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Redouane El Haloui : Je rêve que le Maroc devienne la Suisse de la data

Interlocuteur privilégié du secteur des IT (technologies de l’information) auprès des pouvoirs publics, l’APEBI a, depuis sa création, plaidé pour un Maroc numérique, compétitif et qui compte sur l’échiquier continental et international. Ayant participé à l’élaboration de la Stratégie digitale du Royaume depuis ses prémisses, Redouane El Haloui, président de la Fédération, dresse un bilan d’étape dans cet entretien accordé au journal «Le Matin».

Redouane El Haloui
Redouane El Haloui
Le Matin : Comment évaluez-vous la souveraineté digitale du Maroc à l’heure actuelle ?

Redouane El Haloui :
Tout d’abord, je voudrais souligner qu’il y a une prise de conscience, depuis plusieurs années, de la mise en place de cette souveraineté. Nous disposons de la Commission nationale pour le développement numérique, et donc d’une sensibilité certaine à l’égard de l’utilisation de nos données. Si nous parlons de souveraineté, nous devons aussi nous poser la question sur l’installation et le stockage de nos données. Nous avons conscience qu’il nous faut des Datacenters. Il y a des initiatives et une volonté politique en ce sens : développer ces Datacenters pour que nous puissions être de moins en moins dépendants de l’étranger, surtout quand il s’agit de données sensibles. Quand nous parlons de volonté de développer l’E-gov, nous devons forcément disposer d’un Cloud souverain. En termes de gouvernance, hormis la Commission nationale pour le développement du numérique, nous avons aussi la Direction générale de la sécurité des systèmes d’information (DGSSI) qui est orientée sur la Sécurité nationale. Il y a donc un travail important qui est mené à ce niveau. Donc je dirais que le Maroc a fait beaucoup d’efforts depuis plusieurs années et continue d’en faire, notamment pour avoir une souveraineté numérique digne des Européens ou des Américains. Je dirais même à ce sujet que nous ne nous comparons plus aux pays voisins, mais plutôt aux exigences internationales.



La notion de souveraineté veut dire mettre en place des stratégies, des outils et une gouvernance. Sans cela, nous ne pouvons pas parler de souveraineté. Aujourd’hui en termes d’outils, et quand nous parlons de Datacenters, nous n’avons pas encore atteint une maturité suffisante, mais nous sommes en chemin. L’APEBI a participé à la Stratégie Maroc Digital 2030 et nous avons vu et constaté toutes les initiatives et tous les efforts qui sont déployés pour attirer les investissements. Des partenariats ont déjà été établis, notamment avec de grands groupes américains comme Oracle, et d’autres sont à venir. Pour en revenir aux Datacenters, nous sommes bien évidemment heureux qu’il y ait cette véritable prise de conscience. Personnellement, je rêve que le Maroc devienne la Suisse de la donnée, et avoir ainsi suffisamment de Datacenters et de réglementations qui protègent les données et qui feront que nos frères des pays africains choisiront la destination Maroc facilement parce que nous avons les moyens, les outils et la réglementation nécessaires pour stocker la Data et aujourd’hui, je pense que nous pouvons le faire.

Quelles sont à ce jour les conditions premières pour mener à bien la Stratégie Maroc 2030 ?

Nous sommes tous d’accord pour dire que la Stratégie Maroc Digital 2030 n’est pas figée dans le temps, car le secteur évolue beaucoup. L’intelligence artificielle (IA) existe depuis plusieurs dizaines d’années et ce n’est que dernièrement que le public a découvert ses capacités. Arrivée dans le domaine public, nous voyons que l’IA est en train de bousculer les métiers, ce qui ne veut pas dire que ces métiers vont disparaître. Par contre, nous parlons aujourd’hui de métiers augmentés. Cela veut dire qu’il est important d’être agile au niveau de la formation parce que le digital nécessite des ressources numériques formées dans ce domaine. Il faut donc faire preuve d’une certaine agilité vis-à-vis des métiers qui sont en train d’apparaître. Ce volet dédié aux compétences existe dans la stratégie digitale, et il y a urgence. Ceci suppose une collaboration étroite entre les professionnels et les acteurs de la formation.

