, un autre levier de progrès réside dans la mise en place de mécanismes de partage de bonnes pratiques au sein de l’organisation. Bellal a insisté sur le fait qu’une véritable culture de collaboration et de transmission des savoirs est indispensable. «Si l’on sait prendre en main les ressources à notre disposition et les développer de manière collective, les résultats seront tout simplement exceptionnels», a-t-il déclaré. Ainsi, pour faire face aux défis actuels et préparer l’avenir, l’intégration de l’IA et l’accompagnement humain sont des axes essentiels sur lesquels les entreprises doivent s’appuyer. Ces efforts combinés permettront d’optimiser les ressources humaines et technologiques, tout en cultivant une atmosphère propice à l’innovation durable.
En conclusion, investir dans le capital humain dépasse largement une simple priorité économique : il constitue une véritable stratégie de développement durable. Les résultats des benchmarks sont particulièrement révélateurs et vont jouer un rôle clé dans l’amélioration de nos prises de décision, notamment en ce qui concerne l’élaboration de plans d’action pour le développement des ressources humaines. Ils vont nous permettre d’identifier les meilleures pratiques et de cibler plus précisément les leviers d’amélioration pour optimiser la gestion et la croissance de notre capital humain. Comme l’a souligné M. Zouanat, des exemples édifiants tels que la Corée du Sud, Singapour, Taïwan et le Rwanda illustrent de manière marquante cette dynamique de transformation. Ces nations ont su opérer une véritable métamorphose en se concentrant sur leur atout le plus précieux : leur potentiel humain.
«Avec 600 participants, cet événement marque une étape importante en assurant la présidence de l’Association africaine des formateurs et directeurs du personnel (AFDIP) pour les deux prochaines années. Cela reflète la maturité du sujet dans notre pays, étroitement lié au développement des compétences et à l’emploi. Mon message aujourd’hui aux directeurs des ressources humaines (DRH) du Maroc et de l’Afrique est clair : soyez davantage sensibles à l’inclusion et ouvrez-vous aux personnes qui ont besoin d’une première chance. Le rôle des DRH est crucial pour faire avancer les valeurs de diversité, d’équité et d’intégration au sein des entreprises. Dans ce cadre, le gouvernement, sous la Conduite éclairée de S.M. le Roi Mohammed VI, a élaboré une feuille de route ambitieuse, mobilisant 14 milliards de dirhams dans la loi de finances. Cette stratégie vise à faire de l’année 2025 une véritable rupture en matière d’emploi et de formation professionnelle. Nous comptons sur l’engagement des responsables RH, qui représentent le cœur battant des entreprises, pour relever les défis du recrutement, de l’accompagnement des talents et de leur stabilité dans les emplois. Ensemble, nous pouvons contribuer à améliorer le bien-être de nos concitoyens et à renforcer le développement économique et social de l’Afrique.»
Déclaration du vice-président de la CGEM
«Les ressources humaines sont au centre de la compétitivité du Maroc. En effet, notre pays bénéficie d’un dividende démographique unique, avec un âge moyen des travailleurs d’environ 29 ans, contre 41 ans en Europe. Cela signifie que nous disposons d’une force de travail jeune, dynamique et performante. Nous constatons déjà cet atout à travers l’intérêt croissant des entreprises internationales qui choisissent le Maroc pour s’implanter. Toutefois, il est essentiel de prendre soin de ce capital humain, notamment en accélérant la formation, en particulier la formation professionnelle, qui est un levier clé pour maintenir notre compétitivité. Par ailleurs, cet événement rappelle l’ouverture naturelle du Maroc sur son continent en accueillant de nombreux jeunes venus d’autres pays africains, qui choisissent d’y vivre et d’y travailler. Une autre synergie importante réside dans la capacité de notre système éducatif à s’adapter aux métiers de demain. L’intelligence artificielle, les énergies vertes, la gestion de l’eau ou encore la durabilité sont autant de domaines stratégiques qui nécessitent une offre de formation adaptée. Nous devons donc anticiper ces évolutions et travailler collectivement pour aligner l’enseignement sur les besoins de demain, afin de garantir un développement durable et compétitif pour le Maroc et l’ensemble du continent africain.»
Déclaration de l'associé gérant du cabinet Mazars au Maroc et président de la Commission «Afrique» de le CGEM
«L’Afrique dispose d’une population jeune. Un atout qui est à la fois un défi et une opportunité. Le défi réside dans la nécessité de créer des emplois adaptés, ce qui passe impérativement par une formation qualifiée et en phase avec les besoins du marché. Par ailleurs, l’Afrique est devenue une réponse clé à la problématique mondiale des talents. Nous sommes confrontés à un paradoxe : nos compétences qualifiées sont régulièrement “pillées” par l’Occident, ce qui exige de nous une mobilisation collective pour former davantage de talents et adapter leurs compétences aux exigences actuelles. Pour relever ce défi, il est impératif de renforcer la collaboration entre les centres de formation et les entreprises, notamment les DRH. Des forums comme ces Journées africaines offrent une plateforme précieuse pour partager des expériences et développer des solutions communes. Le Maroc, en tant que pays hôte et président actuel de l’AFDIP, joue un rôle central dans cette dynamique. Son expertise en matière de formation professionnelle dans des secteurs clés comme l’automobile, l’aéronautique, l’agriculture et les téléservices, ainsi que son leadership dans les industries émergentes, peut bénéficier à tout le continent.»
