Par Dr Moussayer khadija, Spécialiste en médecine interne et en Gériatrie et présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS).
Les formes graves de la Covid-19 mènent une partie des patients en réanimation, en raison souvent d’une insuffisance respiratoire. Le traitement de base repose, jusqu’à présent, sur des techniques d’oxygénation et de ventilation artificielle (dénommées « traitement symptomatique » ou « soins standards »). Aucun médicament n’a jusqu’ici montré une efficacité déterminante à ce stade de gravité.
Une méta-analyse (un regroupement de 7 études), coordonnée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’Université de Bristol, publiée le 2 septembre dans le Journal of the American Medical Association, indique qu’un traitement par corticoïdes diminuerait de 21% le risque de mortalité des formes sévères de la Covid-19. De plus, aucun effet secondaire néfaste n’a été observé lors de leur emploi.
En effet, ces molécules permettent de réduire l'inflammation chez les patients lorsque le système immunitaire réagit de manière excessive contre l'infection, c’est-à-dire lors de l’orage cytokinique. D’ailleurs, c’est cette réaction trop forte qui endommage, notamment les poumons et entraîne trop souvent une issue fatale.
Ce travail de recherche a rassemblé les données de 1.703 patients de 12 pays (France, Royaume-Uni, Brésil, Canada, Chine, Espagne, États-Unis, Espagne…), ayant reçu par tirage au sort, soit les soins standards, soit un placebo associé aux soins standards, soit un corticoïde (dexamethasone, hydrocortisone ou methylprednisolone).
L’OMS a réagi à cette communication en recommandant les corticostéroïdes pour le traitement des patients atteints de la Covid-19 sévère et critique. Toutefois, l’OMS déconseille leur utilisation dans les cas de Covid-19 non sévères. En effet, l’usage des stéroïdes pour les patients moins malades ou asymptomatiques est susceptible de diminuer leurs défenses immunitaires pour lutter contre le virus (et cela tant que ce système immunitaire ne se dérègle pas dans une réaction excessive).
Cette analyse conforte les résultats d’une autre recherche, publiés en juin dernier, montrant déjà l’efficacité d’un corticoïde, la dexamethasone, chez des malades gravement atteints du virus. Cette première annonce avait accéléré son emploi dans les services hospitaliers avant même l’annonce des résultats de l’étude internationale. Il faut signaler d’ailleurs que ces recommandations de l'OMS ne sont pas en contradiction avec les pratiques existantes depuis plusieurs mois au Maroc où ces molécules ont été utilisées dans des cas graves, comme rapporté par la presse.
Les corticoïdes se révèlent encore une fois incontournables face à ce virus comme pour beaucoup d’autres pathologies qui existent depuis 70 ans. Rappelons qu’il s’agit à la base d’une hormone (la cortisone) sécrétée par une glande située au-dessus des reins, les glandes surrénales.
Pour rappel, la mise au point en 1949 de la cortisone synthétique (les corticoïdes) a bouleversé le traitement de nombreuses pathologies en raison de son action anti-inflammatoire très puissante. Un dernier avantage à citer : ces molécules sont peu coûteuses.
Référence de l’étude internationale : The WHO Rapid Evidence Appraisal for COVID-19 Therapies (REACT) Working Group. Association Between Administration of Systemic Corticosteroids and Mortality Among Critically Ill Patients With COVID-19: A Meta-analysis. JAMA. Published online September 02, 2020. doi:10.1001/jama.2020.17023