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Le Tourisme Interne pour Sauver l’activité

Le Tourisme Interne pour Sauver l’activité

Le constat est irrévocable ! Le tourisme est l’un des secteurs les plus touchés par la crise sanitaire qui frappe le monde. Après 10 ans de croissance, avec des arrivées record culminant à 1,5 milliards en 2019 et 1,5 Milliards de Dollars US de recettes, ce secteur semble plonger dans une crise sans précédent. Ainsi, et après une premier évaluation le 27 mars 2020, d’une baisse de 20% à 30% en terme d’arrivées et de 300 à 450 milliards de Dollars US en terme de recettes, l’Organisation mondiale du tourisme revoit ses chiffres à la hausse en affirmant que les arrivées de touristes internationaux pourraient baisser de 60 à 80 % en 2020. Ce qui se traduirait par une diminution   des recettes dans des proportions comprises entre 910 et 1 200 milliards d’USD et menacerait directement de 100 à 120 millions d’emplois.

Parallèlement à cette crise mondiale, le Maroc subit également les effets de cette situation inédite et est même 3 à 4 fois plus touché que les pays de l’OCDE. « Compte tenu de la structure de l’activité touristique de chaque destination, les pays de l’OCDE pour qui le tourisme interne représente en moyenne 75% des dépenses du tourisme intérieur seraient moins touchés que  le Maroc dont  l’activité dépend à plus de 78% du Tourisme international (Chiffre de 2019) », indique Zoubir Bouhoute, directeur du Conseil provincial du tourisme de Ouarzazate, dans une analyse sur le sujet.

Une analyse de l’activité touristique des pays de l’OCDE fait par ailleurs apparaitre le rôle déterminant joué par le tourisme interne tant au niveau des arrivées que de nuitées. D’un autre côté, le volume global des nuitées passées en 2016, par les touristes nationaux dans les Hôtels et Hébergement Assimilées (HEA), renseigne sur l’importance du tourisme interne dans les pays développés. La part de ces nuitées avoisine 60 % en Allemagne, 50% au Royaume-Uni, 40% en Italie contre Moins de 3% seulement au Maroc.

De ce constat, M. Bouhoute conclu qu’il est «impératif que le Maroc révise son modèle de développement touristique ». Pour l’expert, le recours aux nationaux ne doit pas être considéré comme un simple palliatif au moment des crises, mais plutôt constituer le noyau dur de la future stratégie touristique. Le tourisme interne que la stratégie sectorielle aurait délaissé, selon lui, est aujourd’hui sollicité pour sauver le secteur.

Pour faire cette conclusion, l’expert se base sur une étude minutieuse du tourisme interne qui a toujours dynamisé l’activité touristique au Maroc. « Au début des années 2000, le secteur du Tourisme allait vivre l’un de ses épisodes les plus cauchemardesques en relation avec la tension provoquée par les attentats terroristes, indique l’expert. Intervient après la crise sanitaire entre 2002 et 2003 à cause du SRAS. « La conjugaison de ces événements a eu un impact négatif sur l’activité touristique au Maroc.       Les arrivées des touristes étrangers sont passées de 2,28 millions en 2000 à 2,25 millions en 2001 puis   2,22 millions en 2002 avec une stagnation du chiffre en 2003. Les nuitées des Touristes étrangers ont aussi enregistré des régressions en passant de 11,27 millions en 2000 à 10,29 millions en 2001 puis à 8,87 millions en 2002.

