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L'usine de Battersea, une icône de Londres en péril

Avec ses quatre cheminées blanches et son corps de briques, Battersea Power Station est le bâtiment industriel emblématique de Londres.

L'usine de Battersea, une icône de Londres en péril
L'usine de Battersea est ainsi conçue comme un symbole au sens peircien du terme. (Photo : www.panoramio.com)
Pourtant, près de 30 ans après sa fermeture, l'ancienne usine électrique dépérit faute de financement pour sa rénovation pharaonique.

Parc d'attractions, centre commercial, musée, complexe d'habitations et de bureaux... les idées n'ont pas manqué pour cette centrale de la rive sud de la Tamise, immortalisée par la couverture du disque de Pink Floyd, «Animals», en 1977.

Mais les projets des repreneurs ont échoué les uns après les autres, butant sur des obstacles financiers.

Depuis fin 2011, Battersea est de nouveau en vente. Le dernier projet en date, d'un coût de 5,5 milliards de livres (6,6 milliards d'euros), a été enterré en décembre, quand le propriétaire du site, la compagnie irlandaise REO, a été déclarée en faillite, les banques lui réclamant le paiement immédiat de ses dettes, de 324 millions de livres.

Symbole du passé industriel de la capitale britannique, ce bâtiment classé datant de 1933 est devenu un «éléphant blanc», expression désignant un fardeau financier. Et malgré la grande popularité de l'usine auprès des Londoniens, le feuilleton de ses déboires commence à user la patience de certains.

«Détruisez-la!» tranche Stephen Bayley, critique culturel et cofondateur du musée du Design, qu'il avait un temps envisagé d'installer sur ce site.

«Je vis à côté, et bien sûr j'aime sa présence étrange et mélancolique. Mais les villes doivent évoluer et changer, autrement elles meurent», explique-t-il à l'AFP, fustigeant la «nostalgie mal placée» des Britanniques.

«Personne n'a les moyens de restaurer Battersea Power Station, elle est en très mauvais état, tous les joints du bâtiment doivent être refaits», souligne-t-il.

Pour saler encore la facture, le sol pollué sur lequel est installée l'ancienne usine électrique doit faire l'objet de travaux de décontamination.

L'exemple de la Tate Modern
Plus grand bâtiment en briques d'Europe, «BPS» est l'oeuvre de l'architecte Giles Gilbert Scott, concepteur des fameuses cabines téléphoniques rouges. Mais aussi d'une autre célèbre usine londonienne, Bankside Power Station, qui abrite le musée de la Tate Modern et constitue, elle, un exemple de reconversion réussie.

Baptisée «temple de l'électricité» avec ses quatre cheminées blanches évoquant des colonnes antiques, l'usine de Battersea a un intérieur de style art déco, un hall aux murs recouverts de marbre italien, deux salles de contrôle des machines.

Pour Paddy Pugh, d'English Heritage, organisme chargé de la préservation du patrimoine dont l'aval est indispensable à tout projet de rénovation, il est «inconcevable de démolir un bien d'une telle valeur architecturale et historique».

Malgré les coûts d'une remise en état, il juge que le jeu en vaut la chandelle pour un investisseur, étant donné l'attractivité croissante de la zone de Battersea. Situé en face du très chic Chelsea, le quartier doit notamment accueillir la nouvelle ambassade des Etats-Unis et pourrait être desservi par une extension du métro.

«Pour nous le plus important c'est que Battersea soit réhabilitée, qu'elle retrouve un usage et nous sommes ouverts aux suggestions», dit-il, n'excluant pas l'idée d'accueillir sur le site un stade de football, alors que le club de Chelsea a manifesté son intérêt.

L'hypothèse fait hurler l'association de riverains de l'ex-usine, qui s'est constituée au moment de sa fermeture en 1983, et propose un projet alternatif.

«Le lieu devrait être principalement dédié à la culture et au travail», juge l'architecte Keith Garner, membre de cette association. C'est «une adresse prestigieuse, connue dans le monde entier, idéale pour des entreprises, surtout dans le secteur de la création ou des médias», juge-t-il.

Et de citer comme exemples de transformations réussies les anciennes usines Fiat de Lingotto, à Turin, et celles de Dean Clough à Halifax (nord de l'Angleterre). «Dans une ville riche comme Londres, conclut-il, il n'y a aucune excuse à ce que rien n'ait été fait depuis près de 30 ans».
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