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Les Soudanais du Sud craignent le retour de la guerre

Une main caressant son ventre, Mary Nyariekhal Dabuol, se dit fière que son neuvième enfant s'apprête à naître dans un Soudan du Sud nouvellement indépendant.

Les Soudanais du Sud craignent le retour de la guerre
Alors que le Soudan du Sud cherche à établir de nouvelles institutions, la violence et les conflits continuent de perturber la vie de bon nombre d’habitants du jeune pays. (Photo : www.un.org)

Même si, comme de nombreux autres habitants de l'Etat frontalier d'Unité, elle vit dans la crainte d'une nouvelle guerre avec le Soudan voisin.

Quelques jours auparavant, la population de Bentiu, la capitale de cet Etat sud-soudanais riche en pétrole, avait brusquement revécu des scènes de panique et de terreur, disparues avec la fin de la meurtrière guerre civile entre l'armée soudanaise et la rébellion sudiste, aujourd'hui au pouvoir à Juba.

Ce mardi-là, au lendemain de combats un bombardier a survolé la ville en cercles durant plusieurs heures, lâchant ses bombes à une trentaine de km de là. «Quand l'Antonov est arrivé, j'étais dans la maison. Quand j'ai entendu le bruit, je suis sortie en courant et je me suis cachée, et il a lâché ses bombes. Nous étions terrifiés à l'idée que les bombes nous tombent dessus», explique Mary Nyariekhal Dabuol. Elle craint désormais que les avions reviennent et que recommence la guerre, ruinant les espoirs de stabilité et de développement si longtemps entretenus par les habitants du sud du Soudan, Etat indépendant depuis juillet seulement.

Le jeune Etat a conquis son indépendance au prix de 20 ans de guerre civile contre le pouvoir de Khartoum, qui a fait plus de deux millions de morts. Bentiu, située dans une zone pétrolifère stratégique, a été plusieurs fois bombardée.

En 2005, un accord de paix a mis fin à la guerre et a débouché en janvier 2011 sur un référendum, au cours duquel les habitants du sud se sont prononcés de manière écrasante pour l'indépendance de leur territoire.»Je pensais que nous étions désormais séparés de ces gens et que nous étions une nation indépendante, mais ils se comportent comme si nous étions encore un seul pays», s'insurge Elizabeth Nyawana.

Allongée avec sa famille durant des heures, elle était tellement persuadée que la guerre était de retour qu'elle prévoyait de creuser une tranchée autour de sa maison pour protéger ses proches des tirs d'artillerie qui, pensait-elle, ne manqueraient pas de suivre.

«La guerre ne me fait pas peur»

A l'hôpital de Bentiu, quelques uns des 23 soldats blessés qui sont soignés évoquent les combats. Le petit hôpital a dû en aliter quelques uns dans l'aile des femmes. Quarante autres sont hospitalisés dans un hôpital proche et dix, touchés par des mines, ont été évacués vers Juba.

Aucun bilan des morts n'a été communiqué par l'un ou l'autre des belligérants. «Il y avait tellement de blessés, je ne pouvais pas les compter», chuchote John Tong, dont seul un mince drap protège sa blessure au bras, des mouches qui volent dans la chaleur moite. «La guerre ne me fait pas peur. S'ils nous attaquent nous allons répliquer et l'issue sera en notre faveur ou la leur», explique Francis Mawa, atteint de deux balles. L'une lui a traversé le thorax, l'autre lui a éraflé l'abdomen.

Entre deux paroles, il souffle dans une bouteille reliée à un tube et une poche de plastique posée par terre, afin de vider le sang de ses poumons. «Quand l'accord de paix a été signé, tout le monde était heureux et fêtait cet aboutissement», mais désormais les Soudanais du Sud doutent de la sincérité des engagements de Khartoum, dit-il.

Depuis la sécession, les tensions n'ont cessé de croître entre les deux Soudans et ces récents affrontements sont les plus graves depuis l'indépendance du Soudan du Sud. Ils, ont, largement compromis la visite prévue à Juba début avril du président soudanais Omar El-Béchir pour un sommet avec son homologue sud-soudanais Salva Kiir, qui laissait entrevoir des espoirs d'apaisement.

Les négociateurs des deux pays étaient samedi à Addis Abeba, mais n'avaient pas dans l'immédiat entamé de discussions directes, malgré les assurances des responsables à Khartoum et Juba en faveur de la paix. «Je ne sais pas ce qui va apporter la paix. Cela dépend de nos dirigeants», constate, laconique, Francis Mawa. 

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