Grand penseur du XIXe siècle, Nietzsche repose près des siens sous une dalle de granit et de marbre rose au pied d'une église du Moyen-Age, dans une commune des confins de la Saxe et de la Saxe-Anhalt où les poules gambadent en liberté.
Mais pour combien de temps ? Riche en lignite, la région est l'objet d'un vaste projet de mines à ciel ouvert, destiné à alimenter des centrales dans une Allemagne qui a tourné le dos à l'énergie nucléaire.
Non loin de Röcken, les bulldozers de la Mibrag, société minière aux mains d'investisseurs américains, ont déjà créé des paysages lunaires. L'église de Heuersdorf vieille de 750 ans a déménagé en octobre parce qu'elle gênait les travaux d'extraction, laissant derrière elle des villageois contraints de plier bagage après avoir épuisé les recours judiciaires.
Röcken pourrait connaître un jour le même sort si les sondages en cours dans son sous-sol sont jugés concluants. "Une vingtaine de paramètres sont pris en compte", explique Elke Hagenau, porte-parole de la Mibrag. Les premiers résultats sont attendus cet été.
Le village de Nietzsche veut croire que la lignite est trop salée et trop chargée d'eau, raison pour laquelle la RDA avait renoncé à l'exploiter.
En attendant, Röcken s'appuie sur son illustre fils pour interpeller l'opinion. "Nietzsche est notre seul gage", estime Dorothee Berthold, co-responsable de l'association créée pour sauver la commune et ses hameaux, un objectif soutenu par deux-tiers des habitants.
L'ancrage des familles de Röcken remonte souvent à plusieurs générations. "Toute notre vie est ici", résume Heidrun Kaiser, 54 ans, qui habite avec son mari Hartmut la maison où celui-ci a grandi.
La Mibrag dit comprendre "que personne n'ait envie d'abandonner son chez-soi". "Mais l'horizon éventuel est 2025: si l'on décidait de creuser, il faudrait 15 ans pour avoir les autorisations. Tant de choses peuvent se produire d'ici là".
A Röcken, le projet minier n'a pas que des opposants.
"30% des terrains sont des fermes qui ne sont plus exploitées et certains habitants seraient prêts à déménager contre une indemnisation", reconnaît Dorothee Berthold.
D'autres se laissent convaincre par les arguments économiques avancés par tous les partis, hormis Les Verts. "Dans une région faible, le gros employeur qu'est la Mibrag est une chance", juge ainsi Claudia Hempel, assistante commerciale depuis dix ans dans une entreprise de Röcken.
En colère qu'on envisage d'"éventrer le paysage" pour "réchauffer un peu plus la planète", Ralf O. se veut néanmoins optimiste: "Nietzsche nous sauvera", dit cet homme de 39 ans.
A dire vrai, lorsqu'il était "gamin sous la RDA", Ralf ignorait "tout" de Nietzsche et de sa tombe alors recouverte de broussailles.
Le régime communiste avait mis aux oubliettes de l'Histoire ce philosophe récupéré par le nazisme, l'accusant d'avoir pavé la voie à Hitler avec sa "Volonté de Puissance" et son concept du "surhomme".
Après la chute du Mur, les guides touristiques ont mis très longtemps à redécouvrir Röcken.
"Certaines brochures officielles zappent toujours le sujet!", s'indigne Hans-Jürgen Möhring, un touriste venu voir l'église où fut baptisé le fils de pasteur luthérien et la maison où il vécut jusqu'à 5 ans avec les siens.
Un petit musée y est accolé, qui reçoit quelque 1.500 visiteurs par an.
Le pasteur Joachim Salomon évoque "la honte culturelle" promise à l'Allemagne si elle déménage Nietzsche au nom d'"une énergie d'hier".
Hans, un touriste de Francfort, n'y voit lui aucun problème: "la pensée du philosophe restera".
Mais pour combien de temps ? Riche en lignite, la région est l'objet d'un vaste projet de mines à ciel ouvert, destiné à alimenter des centrales dans une Allemagne qui a tourné le dos à l'énergie nucléaire.
Non loin de Röcken, les bulldozers de la Mibrag, société minière aux mains d'investisseurs américains, ont déjà créé des paysages lunaires. L'église de Heuersdorf vieille de 750 ans a déménagé en octobre parce qu'elle gênait les travaux d'extraction, laissant derrière elle des villageois contraints de plier bagage après avoir épuisé les recours judiciaires.
Röcken pourrait connaître un jour le même sort si les sondages en cours dans son sous-sol sont jugés concluants. "Une vingtaine de paramètres sont pris en compte", explique Elke Hagenau, porte-parole de la Mibrag. Les premiers résultats sont attendus cet été.
Le village de Nietzsche veut croire que la lignite est trop salée et trop chargée d'eau, raison pour laquelle la RDA avait renoncé à l'exploiter.
En attendant, Röcken s'appuie sur son illustre fils pour interpeller l'opinion. "Nietzsche est notre seul gage", estime Dorothee Berthold, co-responsable de l'association créée pour sauver la commune et ses hameaux, un objectif soutenu par deux-tiers des habitants.
L'ancrage des familles de Röcken remonte souvent à plusieurs générations. "Toute notre vie est ici", résume Heidrun Kaiser, 54 ans, qui habite avec son mari Hartmut la maison où celui-ci a grandi.
La Mibrag dit comprendre "que personne n'ait envie d'abandonner son chez-soi". "Mais l'horizon éventuel est 2025: si l'on décidait de creuser, il faudrait 15 ans pour avoir les autorisations. Tant de choses peuvent se produire d'ici là".
A Röcken, le projet minier n'a pas que des opposants.
"30% des terrains sont des fermes qui ne sont plus exploitées et certains habitants seraient prêts à déménager contre une indemnisation", reconnaît Dorothee Berthold.
D'autres se laissent convaincre par les arguments économiques avancés par tous les partis, hormis Les Verts. "Dans une région faible, le gros employeur qu'est la Mibrag est une chance", juge ainsi Claudia Hempel, assistante commerciale depuis dix ans dans une entreprise de Röcken.
En colère qu'on envisage d'"éventrer le paysage" pour "réchauffer un peu plus la planète", Ralf O. se veut néanmoins optimiste: "Nietzsche nous sauvera", dit cet homme de 39 ans.
A dire vrai, lorsqu'il était "gamin sous la RDA", Ralf ignorait "tout" de Nietzsche et de sa tombe alors recouverte de broussailles.
Le régime communiste avait mis aux oubliettes de l'Histoire ce philosophe récupéré par le nazisme, l'accusant d'avoir pavé la voie à Hitler avec sa "Volonté de Puissance" et son concept du "surhomme".
Après la chute du Mur, les guides touristiques ont mis très longtemps à redécouvrir Röcken.
"Certaines brochures officielles zappent toujours le sujet!", s'indigne Hans-Jürgen Möhring, un touriste venu voir l'église où fut baptisé le fils de pasteur luthérien et la maison où il vécut jusqu'à 5 ans avec les siens.
Un petit musée y est accolé, qui reçoit quelque 1.500 visiteurs par an.
Le pasteur Joachim Salomon évoque "la honte culturelle" promise à l'Allemagne si elle déménage Nietzsche au nom d'"une énergie d'hier".
Hans, un touriste de Francfort, n'y voit lui aucun problème: "la pensée du philosophe restera".
