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La restructuration de l’AMDL et de la SNTL enclenchée !

Il était temps. Le sort de l’Agence marocaine de développement de la logistique et de la Société nationale des transports et de la logistique sera bientôt scellé. L’État enclenche, en effet, l’audit stratégique devant permettre un repositionnement de ces deux structures publiques. Plusieurs scénarios seront examinés par les experts du cabinet WB Consulting qui a remporté le marché d’audit. Le schéma de restructuration envisagé devrait aboutir soit à un regroupement/fusion de ces deux entités, soit au maintien de l’une et la liquidation de l’autre. Du côté du marché, des experts sont plutôt favorables à une privatisation de la SNTL et un renforcement des prérogatives régaliennes et des missions de l’AMDL. Ce qui est sûr, c’est que cette réforme est plus que jamais urgente, eu égard aux multiples dysfonctionnements dont souffre ce secteur stratégique de l’économie, notamment le retard des chantiers de la stratégie nationale logistique et l’absence de synergies entre les différentes parties prenantes.

L’État cherche, à travers l’audit stratégique lancé, à analyser les perspectives d'évolution future de l'AMDL et de la SNTL et leur définir un repositionnement stratégique en tenant compte des dysfonctionnements et des contraintes éventuelles qui pèsent sur leurs activités, de l'évolution de l'environnement et des objectifs de la stratégie nationale logistique.
L’État cherche, à travers l’audit stratégique lancé, à analyser les perspectives d'évolution future de l'AMDL et de la SNTL et leur définir un repositionnement stratégique en tenant compte des dysfonctionnements et des contraintes éventuelles qui pèsent sur leurs activités, de l'évolution de l'environnement et des objectifs de la stratégie nationale logistique.
L’Exécutif Akhannouch se penche enfin sur l’étude d’une opération stratégique dans le secteur des transports et de la logistique. Il vient de mandater le cabinet WB Consulting afin de mener l’audit stratégique de l’Agence marocaine de développement de la logistique (AMDL) et de la Société nationale des transports et de la logistique (SNTL). L’objectif étant de trouver un nouveau positionnement pour ces deux entités publiques et explorer la possibilité de nouvelles synergies. Concrètement, l’audit stratégique viendra mettre en exergue les interactions possibles entre ces deux entités, d’une part, et avec les autres opérateurs du secteur de la logistique, d’autre part, ainsi que les synergies à développer entre ces différentes structures en relation avec l’écosystème du transport et de la logistique. Les équipes de WB Consulting devront ainsi établir un diagnostic stratégique et évaluer la contribution des deux opérateurs dans le processus de mise en œuvre de la stratégie de l’État dans la logistique. Sur la base de ce diagnostic, le cabinet devra proposer un repositionnement stratégique des deux établissements publics.

Des scénarios d’évolution en concordance avec les orientations stratégiques de la loi-cadre n°50-21, les préconisations du nouveau modèle de développement (NMD) et la stratégie nationale de développement de la compétitivité la logistique seront déclinés avec la proposition d’une feuille de route pour la mise en œuvre du repositionnement stratégique retenu des deux entités. En clair, l’État cherche, à travers cet audit, à analyser les perspectives d’évolution future de l’AMDL et de la SNTL et leur définir un repositionnement stratégique en tenant compte des dysfonctionnements et des contraintes éventuelles qui pèsent sur leurs activités, de l’évolution de l’environnement et des objectifs de la stratégie nationale logistique. Dans son cahier de charges, le cabinet WB Consulting est appelé à examiner pour le compte de l’État plusieurs possibilités de scénarios. Soit la réintégration de certaines missions de ces deux établissements au ministère de tutelle et la liquidation/dissolution de l’entité dont le maintien n’est pas justifié, soit le regroupement des deux entités ou avec d’autres intervenants institutionnels dans le secteur de la logistique afin d’améliorer la performance et réduire les coûts.

Autre scénario à étudier, le regroupement d’une partie des activités de ces deux entités et/ou d’autres intervenants institutionnels dans le secteur de la logistique avec un repositionnement stratégique de l’entité dont le maintien est nécessaire et la liquidation/dissolution de la structure dont la mission n’est plus avérée. Des scénarios d’évolution sont également à prévoir afin de permettre l’accélération de la réalisation des programmes logistiques de l’État et l’optimisation de leur financement par la réduction du recours au budget général. Précision importante, les scénarios à proposer par le prestataire devraient s’aligner sur les objectifs fixés par la loi-cadre n°50-21 portant réforme des EEP, les orientations du NMD et celles de la stratégie nationale logistique.

Driss Herrati : la SNTL est à privatiser !

