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Le colonel Kadhafi à Paris pour une visite controversée

Longtemps accusé de soutenir le terrorisme, le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi est attendu lundi à Paris pour une visite aux forts accents de retour en grâce diplomatique, qui suscite doutes et critiques.

Le colonel Kadhafi à Paris pour une visite controversée
Nicolas Sarkozy en compagnie de Mouammar Kadhafi. (Photos : www.interet-general.info)
Simple prudence ou signe d'un vrai embarras politique, les autorités françaises n'ont officiellement confirmé que vendredi l'arrivée en France du guide de la Grande Jamahiriya arabe libyenne pour une visite de cinq jours.

"Le colonel Kadhafi se rendra en visite à Paris du 10 au 15 décembre", a annoncé le porte-parole de l'Elysée David Martinon, évoquant "une étape significative dans le retour progressif de la Libye au sein de la communauté internationale".

Pour Paris, le colonel libyen a regagné ses galons de respectabilité en renonçant à son programme d'armes de destruction massive, en tournant le dos au terrorisme et en libérant l'été dernier les infirmières bulgares retenues dans ses geôles.

Mais les déclarations faites vendredi à Lisbonne par le colonel Kadhafi ne devraient pas apaiser les esprits. Il a réclamé "des compensations pour la période coloniale", la France pouvant se sentir directement visée, et justifié le fait que des "faibles" aient "recours au terrorisme".

Bien avant la France, d'autres pays occidentaux ont normalisé leurs relations avec Tripoli, relève-t-on à Paris en précisant que le rapprochement franco-libyen a été mis sur les rails dès la visite en Libye il y a trois ans du président français Jacques Chirac, une fois réglée l'indemnisation des victimes de l'attentat contre le DC10 de la compagnie française UTA en 1989.

Pourtant, la politesse rendue par Nicolas Sarkozy à Mouammar Kadhafi après son déplacement en Libye en juillet est loin de faire l'unanimité.

"On n'invite pas en visite d'Etat un grand terroriste", s'est offusqué vendredi le philosophe Bernard-Henri Lévy. "C'est indigne", a jugé le dirigeant centriste François Bayrou. "Très choquant", avait réagi la socialiste Ségolène Royal, candidate malheureuse à l'élection présidentielle.

Le mois dernier, M. Sarkozy avait justifié par avance sa position en assurant ne pas voir "de raison de ne pas recevoir Kadhafi". "Si on ne le reçoit pas, si on ne parle pas avec des pays qui se respectabilisent, alors qu'est-ce qu'on dira à l'Iran et la Corée du Nord".

Mais bien des doutes persistent sur les ressorts du rabibochage franco-libyen, alimentés par les accords de coopération, notamment en matière de défense et de nucléaire civil, et les contrats d'armement signés par Paris dans la foulée de la libération des infirmières bulgares par Tripoli.

Devant une commission d'enquête de l'Assemblée nationale, le conseiller diplomatique du président, Jean-David Lévitte, a nié tout lien entre ces accords et l'élargissement des soignants.

Mais ces dénégations ont été contredites jeudi par l'ex-représentant à Tripoli de la Commission européenne, Marc Pierini, qui a assuré devant les mêmes députés que les discussions entre Paris et Tripoli sur le nucléaire et les armes avaient constitué "l'élément décisif" pour la libération des soignants bulgares.

Et la liste de contrats "espérés" par la France lors du séjour parisien du colonel Kadhafi ne devrait pas calmer ces soupçons.

Dans un entretien diffusé par le site internet du Figaro, le fils du dirigeant libyen, Seïf El-Islam Kadhafi, a affirmé que plusieurs contrats seraient signés, dont l'achat "pour plus de 3 milliards d'euros d'Airbus" et d'"un réacteur nucléaire". "Nous négocions sur les Rafale", avions de combat français jamais exportés à ce jour, a-t-il ajouté.

Le "guide" libyen s'entretiendra deux fois avec Nicolas Sarkozy, qui le recevra à dîner, mais n'aura pas droit au décorum d'une visite d'Etat. Cela ne l'empêchera pas de recevoir ses invités dans sa légendaire tente, installée à l'hôtel Marigny, résidence des invités du Président à côté de l'Elysée.
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