Déclaration du fondateur et directeur exécutif de l’African Futures Institute
«L’Afrique dispose d’un atout unique : son capital humain jeune. Pour transformer ce bonus démographique en dividende démographique, il est impératif d’investir massivement dans des politiques de valorisation des RH. Cela signifie offrir une éducation et des formations adaptées pour permettre à nos jeunes de répondre aux besoins de l’économie moderne. Par ailleurs, en Afrique, l’humain reste central : ici, ce sont les préoccupations humaines qui façonnent l’économie, et non l’inverse, comme dans de nombreuses sociétés industrialisées. C’est pourquoi il est crucial de penser une économie qui tienne compte des spécificités sociologiques et culturelles de l’Afrique. L’Afrique doit concevoir un modèle de développement qui lui soit propre, en phase avec ses réalités et les aspirations de ses peuples. Le Maroc, par exemple, propose un modèle de développement endogène qui peut inspirer d’autres pays du continent. En effet, le royaume illustre ces efforts remarquables, qui ne passent pas inaperçus et attirent de nombreux acteurs africains et internationaux. Ce sont des initiatives qui inspirent et montrent la voie. Le succès du Maroc, dans ses projets de développement, sera aussi le succès de l’Afrique.»
Déclaration du président de la Commission sociale de la CGEM
«Lorsque nous abordons les enjeux des ressources humaines en Afrique, il est essentiel de distinguer deux types de défis : ceux qui sont spécifiques à notre continent et ceux que nous partageons avec le reste du monde. Sur le plan spécifique, l’Afrique fait face à des crises récurrentes qui exigent des approches réactives et préventives, tant pour sauver les entreprises que pour maintenir les emplois. L’autre défi majeur pour le continent est le chômage. Bien que nous disposions d’un dividende démographique unique, nous peinons à exploiter pleinement ce potentiel. La formation, l’éducation et la qualification restent des maillons faibles. Cependant, avec l’essor de l’Intelligence artificielle (IA) générative et des plateformes d’apprentissage en ligne, nous avons désormais des outils à portée de main pour combler ces lacunes. Aujourd’hui, il n’y a plus d’excuse pour ne pas se former, et les entreprises, comme les individus, doivent saisir ces opportunités. En ce qui concerne les enjeux globaux, leur intensité est souvent exacerbée en Afrique. Par exemple, la gestion des talents reste un défi majeur, avec une véritable “guerre des talents” dans des secteurs clés où l’expertise manque cruellement. De plus, la fonction RH en Afrique souffre d’un manque de structuration, notamment pour les PME où des dispositifs tels que les DRH part-time ou partagés pourraient faire une réelle différence.»
Déclaration du DRH d’Inwi
«Le défi principal du continent reste le développement des compétences. Avec comme leitmotiv : “Think global, Act local” (penser globalement, mais agir localement), nous devons adopter une vision stratégique globale tout en veillant à l’adapter aux réalités et spécificités locales. Imposer des modèles standardisés, sans tenir compte des particularités culturelles et économiques, ne peut tout simplement pas fonctionner. Un autre enjeu majeur est l’émergence de l’Intelligence artificielle (IA) et la transformation digitale. Ces avancées technologiques doivent être intégrées. Il est donc impératif d’accompagner les entreprises africaines dans cette évolution pour leur permettre d’atteindre un haut niveau de compétitivité et d’excellence. Qu’on le veuille ou non, derrière chaque machine et chaque technologie, il y aura toujours un humain. Le développement des compétences humaines reste donc central pour tirer parti de l’IA et des outils technologiques. En investissant dans le capital humain, les entreprises africaines, comme celles du reste du monde, pourront non seulement relever leurs défis, mais aussi atteindre les niveaux de performance et de compétitivité qu’elles ambitionnent. C’est par l’Homme que passe la transformation, et c’est avec lui que le futur de l’Afrique se construira.»
