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Près de dix années de guerre : l’Europe doit continuer à soutenir le peuple syrien

Près de dix années de guerre : l’Europe doit continuer à soutenir le peuple syrien
Josep Borrell Fontelles, Haut représentant de l'Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité.

Le conflit en Syrie entre dans sa dixième année. Dix ans de guerre, de souffrance et de deuil. Et ce n’est toujours pas terminé. Les Syriens continuent de vivre dans la peur et dans le désespoir, leur avenir pris en otage. Tandis que la guerre a forcé la moitié de la population à fuir leur foyer ces dix dernières années, ceux qui sont restés sur place sont confrontés à une crise économique sans précédent et à la menace du coronavirus.

Lors de la quatrième conférence de Bruxelles sur «l’avenir de la Syrie et de la région», les 29 et 30 juin, plus de 80 pays, organisations internationales et agences des Nations unies se réunissent autour d’une table ronde virtuelle pour aborder la crise syrienne sous tous ses principaux aspects : politique, humanitaire, financier et régional. Nous réaffirmons notre ferme soutien aux efforts déployés par les Nations unies pour parvenir à une solution politique au conflit, et aux dispositions de la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU. L’obtention d’une solution politique par un dialogue inclusif, mené sous l’égide des Nations unies, conduit et pris en main par les Syriens, est la seule voie vers une paix durable en Syrie. À défaut, la misère entraînée par l’obstination d’un régime discrédité depuis longtemps ne fera qu’aller croissant.

Cette année, en plus de connaître la crise humanitaire la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale, la Syrie est proche de l’effondrement économique. La mauvaise gestion de l’économie par le régime, la corruption généralisée, la crise financière au Liban voisin et la pandémie de Covid-19 ont mis l’économie du pays à genoux. La situation est désastreuse. La Syrie connaît un taux d’inflation plus élevé que jamais et, en même temps, une dévaluation record de sa monnaie nationale. Huit Syriens sur dix vivent dans la pauvreté et même les salariés les mieux rémunérés se retrouvent sans véritable pouvoir d’achat. Les produits de base deviennent rares, la nourriture et les médicaments sont en passe de devenir inabordables pour le citoyen moyen. Les Syriens veulent la même chose que tout individu et toute famille partout ailleurs dans le monde : sécurité personnelle, emplois et un avenir pour leurs enfants. En d’autres termes, ils ont besoin de perspectives d’avenir.

L’UE et ses États membres ont constamment soutenu les Syriens, où qu’ils soient, depuis le début du conflit. Plus de 20 milliards d’euros ont été consacrés à l’aide humanitaire et en soutien à la stabilisation et à la résilience depuis 2011 – pour les Syriens en Syrie et pour soutenir les pays voisins. Nous sommes très reconnaissants de la solidarité dont ont fait preuve, en particulier, la Jordanie, le Liban et la Turquie. Ils assument la prise en charge de plus de 5,6 millions de réfugiés syriens. Alors que ces pays se débattent avec peine face à des situations nationales complexes, ils continuent d’avoir besoin d’aide pour répondre aux besoins croissants tant des réfugiés que de leur propre population. Ce sont eux également que l’UE aide. Notre aide en réponse à la crise syrienne ne bénéficie pas seulement aux réfugiés syriens, mais aussi à la population libanaise, jordanienne et turque, en créant des possibilités d’emploi et des infrastructures, dont des écoles, et en améliorant les services de santé et d’approvisionnement en eau. Le fonds fiduciaire régional de l’UE (Madad) a permis d’aider des communautés au Liban et en Jordanie en leur fournissant un revenu de base, un accès aux soins de santé et à l’éducation et bien plus encore, de sorte qu’aussi bien les réfugiés syriens que les populations d’accueil locales disposent de bases pour construire un meilleur avenir. En Turquie, l’UE soutient le déploiement d’un filet de protection sociale d’urgence, l’accès des réfugiés syriens à des services de santé turcs de qualité et la scolarisation. En Syrie même, nous continuons de faire notre possible pour appuyer les moyens de subsistance, soutenir les communautés et stimuler les aspects les plus fondamentaux de la vie économique. Depuis 2011, l’UE a mis en place des sanctions en réaction aux actions du régime et de ses soutiens. Le but de ces mesures est de faire pression sur le régime syrien afin qu’il mette un terme à la répression et engage des négociations en vue d’un règlement politique durable de la crise syrienne, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies et sous les auspices de celles-ci. Ces sanctions visent des personnes et des entités désignées nommément, et non la population. Elles n’empêchent pas l’acheminement de l’aide humanitaire ni ne s’opposent à l’exportation de denrées alimentaires, de médicaments ou d’équipements médicaux. Aujourd’hui, nous voulons dire au peuple syrien et à la population des pays qui accueillent les réfugiés que nous sommes conscients de ce qu’ils ont vécu et vivent encore, que nous sommes sensibles à leur sort et que nous resterons à leurs côtés. Nous savons que le rêve le plus cher des réfugiés syriens est de retourner dans leur pays

. Nous sommes prêts à contribuer à faire de ce rêve une réalité, une fois que les conditions seront réunies. Mais dans quel pays retourneraient-ils ? Il n’est pas réaliste d’attendre des réfugiés qu’ils rentrent chez eux au risque d’être arrêtés, torturés ou contraints de participer à une guerre qu’ils ont cherché à fuir. La sécurité des vies et des biens doit être garantie. Et nous savons que la stabilité nécessaire à la réconciliation et à la reconstruction en Syrie n’adviendra que lorsque le régime aura renoncé à la brutalité et se sera engagé dans un processus de dialogue politique authentique, assorti de changements et d’évolutions tangibles qui sauront guérir les blessures de la Syrie. Cela a toujours été notre objectif. C’est au peuple syrien de décider de l’avenir de la Syrie, voilà notre devise. En tant qu’Union européenne, nous nous tiendrons à ses côtés pour y parvenir.

                                                           Par Josep Borrell Fontelles, Haut représentant de l'Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité.

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