La Chambre des représentants a adopté à la majorité, vendredi dernier, le projet de loi de finances (PLF) au titre de l'exercice 2021, après l'introduction d'une série d'amendements, dont deux concernant le secteur immobilier. Ces nouvelles mesures prévues par ce projet de loi de finances ont été bien accueillies par les professionnels de ce secteur qui guettent la moindre lueur d'espoir pour une véritable relance. Le premier amendement, qui constitue la continuité de la mesure prise en juillet dernier, porte sur la prolongation, jusqu'au 30 juin 2021, de la réduction des droits d'enregistrement au profit des acquéreurs de logements et l'augmentation du montant de la base imposable à 4 millions de dirhams (MDH) au lieu de 2,5 MDH. Le second, lui, prévoit l'extension du bénéfice de l'exonération au profit des Organismes de placement collectif immobilier (OPCI) pour concerner également les locations à usages d'habitation.
"Ce sont des mesures très positives. D'ailleurs la première a eu un impact favorable sur les acquéreurs et a dynamisé les ventes ces derniers mois. Elle a apporté une sorte de rupture à l'attentisme des gens, notamment que le gain sur les droits d'enregistrement est significatif", a expliqué, dans une déclaration à la MAP, Karim Tazi, directeur général délégué – Pôle Conseil et transaction au groupe A. Lazrak et member of the Royal Institution of Chartered Surveyors (MRICS).
L'expert a salué également l'augmentation du montant de la base imposable à 4 MDH, qui va permettre, selon lui, d'absorber une partie du stock, notamment dans des villes comme Casablanca et Rabat où la valeur des biens immobiliers est plus élevée.
En ce qui concerne la mesure relative aux OPCI, M. Tazi estime qu'elle peut être aussi une solution pour certains promoteurs pour traverser cette conjoncture ou pour les ménages, dont le pouvoir d'achat ne leur permet pas d'acquérir un bien immobilier tout de suite, pour répondre à leurs besoins.
"Cette mesure est très intéressante, mais il faut la faire suivre par un cadre juridique spécifique. Le bail résidentiel aujourd'hui ne protège pas beaucoup les bailleurs. Je pense qu'il faudra aussi un accompagnement dans ce sens pour équilibrer les rapports bailleurs, locataires. Il sera aussi intéressant de mettre en place des assurances, ce qui va permettre d'améliorer l’attractivité", a-t-il poursuivi, relevant que les effets de cette mesure vont se sentir sur le plus long terme.
De son côté, Karim Amor, Vice-président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI), en charge de la Commission Relation internationales, s'est félicité de l'introduction des ces deux amendements importants pour la relance du secteur. "C'est un grand travail qu'a fait la Fédération", s'est-il réjoui. "La mesure relative aux droits d'enregistrement a permis une augmentation des transactions durant ces derniers mois", a t-il indiqué, mettant l'accent sur la nécessité d’exonération des droits de conservation foncière.
Parallèlement, M. Amor a souligné que la seconde mesure devrait permettre le développement de l'immobilier locatif résidentiel d'une manière professionnelle et donner l'opportunité aux personnes non éligibles au crédit d'avoir un logement.
Par ailleurs, le vice-président de la FNPI regrette que le PLF ne prévoit pas encore de solutions pour le logement social et celui de la classe moyenne. "Nous avons compris que le ministère des Finances souhaitait des solutions qui ne donnent plus d'exonérations aux promoteurs immobiliers. Ainsi, Nous avons proposé des solutions alternatives", a t-il dit, citant notamment la proposition d'une aide étatique directe aux acquéreurs-bénéficiaires des logements sociaux.
Pour sa part, Amine Mernissi, spécialiste du secteur de l'immobilier au Maroc et fondateur de "www.reponsimmo.com", a souligné que la mesure portant sur la prolongation de la réduction des droits d'enregistrement est pragmatique. Le gouvernement se donne ainsi une année pour évaluer l'efficacité de cette mesure mise en place en juillet dernier. M. Mernissi a aussi qualifié cette mesure de "salutaire et positive", puisqu'elle a déjà commencé à donner ses fruits, ajoutant que son effet va se faire sentir encore plus au premier semestre de 2021.
Et de renchérir: "Les chiffres prouvent que pendant le troisième trimestre 2020 les acheteurs sont revenus sur le marché et ont profité de cette mesure, que ce soit pour les logements au dessous de 2,5 MDH, en bénéficiant de 50% de réduction sur les droits d’enregistrement, ou pour le logement social et économique". Le spécialiste a en outre estimé que la revue à la hausse du seuil maximal à 4 MDH permettrait de donner un coup de pouce au logement haut standing.
"Les mesures fiscales prises touchent ainsi tous les segments d'immobilier ce qui donnera un coup de pouce au secteur et à faire revenir les acquéreurs sur le marché après cette période difficile", a t-il conclu.