Déclaration du DG Maghreb Industrie et vice-président de la CGEM
«Une des spécificités du continent africain est le faible niveau de commerce intrafricain. C’est dans ce contexte que l’Accord de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) prend tout son sens, avec l’ambition de créer une zone de libre-échange à l’échelle du continent. Pour que cette initiative porte ses fruits, il est impératif de mettre en place des règles communes, qu’elles soient industrielles, commerciales ou encore relatives à la définition des métiers. Si nous parvenons à cette harmonisation, nous disposerons d’un continent intégré, positionné comme l’avenir économique et humain de la planète. L’Afrique est en mesure de dépasser ses niveaux de développement actuels et d’atteindre un stade plus avancé, avec une plus grande valeur ajoutée. Les besoins croissants en matière de développement humain seront mieux servis par les Africains eux-mêmes. Le Maroc, en accueillant de nombreux étudiants d’Afrique subsaharienne et d’autres régions, contribue à cette dynamique en formant des talents qui participeront à cette transformation. Toutefois, nous devons aller encore plus loin. Il est crucial d’exiger de nous-mêmes plus de performance et de compétitivité. Que ce soit au niveau des chefs d’entreprise, des employés, des industries ou de l’État, chacun doit jouer son rôle pour bâtir une Afrique intégrée, prospère et tournée vers l’avenir.»
Déclaration du fondateur et DG du cabinet Diorh
«Nous assistons à une évolution rapide marquée par des bouleversements extraordinaires, notamment liés à l’IA. Nous ignorons encore toutes les transformations que cette technologie entraînera dans nos manières de travailler, nos organisations et nos stratégies, mais ce changement est en cours et il est impératif de s’y préparer dès maintenant. L’un des enjeux fondamentaux réside dans la libération des énergies et la préparation des individus à ces transformations. Cela passe par une meilleure formation, une adaptation progressive aux nouveaux outils, et une intégration réfléchie de ces technologies au sein des entreprises. Il s’agit non seulement de permettre aux collaborateurs de travailler avec ces outils, mais aussi de les accompagner dans une démarche d’apprentissage. Cette démarche ne doit pas être perçue comme une obligation, mais comme une opportunité personnelle et professionnelle. Il ne faut pas sous-estimer les capacités humaines. L’humain regorge de ressources souvent insoupçonnées. Si nous savons détecter ces ressources, les valoriser et les développer, les résultats peuvent être exceptionnels. C’est dans cette perspective que nous devons avancer, en misant sur l’intelligence collective et la résilience des individus face à ces enjeux.»
Le Matin : Les Journées africaines des ressources humaines viennent de s’achever. Quel bilan en tirez-vous ?
Bouchra Nhaili : C’est un moment de joie et de fierté. Cette 22ᵉ édition a réuni plus de 600 participants, venus du Maroc et de divers pays africains, pour partager des moments d’échange et de réflexion. Nous avons fait de notre mieux pour accueillir nos amis africains et offrir un programme riche en contenu. Les moments forts ont été nombreux, à commencer par les allocutions inaugurales. M. le ministre Younes Sekkouri a notamment souligné le rôle central du capital humain dans le développement des entreprises et des nations.
Quels sont les moments forts de cette édition ?
L’un des moments marquants a été l’annonce de la création de l’AGEF Sahara, qui sera notre sixième section régionale, dans les régions du Sud. Cette initiative s’inscrit dans les orientations nationales pour renforcer le modèle économique et le capital humain dans cette région stratégique. Un autre moment clé a été le passage de la présidence de l’Association africaine des formateurs du personnel (AFDIP) au Maroc. Souleymane Soro, président sortant, m’a désignée pour assumer cette responsabilité pour les deux prochaines années. C’est un honneur et une lourde responsabilité que je suis prête à relever. Nous avons également inauguré les stands d’exposition avec nos partenaires et sponsors, en présence de M. le ministre, du vice-président de la CGEM et du gouverneur d’El Jadida. C’était une occasion unique de découvrir les innovations des entreprises marocaines et d’observer leur évolution par rapport à l’année précédente. Par ailleurs, les discussions sur le contexte macroéconomique africain et les relations Sud-Sud ont suscité un grand intérêt. Cela montre l’engouement pour des sujets stratégiques qui vont au-delà de la simple gestion des ressources humaines.
Quels sont les projets prioritaires pour l’AGEF Sahara et l’AFDIP sous votre présidence ?
Pour l’AGEF Sahara, notre priorité est de renforcer le capital humain et de soutenir les entreprises dans leur montée en puissance dans les régions du Sud. Nous voulons accompagner le développement économique tout en tissant des relations solides avec les associations locales et internationales. En ce qui concerne l’AFDIP, nous travaillerons à valoriser les initiatives des Associations africaines membres. Beaucoup font un travail remarquable, mais il manque de visibilité. Nous allons donc renforcer la communication et élargir nos partenariats pour promouvoir le capital humain à l’échelle du continent.
Comment envisagez-vous la coopération internationale dans ce domaine ?
