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L'année 2025 sera celle de la relance économique (Salim Rais- CFG Bank)

Relance économique attendue dès 2025, grands chantiers d’infrastructures en cours, organisation de la Coupe du monde de football en 2030… Les cinq prochaines années seront chargées pour le Maroc. Et les banques ont un rôle important à jouer pour accompagner la croissance économique qui en découlera. Salim Rais, associé & directeur exécutif Finances groupe chez CFG Bank, a été l’invité de l’émission «L’Info en Face». Il a, à ce titre, partagé son point de vue sur ce que peut apporter le secteur bancaire à l’économie marocaine à l’aube d’autant de chantiers d’envergure.

Le financement bancaire peut-il libérer la croissance économique ? C’est la question centrale du dernier numéro de l’émission «L’Info en Face» de «Groupe Le Matin». Salim Rais, associé & directeur exécutif Finances groupe chez CFG Bank, y répond en rappelant que le financement bancaire n’est qu’un facteur parmi d’autres qui contribuent à la croissance économique du pays.



Les différentes anticipations de croissance économique au Maroc pour l’année 2024 sont essentiellement liées à la valeur ajoutée agricole et dépendent, donc, forcément de la pluviométrie. Il y a évidemment une autre composante de la croissance : «la valeur ajoutée non agricole que peut accompagner le secteur bancaire pour participer à la libération de la croissance», explique Salim Rais qui prévoit que la croissance sera plus importante que celle de 2023 : «elle était autour de 2,7% en2023, impactée, entre autres, par le bon rendement de la compagne céréalière 2022-2023 (55,1 millions de quintaux). Elle a aussi été marquée par la poursuite du renchérissement du coût de financement (hausse du taux directeur) et le ralentissement de la demande intérieure en raison d’une hausse des prix des produits de base et des matières premières. Pour 2024, la croissance devrait se situer autour de 3,2% selon Bank Al-Maghrib et dépendra essentiellement de la campagne agricole : une production céréalière aux alentours de 70 millions de quintaux. C’est le principal vecteur de cette croissance», partage-t-il.

Secteur bancaire et inflation : quel lien ?

Par ailleurs, estime notre invité, il existe un lien entre l’inflation et le comportement des différents acteurs qui ont recours au crédit bancaire : «En période de forte inflation, les prix des matières premières ont augmenté et les entreprises ont eu plus recours aux facilités de trésoreries car leurs BFR (besoins en fonds de roulement) a été impacté. En revanche, lors d’un mouvement baissier de l’inflation, les entreprises ont un BFR un peu plus aéré et font donc moins appel aux facilités de trésorerie. Le comportement du secteur bancaire dépend, quelque part aussi, de cette inflation». Concernant les particuliers, le crédit à l’habitat – principale composante du crédit aux ménages – la croissance n’est que 2% en 2023, à 244 milliards de DH. Une faible croissance liée principalement à la hausse des taux d’intérêt : «de 4,32% en moyenne au 4e trimestre 2022 à 4,83% un an plus tard», rappelle Salim Rais. D’ailleurs, souligne-t-il, si le taux directeur a augmenté de 100 points de base, les taux de crédit à l’habitat et de crédit à l’équipement n’ont pris que 50 points de base chacun. «Le plus gros de la hausse a été impacté par les crédits de trésorerie, le plus demandé par les entreprises, même s’il n’est pas le principal vecteur de financement d’une entreprise», souligne notre spécialiste.

Qu’en est-il du crédit à l’investissement ? Ce type de crédit a été moins sollicité en 2023. En effet, l’encours global des crédits est de 1.115 milliards de DH, en hausse de 5,2% sur un an. «Le plus gros de la variation provient des entreprises financières, mais qui ne constituent que 180 milliards sur les 1.115 milliards de l’encours global, l’autre partie a été drainée par les entreprises, principalement tirée par le secteur public (+27%, +16 milliards de DH), avec un encours de 75 milliards. Cette croissance est essentiellement tirée par les crédits de trésorerie (+51%)», détaille l’invité de l’émission. Les crédits à l’équipement, eux, n’ont progressé que de 5%. Pour sa part, l’encours des crédits aux entreprises privées hors financières est de 444 milliards de DH, en stagnation par rapport à 2022. Le crédit à l’équipement accordé au secteur privé, lui, a progressé de 7%, souligne l’invité de l’émission tandis que les crédits à la trésorerie ont baissé de 9%.

