Le conte est un patrimoine porteur de valeurs et de l'image de la société. Il enseigne la tolérance et la culture de l'écoute, a affirmé Najima Ghozali Tay Tay, directrice du Festival international des contes.
Dans une interview accordée à la MAP en marge du 9e Festival international des contes, Najima Ghozali Tay Tay a mis en exergue l'importance du conte en tant que patrimoine culturel immatériel qui incite à la réconciliation entre les trois générations et au respect d'autrui.
Le conte renforce aussi les liens d'affection entre l'enfant et sa mère, selon elle. Si l'enfant, après deux ans, réclame un conte, c'est parce qu'il a toujours besoin de se sentir très proche de sa maman à travers sa voix, sa respiration et ses regards qui lui garantissent de l'assurance, a-t-elle dit.
Elle a rappelé, dans ce sens, l'intérêt qu'accordait la société marocaine au conte raconté dans des réunions familiales autour du Kanoun (brasero) ou dans les souks et les places publiques, appelant à déployer tous les efforts pour que «nos valeurs et notre mémoire reprennent place, comme auparavant, dans nos traditions et notre identité».
Cette année, le Festival international des contes, qui connaît la participation de conteurs, experts et chercheurs en patrimoine populaire, rend hommage à la femme méditerranéenne, a fait savoir la présidente de l'Association Conte'Act.
«On veut casser les clichés et les stéréotypes de la femme sorcière et méchante qui meublaient l'imaginaire populaire marocain ou méditerranéen», a-t-elle précisé, soulignant l'importance de faire resurgir l'image de la femme héroïne en tant que conteuse et grand-mère et en tant que personnage du conte lui-même.
Elle a cité, à cet égard, des femmes protagonistes des contes marocains qui ont marqué le patrimoine populaire par leur bravoure, générosité et sagesse telles que la fameuse Aicha Comptessa appelée communément «Aicha Quandicha», «Aicha Bahriya» qui est tombée amoureuse du théologien Moulay Bouchaib Reddad, «Taslit omm anzar et «Lala Bouya», symboles de fécondité et de générosité.
Le Festival international des contes, avec ses personnages tels que Baba Achour et ses différentes activités, a pour objectif de «commercialiser nos traditions, coutumes et notre patrimoine, en les mettant dans un emballage moderne qui s'adapte aux besoins des nouvelles générations, a indiqué cette experte du conte populaire.
Pour sauveagrder ces contes et assurer leur transfert aux générations futures, elle a jugé impératif d'en parler et de les archiver. «Imaginez que vous avez fait un beau rêve et que vous n'en parlez pas, vous allez l'oublier totalement», a-t-elle renchéri.
Najima Ghozali Tay Tay préfère publier les contes populaires en langue originale amazighe ou en dialecte, mais ne trouve aucun mal à les traduire en langues universelles même si la traduction fait perdre à ces perles leur valeur esthétique et leur style linguistique.
En traduisant ces contes en français, en anglais ou en d'autres langues, «nous faisons savoir nos traditions et notre patrimoine comme l'a fait Walt Disney qui a réussi à commercialiser les contes des frères Grimm et de Charles Perrault», a-t-elle martelé.
Le Festival veut aussi rendre hommage aux conteurs venus de plusieurs régions du Maroc et dont la majorité vivent dans une situation très modeste.
Une table ronde sur «le conteur : entre l'intérêt et la négligence» a été organisée dans le cadre de cette manifestation pour discuter de la création d'une institution dédiée à tous les conteurs du monde, particulièrement les conteurs populaires en situation précaire, a-t-elle ajouté.