Nous voulons sortir des approches cloisonnées. L’idée est de collaborer avec toutes les associations de ressources humaines, qu’elles soient africaines ou internationales. Ensemble, nous pouvons avancer plus vite et plus efficacement. Nous avons déjà évoqué des projets communs avec la NDRH et d’autres partenaires. La coopération Sud-Sud reste une priorité, mais nous souhaitons également élargir notre réseau de partenariats à l’échelle mondiale. Pour clôturer, je tiens à remercier toutes les parties prenantes. Ensemble, nous oserons rêver et mettre en œuvre des actions concrètes pour faire avancer notre vision commune. Ces deux années à venir seront une opportunité de mettre en avant non seulement nos associations, mais aussi le Maroc, qui porte désormais la présidence de l’AFDIP. Je suis convaincue qu’ensemble, nous relèverons les défis qui nous attendent.
Les participants et les professionnels RH ont eu l’opportunité d’échanger les idées et les solutions pratiques aux défis contemporains auxquels le continent est confronté. Les discussions ont permis de mettre en lumière les enjeux clés liés à la gestion des ressources humaines. Parmi les sujets abordés, plusieurs ont retenu une attention particulière, notamment celui du leadership africain pour une intégration et une inclusion économique et sociale. Deux autres sujets clés abordés concernent les nouveaux enjeux des ressources humaines en Afrique et le rôle des acteurs pour attirer la diaspora africaine.
Quel leadership pour l’Afrique ?
Les attentes de l’Afrique en termes de développement sont énormes. Pour réussir la transformation sociale et économique du continent, il est essentiel de réinventer le leadership. Amine Benlemlih, professeur en stratégie et organisation et directeur du Centre d’Excellence LTA à l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), a abordé les approches managériales nécessaires pour relever les grands défis contemporains. Il a particulièrement mis l’accent sur le concept de «leadership adaptatif». Pour ce praticien chercheur engagé, spécialisé en intelligence collective et dans les approches stratégiques de transformation, cette approche de gestion qui se concentre sur la capacité des leaders à s’adapter aux changements rapides et complexes s’avère une compétence essentielle pour naviguer dans un environnement en mutation. Il a également, insisté sur les valeurs humaines fondamentales qui doivent accompagner ce type de leadership, à savoir le dialogue, l’inclusion et la solidarité active. Ce type de leadership n’est pas une idée nouvelle, mais il est ancré dans l’histoire et les valeurs culturelles des sociétés africaines. En somme, il représente une approche adaptée pour relever les défis contemporains, particulièrement pour l’Afrique, qui dispose déjà, grâce à son passé, des bases solides pour faire face aux défis de demain.Claude Aimé Tasembedo, universitaire reconnu et homme politique engagé, met en lumière l’importance cruciale du leadership «transformationnel». Pour ce militant, également, président de l’ONG CAP-3ESS, ce modèle de leadership ne se réduit pas à une simple application de techniques de gestion ou à des concepts abstraits de management. Le leadership transformationnel repose sur une vision claire, un sens profond de la mission et une capacité à motiver les individus à dépasser leurs propres limites. Il ne s’agit pas seulement de diriger, mais d’amener les collaborateurs à se réinventer eux-mêmes dans le cadre d’un projet collectif. Tasembedo souligne que ce type de leadership est particulièrement efficace dans des périodes de transition. En milieux professionnels comme dans le domaine académique, il s’agit avant tout d’un processus dynamique où les dirigeants ou les académiciens sont appelés à catalyser un changement profond en fonction des réalités du terrain. Le message est clair : il est impératif de se «décomplexer» face aux défis actuels et de se projeter activement dans l’avenir, en définissant des objectifs clairs, réalistes et réalisables. Cette approche, dit-il, est la clé pour bâtir un futur prospère, fondée sur l’action et l’audace.
Le dividende démographique : une opportunité
La 22e édition des JARH n’a pas seulement été une occasion pour dresser un état des lieux de la fonction RH en Afrique, mais aussi un véritable laboratoire d’idées pour anticiper les défis à venir et définir les leviers d’action nécessaires pour faire des ressources humaines un pilier du développement économique et social sur le continent.Hicham Zouanat, président de la Commission sociale de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), a souligné l’urgence de la gestion des crises sociales sur le continent, notamment la question du chômage des jeunes. «L’Afrique dispose d’un dividende démographique inestimable, une véritable opportunité pour son développement», a-t-il affirmé. Cependant, il pointe du doigt une exploitation insuffisante de ce potentiel. Le véritable défi, selon lui, réside dans la formation et la qualification des jeunes, un maillon essentiel pour transformer ce dividende.
L’un des défis majeurs soulignés par Zouanat est la «guerre des talents», un phénomène croissant et crucial dans le monde actuel. Cette compétition acharnée pour attirer et retenir les meilleurs profils devient de plus en plus présente à mesure que les entreprises cherchent à s’assurer les compétences les plus pointues pour rester compétitives. La guerre des talents ne se limite pas seulement à un enjeu de recrutement, mais touche également à la rétention et à l’attraction des talents dans un contexte économique mondial.