La nouvelle loi sur les délais de paiement est-elle derrière cette baisse du besoin des entreprises en matière de crédits à la trésorerie ? «Je pense que nous ne verrons l’effet de cette nouvelle loi que dans quelques années, une fois que les différentes ranches du tissu entrepreneurial et industriel seront concernées par cette loi», estime Salim Rais qui assure cependant que cette loi va aider certainement à alléger les trésoreries des entreprises. «Car elles vont se structurer en amont pour être à jour dans leurs paiements», explique-t-il.

Il faut améliorer l'accès au financement pour les TPME

Notre expert estime, par ailleurs, que si le secteur bancaire met en place des produits spécifiques pour accompagner ces entreprises, cela serait d’une grande aide. Comment alors ces entreprises, les TPE en particulier, auraient-elles accès à ces produits sachant que la problématique d’accès au financement persiste ? À cela, Salim Rais répond que la proportion des TPME dans les crédits aux entreprises a significativement augmenté : de 20% il y a 10 ans à 40% actuellement. «Dans l’absolu, c’est une population risquée parce qu’elle est peu ou pas structurée. Avec des mécanismes spécifiques à mettre en place, des garanties à travers notamment Tamwilcom et un fort engagement de la part des banques, nous pouvons aller de l’avant», préconise l’invité de «L’Info en Face». De tels produits faciliteraient l’accès au financement des petites entreprises tout en réduisant les risques de défauts de paiement. Les créances en souffrance, tous bénéficiaires de crédits confondus, affichent d’ailleurs un rythme de croissance similaire à celui des crédits (aux alentours de 5%), souligne Salim Rais. Et de rappeler que «le métier de banquier est étroitement lié au risque. Le taux de sinistralité est plus ou moins stable, autour de 8,5%.
Par ailleurs, nous avons la chance d’avoir une banque centrale dont la politique monétaire est bonne et qui suit de près les banques». Cette Banque centrale injecte, par ailleurs, de manière hebdomadaire, plusieurs milliards de DH dans le circuit bancaire alors que, de l’autre côté, il y a une importante quantité de cash en circulation, dont près de 400 milliards de DH issus de l’informel, soit un tiers du PIB. La véritable question à se poser alors, selon notre invité, est «pourquoi ce cash est-il en circulation ?» Et de reconnaître qu’il y a forcément un lien entre l’informel et le financement bancaire. «Je ne vois cependant pas comment une banque peut participer à la réduction de l’informel. S’il est à ce niveau, c’est plutôt pour des raisons fiscales. La hausse des taux n’est pas non plus un facteur d’aggravation de ce phénomène. Au contraire, elle implique également une hausse des taux d’intérêt sur les dépôts et doit, théoriquement, exercer plus d’attractivité sur le cash en circulation en dehors du circuit bancaire», explique-t-il.
Quoi qu’il en soit, l’invité de l’émission est convaincu que 2024 sera une année de croissance. «Elle ne sera pas cependant celle de la relance, mais 2025 au cours de laquelle nous accueillons la CAN 2025. Un véritable challenge aussi pour 2030 lors de l’organisation de la Coupe du monde de football, que ce soit sur les crédits ou les taux. Car les programmes d’investissement et les programmes d’infrastructures, il faut les financer», nuance-t-il. Routes, tourisme, santé... autant de secteurs qui vont en bénéficier. Et le secteur bancaire va être un levier important pour financer cette croissance. «Car il ne peut pas y avoir de développement économique sans développement du financement. Nous sommes un pays qui a plus recours à la dette qu’aux fonds propres. Donc, cette dynamique d’investissement importante, tirée par l’infrastructure, qui va elle aussi tirer le tissu de PME-TPE, passera inévitablement par le secteur bancaire», analyse Salim Rais.
À ce propos, l’invité de l’émission estime que la Banque centrale maintiendra à 3% son taux directeur à l’issue de la Réunion du Conseil de Bank Al-Maghrib, programmé en mars prochain. Il est également convaincu que la politique adoptée par la Banque centrale «sera sûrement un peu plus accommodante au cours des prochains trimestres, avec une baisse du taux directeur».
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