Ensuite, je souhaite aborder le point de la connectivité. Avec des événements d’envergure comme la Coupe d’Afrique des Nations 2025 ou la Coupe du monde 2030, nous devons avoir une connectivité qui soit du niveau des pays occidentaux. Être les premiers en Afrique n’est pas suffisant. Nous devons nous comparer à minima aux pays de l’Europe de l’Est ou à la Russie ou aux États-Unis. Il est aussi important que les foyers puissent disposer de la fibre optique et que la bande passante ne soit pas limitée à 100 mégas ou autre. Il faut beaucoup plus. C’est important parce que les outils que nous utilisons, comme la visioconférence par exemple grâce à laquelle nous pouvons mener cet entretien, ne peuvent pas bien fonctionner sans une bonne connectivité. Ces outils nous font gagner en productivité. Il est donc important que le réseau évolue. Beaucoup d’efforts ont été entrepris par les opérateurs télécoms et l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT). La stratégie digitale a également mis en lumière ce volet-là pour augmenter notre capacité en termes de connexion : la fibre optique et la 5G, sans oublier les zones reculées. L’APEBI a récemment mis en place l’initiative «Smart Douar» juste après le séisme d’Al Haouz. Nous avons apporté la connexion internet par satellite au niveau des douars touchés et nous nous sommes rendus compte à quel point l’enclavement numérique est important et à quel point il faut inverser cette tendance. On ne peut réfléchir à mettre en place l’E-gov sans penser à ceux qui en ont le plus besoin, au même titre que la télémédecine. Encore une fois, la stratégie digitale inclut ce volet-là, à savoir l’inclusion numérique, qui concerne et touche directement 30% de la population marocaine vivant en zone rurale. Grâce à Smart Douar, la connectivité concerne désormais 40 villages et est en cours de déploiement dans 50 autres, donc 90 villages qui seront connectés d’ici fin juin. L’objectif se résume en un mot : l’inclusion, à laquelle nous ajoutons la mise en place d’opportunités économiques pour cette frange de la société.

Quel rôle joue, aujourd’hui, l’APEBI dans la réalisation des objectifs numériques du Maroc ?

Cela fait 35 ans que l’APEBI existe. Elle a toujours eu un rôle précurseur. À titre d’exemple, l’initiative du Technopark émane de l’APEBI. Nous sommes administrateurs de l’ensemble des Technoparks du Maroc. L’APEBI a aussi été l’initiative de l’offshoring. Il est donc important de voir ce que cette fédération a mis en place en 35 ans. Ce sont des actions qui ont façonné le paysage numérique que nous connaissons aujourd’hui dans notre pays. Nous sommes bien entendu un interlocuteur privilégié de l’État, notamment pour les remontées du terrain. Quand il a fallu mettre en place cette Stratégie Maroc Digital 2030, nous avons été inclus dès le départ dans les ateliers de travail avec le ministère de tutelle. Aujourd’hui, la Fédération doit s’assurer que le Maroc dispose de compétences numériques nécessaires et ainsi apporter son expertise des métiers dont le Maroc a besoin, et réduire ainsi le gap entre l’offre et la demande.

Nous représentons par ailleurs les intérêts de nos membres que sont les opérateurs télécoms, les multinationales du secteur de l’offshoring ou encore les PME Tech marocaines ainsi que les startups. Nous travaillons avec les pouvoirs publics de sorte à améliorer le cadre réglementaire pour notre secteur. Les acteurs font bouger les lignes. Nous voyons arriver sur le terrain des innovations qui bousculent et il est important de travailler de manière agile avec les pouvoirs publics sur ce volet-là.

Sur la partie Développement du secteur et chiffre d’affaires, l’APEBI, avec l’initiative de l’offshoring, c’est 130.000 personnes et nous avons comme entre autres missions de développer encore plus ce secteur et promouvoir les produits et services 100% marocains pour qu’ils puissent créer de l’emploi. La Fédération a pour objectif d’accompagner ses membres vers l’export. Elle est à l’initiative de la création d’un réseau international au niveau de l’Afrique pour favoriser l’export et le développement du continent.
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