Pour Driss Herrati, expert en logistique, cette restructuration est une urgence au regard de la configuration actuelle du secteur. Aux yeux de l’expert, également patron de la plateforme spécialisée dans la formation logistique, Avenir Formations, le schéma de restructuration le plus efficace serait de privatiser la SNTL et renforcer davantage les prérogatives de l’AMDL en la transformant en une Autorité nationale chargée du transport et de la logistique. «Il est vrai qu’à l’époque où l’État avait créé la SNTL, le secteur du transport et de la logistique avait réellement besoin d’un opérateur public capable d’amorcer sa structuration et accélérer sa modernisation. Mais aujourd’hui, le secteur arrive à maturité avec la présence d’opérateurs privés nationaux et étrangers bien structurés et disposant de systèmes de gestion plus efficaces sur le plan opérationnel. La SNTL fausse donc le jeu d’une libre concurrence dans le secteur. L’État doit se contenter de sa fonction régalienne dans ce secteur à travers une autorité gouvernementale dédiée dotée de pouvoirs et surtout d’un budget à la hauteur de ses missions et prérogatives», explique l’expert. Selon lui, une Autorité de régulation du secteur, dotée de pleins pouvoirs et armée des budgets nécessaires, aura la vertu d’accélérer les chantiers et programmes planifiés dans la stratégie nationale logistique, dont la réalisation est aujourd’hui au quasi point mort. Herrati cite ainsi l’exemple des plateformes logistiques régionales dont le processus d’aménagement est très lent et le transport des matières dangereuses qui souffre encore d’un vide juridique. Si le département des Finances enclenche le chantier de restructuration de la SNTL et l’AMDL c’est que la loi-cadre portant réforme des EEP stipule l’identification et la mise en œuvre d’opérations de de ce genre dans l’objectif d’une redéfinition substantielle et équilibrée du secteur public, le rehaussement de l’efficience économique et sociale de l’action des EEP et la réduction de l’appel au Budget général de l’État.

Les principales finalités de ces opérations de restructuration et de réforme concernent ainsi le regroupement et la fusion des EEP pour accroître l’efficience, renforcer les capacités et surtout permettre l’émergence de grands pôles pouvant réussir le portage des grands chantiers lancés dans le cadre des politiques publiques. Les réformes envisagées cherchent également à assurer un rapprochement et une complémentarité entre les EEP exerçant des missions similaires, proches ou complémentaires, et ce dans l’objectif de valoriser les synergies, de hisser l’efficience, de réduire les coûts et d’améliorer la qualité de service. La loi sur la réforme des EEP préconise également l’accélération de la liquidation des EEP dont les missions ne sont plus d’actualité ou se caractérisent par un déficit chronique.

NMD : la restructuration du secteur est nécessaire

D’un autre côté, le NMD recommande de faire des EEP un moteur de développement économique et d’amélioration de la compétitivité structurelle, une locomotive pour le secteur privé à travers la structuration d’écosystèmes compétitifs dans les secteurs stratégiques et des acteurs engagés dans le développement territorial, responsabilisés sur leur impact social et environnemental. Dans ce cadre, les EEP sont invités à consolider leur autonomie financière en renforçant leurs performances et en réduisant l’appel au budget général et aux garanties de l’État. Dans la logistique en particulier, le NMD recommande de réduire les coûts logistiques et améliorer la qualité des services par la restructuration du secteur.

En fait, l’ambition économique du NMD est de faire de l’économie marocaine un hub multisectoriel ancré dans les chaînes de valeur internationales. Pour les experts du NMD, la réalisation de cet objectif est largement tributaire de la capacité à moderniser et à structurer le secteur de la logistique pour améliorer sa performance et réduire ses coûts. Ainsi, la réforme proposée cible les principaux dysfonctionnements qui pénalisent la compétitivité logistique. Dans ses recommandations, le NMD appelle à l’établissement d’une nouvelle gouvernance permettant une coordination accrue des acteurs publics pour favoriser la multimodalité, à travers la mise en place d’un pôle étatique qui pourrait prendre la forme d’une holding ou d’un groupement d’intérêt économique pour piloter l’ensemble de l’activité logistique et le renforcement de l’AMDL. Il suggère, par ailleurs, la structuration des flux logistiques autour de zones logistiques connectées par de grands corridors, pleinement intégrés aux centres de production et au commerce international. Le tout assorti de la consolidation et la structuration des acteurs en encourageant l’agrégation des petits opérateurs et l’émergence d’acteurs d’envergure internationale, y compris dans les services d’entreposage, transport et livraison de bout en bout nécessaires au développement du e-commerce. Sans oublier l’extension territoriale du transport ferroviaire pour en faire l’épine dorsale de la multimodalité en poursuivant la modernisation et l’ouverture de la filière. S’agissant des infrastructures logistiques, le NMD juge nécessaire le développement de zones d’activité de qualité et à prix compétitifs accessibles à toutes les entreprises.

