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Crise sanitaire : Quel rôle de la société civile dans la sensibilisation !

​ Plusieurs initiatives louables ont été menées par les acteurs associatifs durant toute la période de confinement. Maintenant, l’heure est encore à la mobilisation pour sensibiliser les Marocains au respect des mesures sanitaires. Cette crise a démontré le rôle important de la société civile et la nécessité de renforcer et d’appuyer son action pour participer au développement.

Aux côtés du personnel de la santé, des autorités locales, et des forces de l’ordre, les acteurs sociaux ont été aux premiers rangs dans la guerre que nous menons contre la propagation de la Covid-19. Dès le déclenchement du confinement, les associations ont fait preuve d’un sens remarquable de patriotisme et du devoir national. Ils ont naturellement rejoint l’élan de solidarité nationale en lançant des campagnes de sensibilisation locales dans le but d’attirer l’attention des citoyens quant à l’importance de se conformer strictement aux règles imposées par l’état d’urgence sanitaire. Aujourd’hui, alors que plusieurs villes sortent progressivement du confinement, le rôle des associations sociales revêt une importance cruciale pour sensibiliser les citoyens, enfants, jeunes et moins jeunes, à la nécessité de se conformer aux règles de sécurité sanitaire et d’hygiène synonymes désormais de notre survie face à ce virus. 

Si tout le monde s’accorde à dire que cette crise a changé le monde, il est certain qu’elle a mis en exergue l’importance des actions solidaires et associatives, l’importance d’être proche des citoyens pour les soutenir, les aider à avancer, les écouter et dialoguer avec eux. C’est ce rôle que devront désormais jouer les associations sociales pour contribuer réellement au développement. Il existe encore plusieurs dysfonctionnements qui freinent l’évolution de la société civile et notamment le cadre juridique, l’absence de formation spéciale pour les acteurs de la société civile et l’absence d’une relation de coopération et de partenariat avec les autres acteurs de la société.

Cette réalité devra donc changer pour donner à la société civile plus de marge pour agir, surtout que l’on remarque, et cette crise l’a clairement démontré, une nouvelle génération d’acteurs associatifs jeunes qui ont pris des initiatives courageuse, innovantes et efficaces. En témoigne le grand ami des jeunes, Ahmed Ghayet, militant associatif et président de l'Association Marocains pluriels, qui explique qu’aujourd’hui, l’action associative colle de plus en plus au terrain, aux réalités, aux besoins concrets et surtout se pratique en termes de participation et de partenariat. « Je milite depuis longtemps -avec d’autres- pour une action associative en bonne entente, en coopération avec les autorités locales, ce n’est pas encore vrai partout, mais il y a réellement une nouvelle génération totalement ouverte sur ces pratique », dit-il.

 

Entretien avec Ahmed Ghayet, militant associatif et président de l'Association Marocains pluriels

« Les militants de la société civile, les acteurs associatifs, culturels, les ‘’engagés du terrain’’ ont fait un travail exceptionnel »

Le Matin : Le Monde et le Maroc passent par des moments inédits et difficiles, comment d’abord vous vivez cette période ?

Ahmed Ghayet : C’est un peu paradoxal, mais très sincèrement je n’ai pas eu le temps de me laisser saisir par l’angoisse : je me suis assuré de mettre mes proches en sécurité autant que possible -comme tout un chacun- puis je me suis lancé tête baissée dans l’action. Déjà en temps normal je suis quelqu’un qui agit, au quotidien, en étant présent sur le terrain mais là cette période exceptionnelle et très dure à vivre m’a poussé à tenter de me dépasser. Je me suis efforcé d’être présent et actif -aux côtés de tous les jeunes avec lesquels j’ai tissé des liens à travers le Royaume- là où je pensais que je pouvais être le plus utile. Sincèrement lorsque l’on se dit engagé, militant, que l’on se veut ‘’exemplaire’’ en quelque sorte, c’est bien dans de tels moments de doute, de danger qu’il faut le prouver. Et puis être auprès de ceux d’entre nous qui ont besoin d’aide ou de soutien est la meilleure chose que l’on puisse faire en des moments comme ceux-ci : être volontaire, se mettre à la disposition de son Pays doit être un réflexe naturel, lorsqu’on le peut.

Vous qui êtes proche des jeunes, quels est leur lecture de la situation ?

