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Un plan à 850 millions de dollars pour transformer l’agriculture marocaine face aux crises climatiques

Avec un appui imminent de 200 millions de dollars de la Banque mondiale, un nouveau programme de transformation des systèmes agroalimentaires sera lancé par le gouvernement pour un budget total de 850 millions de dollars. Il vise à renforcer la résilience des zones agricoles pluviales, moderniser l’assurance agricole et garantir la sécurité alimentaire face au changement climatique.

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La Banque mondiale doit approuver ce 19 décembre 2024 un prêt de 200 millions de dollars destiné à cofinancer un programme gouvernemental de Transformation des systèmes agroalimentaires au Maroc. Ce financement sera accordé via l’instrument «Prêt pour les résultats», qui conditionne les décaissements à l’atteinte des objectifs définis dans le projet. Comme nous l’annoncions en exclusivité en septembre dernier, alors que les négociations autour de ce prêt étaient à un stade avancé, ce nouveau programme vise à accroître la résilience des systèmes agroalimentaires au changement climatique et leurs capacités à fournir des chaînes de valeur alimentaires efficaces, durables et sûres. Le financement total nécessaire pour sa mise en œuvre s'élève à 850 millions de dollars.

Contexte du Programme

Après une forte croissance sur la période 2008-18, avec notamment un doublement du PIB agricole, le secteur agroalimentaire marocain est affecté, depuis plusieurs années, par les impacts cumulés de multiples chocs. Il s’agit notamment des chocs climatiques (pénurie croissante d’eau, hausse des températures et sécheresse) et des chocs commerciaux liés à la perturbation des chaînes de valeur mondiales provoquée par la pandémie de Covid-19 et la guerre Ukraine-Russie. Une série d’années de faibles précipitations, entre 2018 et 2023 (sauf 2020-21), a conduit à un rationnement de l’approvisionnement en eau d’irrigation et à de forts impacts sur l’agriculture pluviale et l’élevage. La réduction de la production agricole et animale a modifié la balance commerciale du secteur et la couverture des besoins alimentaires intérieurs.

Par exemple, le Maroc a dû reprendre ses importations de lait et de viande alors même qu'il était autosuffisant jusqu'en 2020. De même, le pays a dû couvrir 57% de ses besoins de consommation intérieure de céréales par les importations au cours des trois dernières années, une augmentation par rapport à la période 2010-18 alors que seulement 45% étaient importés.

Les chocs climatiques se sont combinés à une forte augmentation des coûts de production, générée par la perturbation des chaînes de valeur mondiales. L’augmentation des coûts de production a particulièrement touché les intrants (engrais, semences, carburant, etc.), alimentant ainsi une inflation des produits alimentaires d’environ 15% par an. «Ces perturbations climatiques et de marché nécessitent une transformation profonde et rapide des systèmes agroalimentaires marocains», est-il souligné dans un document officiel lié au prêt.

Les systèmes agroalimentaires doivent accélérer leur transformation

Les systèmes agroalimentaires marocains doivent ainsi accélérer leur transformation pour produire plus et mieux, avec moins de ressources naturelles et la maîtrise des émissions de gaz à effet de serre (GES).

Cette transformation des systèmes agroalimentaires -pour devenir plus efficaces, inclusifs et durables- appelle des actions urgentes et audacieuses visant à accroître les biens publics et à réorienter le soutien public au secteur.

Le lancement de la Stratégie «Génération Green» 2020-2030 représente un changement majeur et arrive à un moment très opportun pour répondre aux crises multiples. Alors que les investissements publics ont été principalement consacrés à l’agriculture irriguée, une plus grande attention est désormais accordée à l’agriculture pluviale. Si les zones irriguées contribuent en moyenne à plus de la moitié de la valeur ajoutée agricole totale, l'agriculture pluviale (Bour) représente toujours 80% de la superficie cultivée du pays. Elle emploie la plus grande partie de la main d'œuvre agricole et est essentielle à la sécurité alimentaire du pays.

Cependant, la mise en œuvre de cette nouvelle stratégie nécessite une augmentation annuelle du budget du secteur de près de 2,5%. Conformément à l’agenda stratégique de «Génération Green», le nouveau programme financé par la Banque mondiale renforcera la transformation du système alimentaire et soutiendra la capacité du secteur à nourrir une population croissante dans un contexte de changement climatique tout en améliorant les résultats environnementaux, sociaux et sanitaires.

Le programme comprend deux domaines de résultats. Le premier vise l’amélioration de la résilience et de la gestion des risques climatiques en agriculture pluviale. Il comprend un appui à la transition des zones en céréaliculture pluviale vers l’agriculture de conservation ainsi que la réforme du système de l'assurance agricole.

Dans ce cadre, un soutien accru sera dédié à cette transition. Ce soutien inclut des subventions pour des équipements agricoles comme les semoirs directs et des incitations financières pour l’adoption de semences résilientes au climat, notamment les légumineuses. Ces actions visent à renforcer la productivité dans des conditions climatiques difficiles tout en maîtrisant les émissions de gaz à effet de serre. Une réforme majeure sera également mise en œuvre pour adapter l’assurance agricole aux défis du changement climatique. Le Programme de résilience et adaptation au climat (PRAC) remplacera l’assurance actuelle et ciblera les zones les plus défavorisées. Ce nouveau système comprendra aussi un produit modernisé MRC (Multi-Risque Climat), mieux adapté aux risques climatiques, et une prime d’assurance bonifiée pour encourager les agriculteurs à adopter des pratiques durables telles que le semis direct. Ces mesures visent à stabiliser les revenus des agriculteurs, réduire leur vulnérabilité face aux aléas climatiques et limiter la pression sur les finances publiques.

Le second domaine de résultats a, lui, pour objectif de renforcer la sécurité alimentaire, la qualité des aliments et la sécurité nutritionnelle.

Pour le gouvernement, la promotion d’une transition vers l’agriculture de conservation augmentera les rendements dans des conditions plus sèches rendues plus probables par le changement climatique tout en réduisant simultanément les émissions de gaz à effet de serre. De même, la réforme du système d’assurance agricole stabilisera les revenus de la production agricole et réduira la pression sur les ressources publiques rares.

Par ailleurs, l’investissement dans l’amélioration de la sécurité alimentaire et nutritionnelle contribuera à la croissance économique et à la formation de capital humain tout en diminuant le fardeau de la malnutrition sur le système de santé publique.

De plus, les interventions visant à réduire les pertes alimentaires et à étendre le recyclage des déchets agricoles ainsi qu’à développer l’agriculture biologique augmenteront les revenus des agriculteurs et minimiseront les externalités environnementales et climatiques du secteur.

À noter qu’un appui technique complète ce programme. Dans ce cadre, un accord d'assistance technique sera signé entre le ministère de l’Agriculture et la FAO pour renforcer les capacités dans certains aspects clés de la transformation des systèmes agroalimentaires.
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