En effet, pour encourager le dynamisme du secteur privé, toutes les entreprises doivent pouvoir accéder à une infrastructure d’accueil à des prix compétitifs et être dotées de services adéquats. Le NMD propose ainsi de mettre en place un cadre normatif des infrastructures d’accueil pour une offre de zones d’activité industrielles et de services répondant aux besoins des entreprises (en termes de services, de gestion, de connectivité, etc.). La réalisation et la gestion de ces infrastructures s’appuieraient sur le partenariat public-privé et la généralisation du modèle de gestion de certaines zones (telles que Tanger Free Zone, Kenitra automotive city, etc.). Dans ce cadre, le rôle du secteur public, en particulier des régions, consisterait à identifier les besoins selon une approche tirée par la demande économique et non par l’opportunité foncière, à mettre à disposition un foncier de qualité, à assurer la connectivité et à appuyer, si nécessaire, l’infrastructure hors site et le prix de sortie. L’aménagement et la gestion seraient assurés par des opérateurs privés sélectionnés selon une procédure ouverte d’appel à projets et sur la base d’un cahier des charges exigeant une qualité de service élevée au sein des zones. Comme dans les ex-zones franches, l’ensemble des autorisations serait délivré par un guichet unique confié au gestionnaire de la zone.

Stratégie logistique : les raisons du retard criant des chantiers selon la Cour des comptes

La stratégie nationale de développement de la logistique avait déjà fait l’objet d’une mission d’évaluation par la Cour des comptes en 2020. Ses conclusions font l’état d’un bilan mitigé. Dans son rapport, la juridiction financière du Royaume relève que cette feuille de route qui couvre la période 2010-2030 ambitionnait de mettre à niveau le secteur logistique. C’est à ce titre que l’AMDL avait été créée depuis 2011, mais n’est devenue opérationnelle qu’en 2014. Selon les juges de la Cour, cette agence, censée effectuer un suivi annuel des actions découlant de la stratégie, n’a établi le premier bilan des réalisations qu’en 2019. Soit 9 ans après son lancement. Ce bilan a révélé un taux de déploiement de la feuille de route limité à 14%. En outre, l’indicateur du coût logistique intégral par rapport au PIB, estimé à 20% en 2010, s’est situé à 19,6% en 2018 contre un objectif de 15% en 2015, alors que la valeur ajoutée directe de la logistique s’est établie à 2,63% du PIB en 2018 contre un objectif de 5,4% en 2015. Par ailleurs, le cadre de gouvernance globale demeure marqué par le faible positionnement institutionnel de l’AMDL qui peine à fédérer l’ensemble des acteurs intervenant dans le secteur. Il a été relevé également l’absence d’un cadre légal et réglementaire orientant l’exercice des activités logistiques, l’aménagement des locaux de stockage et leur exploitation ainsi que l’orientation des activités logistiques vers des zones spécifiques.

En ce qui concerne le développement des plateformes logistiques et la massification des flux, les réalisations prévues par la Stratégie demeurent fortement réduites, selon la Cour. En effet, seule la zone logistique de la SNTL à Zenata, d’une superficie de 28 ha, a été développée dans le cadre de la SNDCL. D’autres zones logistiques existent au niveau national, mais leur développement n’a pas été effectué dans le cadre de la Stratégie, dont

la zone Med-hub développée par TMSA ou la zone MITA développée par l’ONCF. Quant aux synergies entre les acteurs intervenant dans le développement des zones logistiques, la Cour des comptes constate une coordination «insuffisante» entre l’AMDL, TMSA, l’ONCF, l’Agence nationale des ports (ANP), la SNTL, le ministère de l’Agriculture pour la mise en place des agropoles et le ministère de l’Industrie pour le développement des plateformes industrielles intégrées.

Par ailleurs, le modèle de développement et de gestion des plateformes logistiques n’est toujours pas clairement établi, en l’absence de définition de la structure des responsabilités et des rôles des différents intervenants. Résultat des courses, un blocage de la mobilisation des fonds et la concrétisation des projets prévus. Ce n’est qu’en 2021 que le conseil d’administration de l’AMDL a autorisé la création d’une filiale. Celle-ci a été chargée du développement et de la gestion de la zone logistique d’Aït Melloul dont la commercialisation est toujours dans le pipe. En outre, un retard notoire a été constaté dans la mise en place, dans certaines régions, de zones multimodales de massification et de réorganisation des flux de marchandises qui ont été planifiées dans les différents schémas directeurs régionaux des zones logistiques. Par ailleurs, le développement de l’intermodalité ferroviaire-maritime demeure un chantier peu exploré, alors qu’il représente une des composantes essentielles du mix modal de l’ensemble des flux d’import/export. La Cour rappelle que la prestation de logistique et de transport routier de marchandises a représenté un marché estimé à 26,5 milliards de dirhams avec des investissements de 8,25 milliards et 445.000 emplois en 2018.
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