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L’ambassadrice de la COP26 à la rencontre des actrices de l’action climatique au Maroc

Une palette de femmes marocaines engagées dans l’action pour le climat ont pris part à une rencontre avec Janet Rogan, ambassadrice de la COP26 pour l’Afrique et le Moyen-Orient, tenue récemment dans la résidence de l’ambassadeur du Royaume Uni au Maroc. Cette rencontre a permis de mettre en avant le leadership des femmes dans les questions climatiques à travers les différents témoignages de participantes fortement mobilisées pour un monde plus vert.

Dès son arrivée au Maroc pour une visite de plusieurs jours, l’ambassadrice de la COP26 pour l’Afrique et le Moyen-Orient, Janet Rogan, s’est lancée dans un véritable marathon de rencontres avec différents responsables gouvernementaux, acteurs de la société civile et représentants du secteur privé. Au menu de cet agenda chargé figuraient des visites de terrain et des échanges intensifs autour des questions liées à l’environnement et au développement durable, en particulier dans un monde post-Covid, ceci dans le cadre des préparatifs pour la prochaine COP qui se déroulera en novembre prochain à Glasgow (Ecosse).

Les femmes étant en première ligne face au réchauffement climatique, mais aussi au cœur de l’action pour le climat, Janet Rogan n’a pas omis d’inclure dans son programme d’activités une rencontre avec les femmes marocaines s’activant dans ce domaine.

Ainsi, la résidence de l’ambassadeur du Royaume-Uni au Maroc, S.E.M. Simon Martin, a abrité lundi dernier une rencontre entre la responsable britannique et une brochette de femmes engagées, dont plusieurs représentantes de l'Association des enseignants des sciences de la vie et de la terre (AESVT Maroc) et du Centre de compétence Changement climatique (4C Maroc), venues partager leurs expériences, leurs idées et leurs actions en faveur du climat et du développement durable.

Avec ses 18 centres d’éducation à l’environnement et ses 27 ans d’action, l’AESVT Maroc est fortement impliquée dans des actions d’éducation, de formation et de sensibilisation sur les questions environnementales, le but étant notamment de provoquer des changements durables, individuels et collectifs de comportements, d’insuffler des valeurs et de développer des attitudes citoyennes, solidaires dans les domaines relatifs à l’environnement, à la santé et au développement.

Le 4C Maroc, quant à elle, se présente comme une plateforme nationale de dialogue et de renforcement des compétences des différents acteurs et un hub pour les informations en matière de changement climatique ouvert sur son environnement régional, africain et international. Créée en 2016 en amont de la COP 22, elle réunit une trentaine d’acteurs institutionnels de divers horizons impliqués dans la lutte contre les effets néfastes des changements climatiques.

«Les femmes peuvent jouer et jouent effectivement un rôle essentiel dans la réponse au changement climatique en raison de leurs connaissances locales et de leur leadership en matière de gestion durable des ressources et/ou de pratiques durables au niveau des ménages et de la communauté, par exemple», a souligné à cette occasion Imane Amzil, chargée de projet à l’AESVT.

Les femmes sont les plus dépendantes des ressources naturelles pour leur subsistance et, par conséquent, elles sont désormais reconnues comme les acteurs les plus importants dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques climatiques», a-t-elle ajouté.

Manal Bidar, jeune activiste âgée de 17 ans, a livré pour sa part un témoignage inspirant sur sa mobilisation pour la protection de l’environnement. Une mobilisation amorcée dès l’âge 13 ans par une campagne de sensibilisation au changement climatique et qui s’est renforcée au fil des ans pour la mener au poste de conseillère au Gouvernement Parallèle des Jeunes en novembre 2019. Entre temps, elle a été ambassadrice de l'initiative AYCH (African YOUTH Climate HUB), porte-voix de la jeunesse marocaine et africaine au «Women’s Forum A Call to G20» et représentante du Maroc et L'initiative AYCH au sommet Jeunesse-Climat des Nations Unies, entre autres.

Un autre témoignage de l'action féminine pour le développement inclusif et durable des territoires marocains a été apporté par Saâdia Oulfakir, figure de la coopérative féminine Amagar, spécialisée dans culture des plantes aromatiques et du safran à Zaouiat Ahansal dans la région de Marrakech. Une belle histoire de persévérance et de détermination qui a assuré une autonomisation économique aux femmes du village et ses environs via une culture naturelle et respectueuse de l’environnement.

Pour Janet Rogan, cette rencontre a été un grand moment de partage mais également de réflexion. «C’est très important pour moi de créer un espace ouvert aux femmes de la région pour qu’elles puissent exprimer leur approche et discuter de la manière dont on peut mieux les accompagner pour l’atteinte de leurs ambitions», a-t-elle déclaré dans un entretien accordé au «Matin» en marge de la rencontre. L’occasion de revenir sur ses principaux échanges avec les acteurs étatiques et non-étatiques marocains et sur le positionnement du Royaume en matière de climat, mais aussi de s’enquérir des préparatifs de la 26e Conférence des Parties des Nations unies sur le changement climatique, organisée par le Royaume-Uni en partenariat avec l’Italie.