L’une des propositions les plus fortes de Zouanat est la nécessité pour l’Afrique de prendre des décisions audacieuses en matière d’industrialisation. Pour cet expert, l’industrie représente le moteur principal de l’économie dans de nombreux pays, et aucun pays n’a connu une véritable prospérité sans passer par une phase de forte industrialisation. «C’est dans ce secteur que se trouvent les leviers essentiels de l’innovation, de la production de valeurs». Les Directions des ressources humaines (DRH) occupent une place stratégique et essentielle dans le secteur industriel, en particulier face à l’évolution rapide des compétences requises, induite par les avancées technologiques. En effet, l’industrie est un domaine où l’innovation et la transformation numérique redéfinissent constamment les métiers et les processus de production. À cet égard, la fonction RH doit jouer un rôle clé pour garantir que les entreprises disposent des compétences nécessaires pour rester compétitives et adaptées aux défis de demain.
Intégrer l’IA et accompagner les talents
Libérer les énergies au sein des équipes et favoriser une approche inclusive et proactive vis-à-vis des technologies émergentes. Tel a été l’idée défendue par Essaid Bellal, fondateur du cabinet Diorh. Selon lui, il est essentiel d’aider les individus à se former et à intégrer ces outils de manière fluide et pertinente. Cela passe par un accompagnement constant, qui inclut à la fois les jeunes talents et les plus expérimentés, afin de créer une dynamique d’apprentissage continu.L’enjeu est double : d’une part, il s’agit d’acquérir une maîtrise des outils technologiques, en particulier ceux liés à l’Intelligence artificielle (IA), qui transforment le paysage professionnel et, d’autre part, il est crucial de réinventer les méthodes d’accompagnement, en privilégiant l’écoute et une communication claire et ouverte. Pour encourager le développement personnel et professionnel des collaborateurs, il est impératif de leur accorder une certaine liberté, notamment en leur permettant de faire des erreurs. Cette approche est essentielle, car elle stimule l’initiative individuelle et favorise une culture de l’innovation. En effet, la prise de risque calculée et la possibilité d’apprendre de ses échecs accélèrent la créativité et l’amélioration continue.
En parallèle, un autre levier de progrès réside dans la mise en place de mécanismes de partage de bonnes pratiques au sein de l’organisation. Bellal a insisté sur le fait qu’une véritable culture de collaboration et de transmission des savoirs est indispensable. «Si l’on sait prendre en main les ressources à notre disposition et les développer de manière collective, les résultats seront tout simplement exceptionnels», a-t-il déclaré. Ainsi, pour faire face aux défis actuels et préparer l’avenir, l’intégration de l’IA et l’accompagnement humain sont des axes essentiels sur lesquels les entreprises doivent s’appuyer. Ces efforts combinés permettront d’optimiser les ressources humaines et technologiques, tout en cultivant une atmosphère propice à l’innovation durable.
En conclusion, investir dans le capital humain dépasse largement une simple priorité économique : il constitue une véritable stratégie de développement durable. Les résultats des benchmarks sont particulièrement révélateurs et vont jouer un rôle clé dans l’amélioration de nos prises de décision, notamment en ce qui concerne l’élaboration de plans d’action pour le développement des ressources humaines. Ils vont nous permettre d’identifier les meilleures pratiques et de cibler plus précisément les leviers d’amélioration pour optimiser la gestion et la croissance de notre capital humain. Comme l’a souligné M. Zouanat, des exemples édifiants tels que la Corée du Sud, Singapour, Taïwan et le Rwanda illustrent de manière marquante cette dynamique de transformation. Ces nations ont su opérer une véritable métamorphose en se concentrant sur leur atout le plus précieux : leur potentiel humain.
