La moitié des 6.000 langues pratiquées aujourd'hui dans le monde va probablement disparaître d'ici la fin du siècle, a averti, mardi à Genève, Rita Izsak, experte indépendante des Nations unies chargée des Questions relatives aux minorités.
Certains groupes sont vulnérables à des facteurs échappant à leur contrôle, telles que les politiques d'assimilation qui favorisent des langues dominantes nationales ou officielles, l'impact des conflits ou le déplacement forcé de leurs terres traditionnelles, a indiqué Rita Izsak, lors de la présentation de son rapport à la 22e session du Conseil des droits de l'Homme.
Selon ce rapport, les langues minoritaires sont en recul dans toutes les régions du monde, et ce, à un rythme inquiétant. Ce recul est annonciateur dans certains cas d'une disparition quasi-inéluctable sous l'effet de facteurs comme la mondialisation et les processus d'assimilation et de dilution culturelle.
«Certains pays ont activement promu une seule langue nationale comme un moyen de renforcer la souveraineté, l'unité nationale et l'intégrité territoriale», a-t-elle dit, en soulignant que les droits linguistiques des minorités et l'utilisation du langage ont souvent été une source de tensions, à la fois entre et au sein des Etats.
«Les défenseurs des droits linguistiques ont parfois été associés à des mouvements sécessionnistes ou ont été perçus comme une menace pour l'intégrité ou l'unité d'un Etat», a-t-elle ajouté, soulignant que «la langue est un élément central et d'expression de l'identité et d'une importance capitale dans la préservation de l'identité du groupe».
Pour Rita Izsak, la protection des droits des minorités linguistiques est une obligation des droits de l'Homme et une composante essentielle de la bonne gouvernance. «Pour créer l'unité dans la diversité, il faut un dialogue avec toutes les parties prenantes, y compris sur la manière appropriée de répondre aux besoins linguistiques et les droits de tous les groupes», a-t-elle dit.
Elle a estimé, d'autre part, que les facteurs historiques tels que le colonialisme a eu un impact énorme au niveau mondial sur les langues, ce qui a entraîné la marginalisation et une baisse rapide de l'utilisation des langues autochtones et minoritaires qui étaient souvent considérées comme arriérées, comme obstacle à l'hégémonie coloniale, ou comme un frein au développement national.
«On peut aussi faire valoir que la mondialisation d'aujourd'hui, le développement de l'Internet et de l'information sur le Web ont un impact direct et négatif sur les langues minoritaires et la diversité linguistique, car les communications mondiales et les marchés exigent une compréhension globale, a-t-elle déploré.
Dans son rapport, Rita Izsak analyse diverses menaces pesant sur l'existence des langues minoritaires et des minorités linguistiques, en soulignant l'importance de la reconnaissance des langues minoritaires et des droits linguistiques, leur protection et leur promotion dans la vie publique.