Franchement je pense bien connaître nos jeunes, je sais leurs capacités, leurs qualités, leur potentiel et bien même moi ils m’ont épaté. Pro-actifs, concernés, présents, courageux…je les ai vus partout se mobiliser, s’activer, se mettre à la disposition des plus fragiles, des précaires. Je n’ai pas senti de peur en eux, peut-être une attitude spécifique à leur jeunesse : 20 ans c’est l’âge de l’intrépidité. Et puis, ils ont été galvanisés en quelque sorte, dans les quartiers notamment, ils ont senti à quel point ils pouvaient être utiles, ils ont vu que notre société -qui jusqu’alors les ignorait voire bien souvent les méprisait- découvrait d’un seul coup que cette jeunesse était valeureuse, patriote, talentueuse.

Deux mots d’ordre de cette pandémie : solidarité et discipline. D’abord en tant qu’acteur associatif, pensez-vous que la société civile a joué son rôle ?

J’en suis le témoin : les militants de la société civile, les acteurs associatifs, culturels, les ‘’engagés du terrain’’ ont fait un travail exceptionnel. Aux côtés des soignants, des représentants de l’ordre, des agents d’autorité, ils ont été en quelque sorte la 3ème Force. Celle qui a géré le social, l’humanitaire, le réconfort, le maillage solidaire… Bien plus que les élus par exemple, ils ont remplis un rôle de proximité : à la fois efficaces, rassurants et disponibles. C’est d’après moi l’un des grands enseignements de cette période.

Le défi de la phase actuelle est sans aucun doute la discipline, et le tissu associatif a un rôle important à jouer. On ne voit pas encore beaucoup d’associations qui se mobilisent pour sensibiliser et éduquer les gens, est-ce le cas vraiment ?

Ce sont les associations de jeunes, celles qui sont sur le terrain, qui ont pris ce créneau à bras le corps. J’ai envie de dire tant mieux car aujourd’hui c’est par eux que passe le message, bien plus que par les adultes. Et puis est apparu un phénomène que j’espérais voir émerger de tout cœur, depuis longtemps : des ‘’stars’’ se sont engagées à leurs côtés : apportant leur popularité, leur charisme, leurs voix aux causes que ces jeunes défendaient. Je cite ici la campagne ‘’1 masque + 1mètre = La Vie ‘’ menée par les associations de jeunes du Label Morocco l’Ghedd (Saf’Jeunesse, Moga’Jeunes, Les 109, Par-Delà les Remparts, Marock’Jeunes, Oriental Leaders, Kech’Jeunesse, Hip-Hop Family) et Marocains Pluriels. Cette initiative a été soutenue par les personnalités comme Moustapha Hadji, La Fouine, Leila Ghandi, Nordine Lakhmari, Latefa Ahrrare, Abdelmajid Bekkas, … Dans notre pays c’est plutôt nouveau et c’est un très bon signe !

Quel rôle doivent jouer les acteurs associatifs et y-a-t-il un dialogue avec les parties prenantes pour organiser les actions de la société civile ?

Notre population -notre jeunesse en particulier- a besoin d’images valorisantes, d’exemples, de modèles identificateurs, les acteurs associatifs peuvent remplir ce rôle. Nous avons besoin d’inventivité, de créativité, d’esprit novateur, une certaine façon de militer est obsolète : la ‘’charité’’ est contre-productive et infantilisante -ce qui ne signifie certainement pas la fin de la solidarité, de l’entraide, mais dorénavant pensée et effectuée en termes d’échanges, de dignité, de respect. De plus en plus l’action associative colle au terrain, aux réalités, aux besoins concrets et surtout se pratique en termes de participation, de partenariat. Je milite depuis longtemps -avec d’autres- pour une action associative en bonne entente, en coopération avec l’Autorité (Walis, Gouverneurs, Caïds, Moqqadems), ce n’est pas encore vrai partout, mais il y a réellement une nouvelle génération totalement ouverte sur ces pratique. Je l’ai vécu concrètement avec le Wali de Marrakech, celui de Fès, avec des Gouverneurs tels celui d’Anfa, de Mohammedia, de El Hajeb… C’est porteur d’espoir, c’est une piste à explorer totalement pour l’avenir : cette façon de faire doit devenir la règle dans notre futur modèle de développement. J’y crois, notre tissu associatif, notre mouvement jeune notamment, sont mûrs pour dépasser les tabous et aprioris obsolètes.

 

 

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