L’implication des diasporas africaines, une nécessité
Les JARH 2024 ont mis en lumière un enjeu crucial pour l’avenir de l’Afrique : le rôle central que peut jouer sa diaspora dans le développement économique et social du continent. Lors d’un panel dédié à ce sujet, plusieurs experts se sont accordés à souligner l’importance stratégique de cette population dans le renforcement des capacités africaines. Les interventions ont insisté sur le fait que la diaspora africaine ne représente pas uniquement un vivier de talents et de compétences, mais aussi un véritable moteur d’innovation et d’entrepreneuriat. En effet, cette communauté présente à travers le monde constitue une ressource inestimable pour l’Afrique. Que ce soit dans les secteurs des technologies, de la santé, de l’éducation, ou encore de l’industrie, les membres de la diaspora apportent une expertise précieuse qui peut aider à moderniser les infrastructures, à accélérer la transformation numérique et à répondre aux défis de développement.Journées africaines des ressources humaines : ils ont dit
Déclaration du ministre de l’Inclusion économique, de la petite entreprise, de l’emploi et des compétencesYounes Sekkouri : «Un appel à l’inclusion et à la mobilisation pour les ressources humaines en Afrique»
«Avec 600 participants, cet événement marque une étape importante en assurant la présidence de l’Association africaine des formateurs et directeurs du personnel (AFDIP) pour les deux prochaines années. Cela reflète la maturité du sujet dans notre pays, étroitement lié au développement des compétences et à l’emploi. Mon message aujourd’hui aux directeurs des ressources humaines (DRH) du Maroc et de l’Afrique est clair : soyez davantage sensibles à l’inclusion et ouvrez-vous aux personnes qui ont besoin d’une première chance. Le rôle des DRH est crucial pour faire avancer les valeurs de diversité, d’équité et d’intégration au sein des entreprises. Dans ce cadre, le gouvernement, sous la Conduite éclairée de S.M. le Roi Mohammed VI, a élaboré une feuille de route ambitieuse, mobilisant 14 milliards de dirhams dans la loi de finances. Cette stratégie vise à faire de l’année 2025 une véritable rupture en matière d’emploi et de formation professionnelle. Nous comptons sur l’engagement des responsables RH, qui représentent le cœur battant des entreprises, pour relever les défis du recrutement, de l’accompagnement des talents et de leur stabilité dans les emplois. Ensemble, nous pouvons contribuer à améliorer le bien-être de nos concitoyens et à renforcer le développement économique et social de l’Afrique.»
Déclaration du vice-président de la CGEM
Mehdi Tazi : «Investir dans les ressources humaines pour renforcer la compétitivité du Maroc»
«Les ressources humaines sont au centre de la compétitivité du Maroc. En effet, notre pays bénéficie d’un dividende démographique unique, avec un âge moyen des travailleurs d’environ 29 ans, contre 41 ans en Europe. Cela signifie que nous disposons d’une force de travail jeune, dynamique et performante. Nous constatons déjà cet atout à travers l’intérêt croissant des entreprises internationales qui choisissent le Maroc pour s’implanter. Toutefois, il est essentiel de prendre soin de ce capital humain, notamment en accélérant la formation, en particulier la formation professionnelle, qui est un levier clé pour maintenir notre compétitivité. Par ailleurs, cet événement rappelle l’ouverture naturelle du Maroc sur son continent en accueillant de nombreux jeunes venus d’autres pays africains, qui choisissent d’y vivre et d’y travailler. Une autre synergie importante réside dans la capacité de notre système éducatif à s’adapter aux métiers de demain. L’intelligence artificielle, les énergies vertes, la gestion de l’eau ou encore la durabilité sont autant de domaines stratégiques qui nécessitent une offre de formation adaptée. Nous devons donc anticiper ces évolutions et travailler collectivement pour aligner l’enseignement sur les besoins de demain, afin de garantir un développement durable et compétitif pour le Maroc et l’ensemble du continent africain.»
Déclaration de l'associé gérant du cabinet Mazars au Maroc et président de la Commission «Afrique» de le CGEM
Abdou Souleye Diop : «L’Afrique face aux défis et opportunités du développement des talents»
«L’Afrique dispose d’une population jeune. Un atout qui est à la fois un défi et une opportunité. Le défi réside dans la nécessité de créer des emplois adaptés, ce qui passe impérativement par une formation qualifiée et en phase avec les besoins du marché. Par ailleurs, l’Afrique est devenue une réponse clé à la problématique mondiale des talents. Nous sommes confrontés à un paradoxe : nos compétences qualifiées sont régulièrement “pillées” par l’Occident, ce qui exige de nous une mobilisation collective pour former davantage de talents et adapter leurs compétences aux exigences actuelles. Pour relever ce défi, il est impératif de renforcer la collaboration entre les centres de formation et les entreprises, notamment les DRH. Des forums comme ces Journées africaines offrent une plateforme précieuse pour partager des expériences et développer des solutions communes. Le Maroc, en tant que pays hôte et président actuel de l’AFDIP, joue un rôle central dans cette dynamique. Son expertise en matière de formation professionnelle dans des secteurs clés comme l’automobile, l’aéronautique, l’agriculture et les téléservices, ainsi que son leadership dans les industries émergentes, peut bénéficier à tout le continent.»
