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Les personnes immunodéprimées seraient à l’origine de l’émergence d’Omicron

Comment un variant tel qu’Omicron peut-il apparaitre subitement et s’imposer aussi rapidement devant d’anciens variants ? Selon une récente étude allemande, les personnes immunodéprimées pourraient constituer un terreau propice au développement de nouveaux variants. Le point avec Dr Khadija Moussayer, spécialiste en Médecine interne et en gériatrie et présidente de l'Association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (Ammais).

Les personnes immunodéprimées seraient à l’origine de l’émergence d’Omicron

Le variant Omicron continue de se répandre dans le monde. Le nombre de cas augmente de jour en jour. À peine un mois après son apparition, il est d’ores et déjà dominant dans plusieurs pays.

Mais comment peut-on expliquer l’apparition d'un nouveau variant tel qu’Omicron qui présente des dizaines de mutations ? Selon une étude scientifique réalisée récemment par des chercheurs de l’Institut de virologie de l’Université de Fribourg, en Allemagne, les personnes immunodéprimées pourraient être une source d’émergence de variants potentiellement dangereux du Sars-CoV-2.

Les auteurs de cette étude se sont penchés sur les effets de la Covid-19 sur ces patients dont l’organisme, affaibli par la maladie (VIH, cancer, greffe ou traitement immunosuppresseur), a du mal à lutter contre le virus. Ce sont des patients qui pourraient constituer un terreau propice au développement de nouveaux variants.

«Les personnes immunodéprimées ne sont pas capables de combattre efficacement les bactéries et les virus. Ainsi, quand elles sont atteintes de Covid-19, et pour lequel, par ailleurs, elles sont à risque de formes graves, le virus va rester très longtemps dans leur organisme, parfois plusieurs mois, contre seulement quelques jours pour une personne saine.

Ils ne parviennent pas à éliminer le virus, car les patients qui pourraient constituer un terreau propice au développement de nouveaux variants car leurs défenses immunitaires sont trop faibles», explique au «Matin» Dr Khadija Moussayer, spécialiste en Médecine interne et en gériatrie et présidente de l'Association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques.

Et d’ajouter que «c’est ainsi que se produisent des erreurs dans le processus de réplication du patrimoine génétique du virus et une mutation en résultera. Le virus peut accumuler une série de mutations pendant toute la période de multiplication dans l’organisme de l’immunodéprimé et créer ainsi un variant.

Le variant est cette nouvelle version du virus qui prend en compte ces différentes modifications. Certaines variations peuvent modifier la contagiosité ou la dangerosité du virus».

Les auteurs de l’étude ont rappelé, en outre, que l’Afrique du Sud, premier pays où Omicron a été découvert, est l’un des pays les plus atteints au monde par le VIH. Ce dernier affaiblit l’immunité, et c’est ce qui explique pourquoi des variants classés préoccupants y voient le jour.

Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), avait déclaré dans ce sens que l’insuffisance de la couverture vaccinale et du niveau de dépistage, notamment en Afrique, constitue une recette parfaite pour que des variants se reproduisent et s’amplifient.


Questions à la présidente de l'Association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques

Khadija Moussayer : «Les personnes immunodéprimées doivent être vaccinées de façon prioritaire contre la Covid-19»

Le Matin : Puisque le variant Omicron est très transmissible, des personnes immunodéprimées vont forcément le contracter. Est-ce que ce virus pourrait encore muter ? Serait-ce une histoire sans fin ?

Khadija Moussayer : Les personnes immunodéprimées sont à la fois à risque de contracter le virus et de faire des formes graves de la maladie et également d’être le terreau de mutations et d’apparition de nouveaux variants. Chez ces personnes, le système immunitaire ne va pas réussir à vaincre le virus, mais il va tout de même se battre contre lui. Dans cette lutte entre le système immunitaire et le virus, ce dernier va être contraint de muter afin de se reproduire et de résister. Il en résulte des mutations les plus dangereuses, capables d'échapper au pouvoir neutralisant des anticorps. Et c'est ce virus, avec ces mutations, qui sera transmis si le patient contamine une autre personne.

Que peut être la solution pour éviter de nouvelles mutations ?

*Il faut à la fois améliorer l’immunité des personnes immunodéprimées et empêcher qu’elles contractent la Covid. L’origine de l’immunodépression est diverse, elle peut être congénitale ; c’est le cas du déficit immunitaire primitif ou acquis comme dans le Sida ou à la suite de médicaments qui dépriment le système immunitaire, notamment les corticoïdes et la chimiothérapie anticancéreuse. Dans le cas du déficit immunitaire primitif, les patients doivent être traités selon les cas par des injections d’immunoglobulines humaines qui ont pour rôle de remplacer les anticorps. Dans certains cas très rares, une greffe de cellules souches sanguines s’impose. Par ailleurs, les personnes atteintes du Sida doivent être soignées. D’autre part, les personnes immunodéprimées doivent être vaccinées de façon prioritaire contre la Covid-19, elles peuvent recevoir leur dose de rappel (troisième dose) dans un délai inférieur à 6 mois (mais d'au moins 3 mois). La vaccination de leur entourage (adultes et enfants) est recommandée, car leur réponse immunitaire à la vaccination est souvent diminuée, la vaccination est ainsi moins efficace.

Que pensez-vous des anticorps monoclonaux tels qu’Evusheld qui a été validé en Europe et aux États-Unis et qui est destiné à prévenir la Covid chez les personnes immunodéprimées ?

Evusheld est une association d’anticorps monoclonaux. Il est administré en deux injections successives. En effet, contrairement à la plupart des traitements anti-Covid par anticorps, qui sont destinés à des patients hospitalisés pour leur éviter une forme très grave, Evusheld vise à agir avant l’apparition de la maladie, sur le même principe qu’un vaccin. Il s’adresse aux personnes pour lesquelles la vaccination est contre-indiquée en raison d’importants risques de réactions allergiques et qui courent un risque élevé de forme grave de la Covid-19. Selon les études, ce traitement apporte une durée de protection d’au moins 6 mois après l’administration d’une dose unique et réduit d’environ 80% l’incidence des cas d’infections symptomatiques. Les anticorps dits «monoclonaux» sont des anticorps fabriqués spécifiquement pour traiter une maladie. Ils sont produits par des cellules cultivées en laboratoire, il peut s’agir d’une bactérie, d’une levure ou d’une cellule de mammifère.

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