Pour faire face à cette crise, les responsables avaient fait appel aux nationaux pour sauver le secteur et la première opération de Kounouz-Biladi fut organisée sur une durée d’un mois, du 14 avril au 18 mai 2003, suivie d’une deuxième vague l’été 2003. Après un début moyen et avec l’adhésion significative des agences de voyages à l’été 2004, les choses se sont améliorées. « Le volume des nuitées des résidents a en effet progressé de 7,52% en 2004 contre 4,72 % en 2003. Entre temps le volume des nuitées  des touristes étrangers est passé  à 10,30 millions en 2004 (+21,03%), 12,26 millions   en 2005(+19,03%) et   13,35 millions  (+8,89%)en 2006 , tandis que le volume des nuitées des résidents  n’a progressé que de  3,50%  en 2005 et 0,68% en 2006 et la compagne semblait être abandonnée », analyse-t-il. Au printemps 2009, et en plein crise financière mondiale, on décide de lancer la deuxième édition de Kounouz-Biladi en introduisant quelques changements. « La nouvelle version est désormais étalée sur toute l’année avec le doublement              du nombre d’hôtels adhérents et l’augmentation de l’offre à 8.000 lits à l’échelle nationale », explique l’expert. Les chiffres d’ailleurs le démontre bien, « en 2009 le volume des nuitées des résidents a progressé de +9,73% pour atteindre 3,72 Millions  de nuitées et de   + 9,41% pour atteindre 4,07 millions en 2010 ,ce qui représente a peine 56,5 % de l’objectif des  7,2 millions de nuitées prévus dans le cadre du plan Biladi (voir plus loin) .     Pour les années suivantes les nuitées des résidents ont progressé de +10,59% en 2011, +10,02% en 2012. +4,86 % seulement en 2013. Le volume des arrivées des MRE a nettement progressé     en passant de1, 95 millions en 2000 à 2,7 millions en 2004 puis a 4,38 millions en 2010 », indique l’expert. En 2012, l’opération semble marcher toujours et enregistre des tendances positives. « Cette fois-ci, les professionnels ‘’semblent’’ déterminés à ‘’ se réconcilier’’ avec le touriste national qui ne doit plus être considéré comme un simple palliatif. (…) Ainsi tout compte fait, durant la période 2010-2019, le tourisme national a pu dynamiser l’activité du secteur, le volume des nuitées des nationaux est passé en effet de 4,07 millions à 7,84 millions (+3,78 millions de nuitées, +82% de croissance sur toute la période) alors que les nuitées des touristes étrangers sont passées de 13,95 millions en 2010 à 17,41 millions en 2019, (+3,46 millions de nuitées, +24% de croissance sur toute la période). La part des nuitées des touristes nationaux est passée de ce fait de 22,59% en 2010 à 31,05% en 2019 et la part de la consommation interne dans le volume global s’est améliorée en passant de 21,97% en 2010 à 22,39% en 2019 », poursuit l’expert.

Une analyse globale de la situation permet à l’expert de constater que « la progression la plus spectaculaire a été observée au niveau des nuitées des nationaux qui sont passées de 2,27 millions en 2000 à 7,84 millions en 2019, soit plus 5,57 millions de nuitées correspondant a une progression de 245% entre 2000 et 2019. Les nuitées des Touristes étrangers n’ont progressé que de 54% pendant toute la période puisqu’elles sont passées de 11,27 millions   en 2010 à 17,41 millions en 2019 ».

Cependant, La version 2020 de la vision touristique semble avoir délaissé le plan Biladi, regrette l’expert. « Treize ans après la présentation du Plan Biladi , le taux de concrétisation sur ce segment se situerait a moins de 30 % : sur les 8 stations initialement prévues, deux seulement ont pu voir       le jour avec des années de retard par rapport aux délais de livraisons prévus, deux autres sont toujours en cours de construction, une station a été abandonnée a cause du foncier et 3 autres cherchent toujours preneurs. Cette offre limitée de structures d’hébergement adaptées au citoyens marocains a limité d’une part l’accès des nationaux aux établissements touristiques classés ce qui s’est traduit par un pourcentage très faible des nuitées passées dans les hébergements classées (3% du potentiel total), limitant ainsi la recette du tourisme interne a 7 Milliards en 2019, sachant que la consommation du tourisme interne est estimée  à 22,7 Milliards de DH en 2019 », écrit l’expert. Et d’ajouter que « de ce fait les marocains ont multiplié leurs voyages vers d’autres destinations touristiques présentant probablement des offres très compétitifs. Le Tourisme émetteur est devenu un facteur d’éviction du segment du tourisme interne en le privant de parts considérables, son volume ne cesse de se développer passant presque du double au triple des dépenses par rapport au tourisme interne entre 2010 et 2019 ».

En conclusion de cette analyse, l’expert touristique indique que « les nationaux vont certainement contribuer à amortir le choc d’une chute libre du secteur comme ils l’ont toujours fait. Le volume de récupération dépendra des délais de l’état d’urgence sanitaire et que des mesures de relances qui seront mises en place ». Et de poursuivre, « les actions doivent concerner à très court terme la mobilisation de la consommation interne dont la part marchande doit dépasser les 50% ainsi que la mobilisation du Grand potentiel que représente le Tourisme émetteur ». Les nationaux vont certainement sauver l’activité et une redistribuer des cartes est nécessaire pour une relance du secteur, conclu-t-il.

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