Déclaration du fondateur et directeur exécutif de l’African Futures Institute
Alioune Sall : «L’Afrique face aux défis et opportunités de son développement humain»
«L’Afrique dispose d’un atout unique : son capital humain jeune. Pour transformer ce bonus démographique en dividende démographique, il est impératif d’investir massivement dans des politiques de valorisation des RH. Cela signifie offrir une éducation et des formations adaptées pour permettre à nos jeunes de répondre aux besoins de l’économie moderne. Par ailleurs, en Afrique, l’humain reste central : ici, ce sont les préoccupations humaines qui façonnent l’économie, et non l’inverse, comme dans de nombreuses sociétés industrialisées. C’est pourquoi il est crucial de penser une économie qui tienne compte des spécificités sociologiques et culturelles de l’Afrique. L’Afrique doit concevoir un modèle de développement qui lui soit propre, en phase avec ses réalités et les aspirations de ses peuples. Le Maroc, par exemple, propose un modèle de développement endogène qui peut inspirer d’autres pays du continent. En effet, le royaume illustre ces efforts remarquables, qui ne passent pas inaperçus et attirent de nombreux acteurs africains et internationaux. Ce sont des initiatives qui inspirent et montrent la voie. Le succès du Maroc, dans ses projets de développement, sera aussi le succès de l’Afrique.»
Déclaration du président de la Commission sociale de la CGEM
Hicham Zouanat : «La fonction RH doit être un moteur de transformation pour l’Afrique»
«Lorsque nous abordons les enjeux des ressources humaines en Afrique, il est essentiel de distinguer deux types de défis : ceux qui sont spécifiques à notre continent et ceux que nous partageons avec le reste du monde. Sur le plan spécifique, l’Afrique fait face à des crises récurrentes qui exigent des approches réactives et préventives, tant pour sauver les entreprises que pour maintenir les emplois. L’autre défi majeur pour le continent est le chômage. Bien que nous disposions d’un dividende démographique unique, nous peinons à exploiter pleinement ce potentiel. La formation, l’éducation et la qualification restent des maillons faibles. Cependant, avec l’essor de l’Intelligence artificielle (IA) générative et des plateformes d’apprentissage en ligne, nous avons désormais des outils à portée de main pour combler ces lacunes. Aujourd’hui, il n’y a plus d’excuse pour ne pas se former, et les entreprises, comme les individus, doivent saisir ces opportunités. En ce qui concerne les enjeux globaux, leur intensité est souvent exacerbée en Afrique. Par exemple, la gestion des talents reste un défi majeur, avec une véritable “guerre des talents” dans des secteurs clés où l’expertise manque cruellement. De plus, la fonction RH en Afrique souffre d’un manque de structuration, notamment pour les PME où des dispositifs tels que les DRH part-time ou partagés pourraient faire une réelle différence.»
Déclaration du DRH d’Inwi
Rachid Bakkar : «Les enjeux des ressources humaines en Afrique à l’ère de la transformation digitale»
«Le défi principal du continent reste le développement des compétences. Avec comme leitmotiv : “Think global, Act local” (penser globalement, mais agir localement), nous devons adopter une vision stratégique globale tout en veillant à l’adapter aux réalités et spécificités locales. Imposer des modèles standardisés, sans tenir compte des particularités culturelles et économiques, ne peut tout simplement pas fonctionner. Un autre enjeu majeur est l’émergence de l’Intelligence artificielle (IA) et la transformation digitale. Ces avancées technologiques doivent être intégrées. Il est donc impératif d’accompagner les entreprises africaines dans cette évolution pour leur permettre d’atteindre un haut niveau de compétitivité et d’excellence. Qu’on le veuille ou non, derrière chaque machine et chaque technologie, il y aura toujours un humain. Le développement des compétences humaines reste donc central pour tirer parti de l’IA et des outils technologiques. En investissant dans le capital humain, les entreprises africaines, comme celles du reste du monde, pourront non seulement relever leurs défis, mais aussi atteindre les niveaux de performance et de compétitivité qu’elles ambitionnent. C’est par l’Homme que passe la transformation, et c’est avec lui que le futur de l’Afrique se construira.»
Déclaration du DG Maghreb Industrie et vice-président de la CGEM
Hakim Marrakchi : «L’intégration économique africaine est un enjeu clé pour l’avenir du continent»
«Une des spécificités du continent africain est le faible niveau de commerce intrafricain. C’est dans ce contexte que l’Accord de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) prend tout son sens, avec l’ambition de créer une zone de libre-échange à l’échelle du continent. Pour que cette initiative porte ses fruits, il est impératif de mettre en place des règles communes, qu’elles soient industrielles, commerciales ou encore relatives à la définition des métiers. Si nous parvenons à cette harmonisation, nous disposerons d’un continent intégré, positionné comme l’avenir économique et humain de la planète. L’Afrique est en mesure de dépasser ses niveaux de développement actuels et d’atteindre un stade plus avancé, avec une plus grande valeur ajoutée. Les besoins croissants en matière de développement humain seront mieux servis par les Africains eux-mêmes. Le Maroc, en accueillant de nombreux étudiants d’Afrique subsaharienne et d’autres régions, contribue à cette dynamique en formant des talents qui participeront à cette transformation. Toutefois, nous devons aller encore plus loin. Il est crucial d’exiger de nous-mêmes plus de performance et de compétitivité. Que ce soit au niveau des chefs d’entreprise, des employés, des industries ou de l’État, chacun doit jouer son rôle pour bâtir une Afrique intégrée, prospère et tournée vers l’avenir.»
