Un mois après le décret de l’état d’urgence sanitaire au Maroc et le confinement obligatoire, le nombre de personnes atteintes du Covid-19 ne cesse d’augmenter. Le rythme modéré des nouveaux cas enregistré en début de la pandémie cède petit à petit la place à une croissance plus soutenue. Et ce, notamment à cause de l’apparition de foyers de contamination, essentiellement dans les lieux de travail, qui accélèrent la propagation du virus.
Si plusieurs sites industriels et commerciaux de différentes tailles ont été identifiés comme clusters de contaminations, notamment à Casablanca, Fès, Tanger, Larache, Oujda… d’autres facteurs, individuels et très discrets, peuvent également propager la maladie et faire très mal en ce temps de pandémie. Il s’agit, entre autres, des coiffeurs.
Certes, comme beaucoup d’autres commerces, les propriétaires des salons de coiffure ont été priés de fermer leurs locaux immédiatement après le début du confinement sanitaire obligatoire, il n’en demeure pas moins que certains coiffeurs et coiffeuses, trouvent toujours une entourloupe pour contourner cette mesure sanitaire obligatoire de lutte contre la pandémie. Et à vrai dire, ils sont beaucoup à ne pas respecter les recommandations, sous-estimant tous les risques et faisant fi des énormes dangers aussi bien pour eux que pour leurs clients, aussi insouciants qu’eux.
Profitant de la souplesse que leur offre la nature de leur profession, leurs petits matériels dans un petit sac, ils passent leur temps à sauter de maison en maison pour offrir leurs services à leurs clients, avec tout ce que ces déplacements fréquents et répétitifs, généralement sans aucune forme de protection, génèrent en risque de contamination et de propagation de la pandémie.
«Tous les coiffeurs du quartier offrent maintenant le service à domicile», témoigne un coiffeur du quartier Benmsik à Casablanca, qui précise qu’il s’abstient à faire pareil par peur pour sa mère qui vit avec lui sous le même toit. «Même si la tentation est grande, j’ai peur pour ma mère. Je ne peux pas me permettre de lui ramener le virus à la maison. Mais tous les autres coiffeurs le font sans exception».
Si certains coiffeurs ont choisi le moindre mal, c’est-à-dire le service à domicile, d’autres, plus audacieux… ou insouciants, se permettent le «pire». Ils reçoivent leurs clients chez eux ! «Venez-vous faire une beauté. Y’a pas de problème. Je reçois mes clients chez moi, dans le salon, alors que mon épouse fait les devoirs scolaires avec mon fils dans la chambre voisine !!! En attendant leurs tours, les clients peuvent regarder tranquillement la télé, boire un thé et s’amuser !!!», indique un coiffeur du quartier Aïn Sebaâ à Casablanca, sans oublier de préciser qu’il prend toutes ses dispositions en matière de prévention, à savoir le port du masque de protection et la stérilisation du matériel ! Quid de la distanciation sociale et des autres mesures de prévention ? et du respect des mesures obligatoires de l’état d’urgence sanitaire ? «Vous savez, je ne peux pas me permettre de rester sans rien faire en ces temps de disette. Je dois travailler pour gagner ma vie. Et du moment que les clients acceptent, je fonce», répond notre coiffeur.
Moins audacieuses, les coiffeuses n’acceptent pas d’offrir leurs services à «n’importe qui». Elles choisissent leurs clientes en fonction des liens historique et affectif qu’elles nouent avec elles. «Je ne travaille qu’avec quelques clientes de très longue date. Je décline les sollicitations de toutes les autres malgré leur insistance et les rémunérations intéressantes qu’elles me proposent pour me déplacer chez elles, frais de transport en sus», souligne une coiffeuse de Mohammedia. «J’ai peur pour moi et pour ma famille», explique-t-elle.
Aussi indignement insouciants et insouciantes que leurs coiffeurs et coiffeuses, les clients et les clientes cèdent à des caprices dangereux et injustifiés. «Je ne peux pas me permettre de rester sans mes soins tanino, mon masque exfoliant et ma manucure à la paraffine», souligne une jeune casablancaise, accro aux soins de beauté, et qui reconnait son «péché». «Beaucoup de coiffeuses offrent leurs services à domicile malgré les risques de la propagation de la pandémie et je ne peux pas m’en priver, même si je suis consciente du danger. A cause de la crise et de la fermeture de son lieu de travail, même la bonne femme qui s’occupe de mon gommage au hammam m’a contacté pour m’offrir une séance de gommage à domicile», ajoute-t-elle.
Les autorités publiques reconnaissent leur incapacité face à ces comportements indignes. «Malgré tous nos efforts, on ne peut malheureusement pas contrôler ce genre d’attitudes individuelles perpétrées en toute discrétion», se résigne un responsable.
Aussi désolant soit-il, la lutte contre la pandémie Covid-19 n’est malheureusement pas l’affaire de tous. Lamentable.