Déclaration du fondateur et DG du cabinet Diorh
Essaid Bellal : «L’humain regorge de ressources souvent insoupçonnées»
«Nous assistons à une évolution rapide marquée par des bouleversements extraordinaires, notamment liés à l’IA. Nous ignorons encore toutes les transformations que cette technologie entraînera dans nos manières de travailler, nos organisations et nos stratégies, mais ce changement est en cours et il est impératif de s’y préparer dès maintenant. L’un des enjeux fondamentaux réside dans la libération des énergies et la préparation des individus à ces transformations. Cela passe par une meilleure formation, une adaptation progressive aux nouveaux outils, et une intégration réfléchie de ces technologies au sein des entreprises. Il s’agit non seulement de permettre aux collaborateurs de travailler avec ces outils, mais aussi de les accompagner dans une démarche d’apprentissage. Cette démarche ne doit pas être perçue comme une obligation, mais comme une opportunité personnelle et professionnelle. Il ne faut pas sous-estimer les capacités humaines. L’humain regorge de ressources souvent insoupçonnées. Si nous savons détecter ces ressources, les valoriser et les développer, les résultats peuvent être exceptionnels. C’est dans cette perspective que nous devons avancer, en misant sur l’intelligence collective et la résilience des individus face à ces enjeux.»
Entretien avec Bouchra Nhaili, présidente de l’AGEF nationale et de l’AFDIP
Le Matin : Les Journées africaines des ressources humaines viennent de s’achever. Quel bilan en tirez-vous ?
Bouchra Nhaili : C’est un moment de joie et de fierté. Cette 22ᵉ édition a réuni plus de 600 participants, venus du Maroc et de divers pays africains, pour partager des moments d’échange et de réflexion. Nous avons fait de notre mieux pour accueillir nos amis africains et offrir un programme riche en contenu. Les moments forts ont été nombreux, à commencer par les allocutions inaugurales. M. le ministre Younes Sekkouri a notamment souligné le rôle central du capital humain dans le développement des entreprises et des nations.
Quels sont les moments forts de cette édition ?
L’un des moments marquants a été l’annonce de la création de l’AGEF Sahara, qui sera notre sixième section régionale, dans les régions du Sud. Cette initiative s’inscrit dans les orientations nationales pour renforcer le modèle économique et le capital humain dans cette région stratégique. Un autre moment clé a été le passage de la présidence de l’Association africaine des formateurs du personnel (AFDIP) au Maroc. Souleymane Soro, président sortant, m’a désignée pour assumer cette responsabilité pour les deux prochaines années. C’est un honneur et une lourde responsabilité que je suis prête à relever. Nous avons également inauguré les stands d’exposition avec nos partenaires et sponsors, en présence de M. le ministre, du vice-président de la CGEM et du gouverneur d’El Jadida. C’était une occasion unique de découvrir les innovations des entreprises marocaines et d’observer leur évolution par rapport à l’année précédente. Par ailleurs, les discussions sur le contexte macroéconomique africain et les relations Sud-Sud ont suscité un grand intérêt. Cela montre l’engouement pour des sujets stratégiques qui vont au-delà de la simple gestion des ressources humaines.
Quels sont les projets prioritaires pour l’AGEF Sahara et l’AFDIP sous votre présidence ?
Pour l’AGEF Sahara, notre priorité est de renforcer le capital humain et de soutenir les entreprises dans leur montée en puissance dans les régions du Sud. Nous voulons accompagner le développement économique tout en tissant des relations solides avec les associations locales et internationales. En ce qui concerne l’AFDIP, nous travaillerons à valoriser les initiatives des Associations africaines membres. Beaucoup font un travail remarquable, mais il manque de visibilité. Nous allons donc renforcer la communication et élargir nos partenariats pour promouvoir le capital humain à l’échelle du continent.
Comment envisagez-vous la coopération internationale dans ce domaine ?
Nous voulons sortir des approches cloisonnées. L’idée est de collaborer avec toutes les associations de ressources humaines, qu’elles soient africaines ou internationales. Ensemble, nous pouvons avancer plus vite et plus efficacement. Nous avons déjà évoqué des projets communs avec la NDRH et d’autres partenaires. La coopération Sud-Sud reste une priorité, mais nous souhaitons également élargir notre réseau de partenariats à l’échelle mondiale. Pour clôturer, je tiens à remercier toutes les parties prenantes. Ensemble, nous oserons rêver et mettre en œuvre des actions concrètes pour faire avancer notre vision commune. Ces deux années à venir seront une opportunité de mettre en avant non seulement nos associations, mais aussi le Maroc, qui porte désormais la présidence de l’AFDIP. Je suis convaincue qu’ensemble, nous relèverons les défis qui nous attendent.