Interview avec Janet Rogan, Ambassadrice de la COP26 pour l’Afrique et le Moyen-Orient

Le président désigné de la COP26 est très conscient du rôle primordial du Maroc dans l’agenda climatique et de notre devoir d’écouter les priorités et les positions du Maroc

Le Matin : Vous êtes arrivée au Maroc avec un agenda chargé qui comprend plusieurs rencontres avec différents acteurs des monde politique, économique et de la société civile. Sur quoi ont porté ces rencontres et quelles sont les principales impressions que vous en avez tirées ?

Janet Rogan : Tout d’abord, pour vous donner une brève description de mon rôle en tant qu'ambassadeur régionale    pour le  Moyen Orient et l’Afrique, je suis en liaison avec les gouvernements, les entreprises et la société civile de la région, dans l’objectif de contribuer à établir une collaboration et une compréhension sur toutes les questions liées à la COP26.

Le Royaume-Uni co-organise la COP26, en partenariat avec l'Italie, en novembre 2021. Pour promouvoir les objectifs de la COP26, je travaille en collaboration étroite avec le réseau des ambassades du Royaume-Uni dans la région, ainsi qu'avec les champions de haut niveau des Nations Unies, les centres régionaux de la CCNUCC et d'autres organisations. En faisant avancer les négociations de la COP26 conformément à l'Accord de Paris (AP), nous voulons encourager tous les pays à présenter des Contributions Déterminées au niveau National 2030 (CDN) ambitieuses et des stratégies à long terme pour atteindre le plus rapidement possible zéro émission de carbone d’ici 2050 au plus tard et aussi pour aider les sociétés et les économies à s'adapter au changement climatique, en particulier les plus vulnérables.

En tant qu’Ambassadrice Régionale de la COP26 pour le Moyen-Orient et l’Afrique, je suis très heureuse de revenir au Maroc après ma participation à la COP22 en 2016, pour s'engager avec une grande variété de parties prenantes, notamment des entreprises, des individus, des groupes autochtones et des jeunes. Mes rencontres sont alignées avec les priorités thématiques clés de la COP26 pour encourager l'ambition et l'action. Il s'agit de l'adaptation et de la résilience, de la transition énergétique, des transports propres, des solutions basées sur la nature, et de la finance.

Quelle évaluation faites-vous des efforts consentis par le Maroc en matière de climat ? Peut-on parler d’un leadership régional du Maroc dans l'action climatique ? 

Le président désigné de la COP26 est très conscient du rôle primordial du Maroc dans cet agenda et de notre devoir d’écouter les priorités et les positions du Maroc. En plus des projets qui parlent d’eux même sur le terrain, la crédibilité de la COP22 qui s’est tenue à Marrakech au Maroc en novembre 2016 « COP de l’action » a positionné le Maroc davantage comme précurseur dans les politiques des énergies renouvelables, dans la lutte contre le changement climatique, et ce avec une envergure globale mais surtout africaine où le Maroc a pu accentuer son rôle pionnier en politiques énergétiques.

Le leadership du Maroc sur le climat et l’énergie verte est plus important que jamais avec une Contribution Déterminée au Niveau National (CDN) révisée, ambitieuse et transparente, ainsi que les recommandations stratégiques du nouveau modèle du développement qui met l’action climatique, la protection des ressources naturelles et l’énergie verte au cœur des paris du développement du Maroc. Cela démontre un leadership exemplaire dans la région. A travers mes différentes réunions avec les acteurs étatiques et non-étatiques, nous nous sommes accordés pour booster les échanges d’expériences de la COP22 avec l’unité de la COP26, ainsi le Royaume-Uni et le Royaume du Maroc continueront au-delà de la COP26 à renforcer leurs efforts au niveau bilatéral et multilatéral. 

Dans le cadre de vos échanges avec la société civile, vous êtes partie à la rencontre des femmes marocaines qui s’activent dans le secteur du climat. D’abord pourquoi les femmes spécifiquement et ensuite sur quoi les échanges ont-ils porté ?

D’après ONU Femmes (UN Women), 70% des victimes des catastrophes naturelles sont des femmes. Et le changement climatique ne va qu’accentuer cette inégalité. Face à cette situation préoccupante, des femmes se mobilisent pour que soit prise en compte la place spécifique des femmes dans la question climatique.

Les femmes que nous avons reçues sont un exemple de plusieurs femmes leaders qui se mobilisent, chacune de son côté, pour la cause climatique. C’était un moment de partage mais également de réflexion, car c’est très important pour moi de créer un espace ouvert pour les femmes de la région pour exprimer leur approche et discuter comment on peut mieux les accompagner pour l’atteinte de leurs ambitions.

Pour en revenir à la COP 26, pouvez-vous nous présenter un tour d’horizon global de cet événement climatique mondial qui se tiendra à Glasgow au mois de novembre prochain ?

Alors ce que nous devons accomplir à la COP26, je peux le résumer comme suit :

  • Obtenir d’ici le milieu du siècle la neutralité carbone dans le monde et garder l’objectif de à notre portée.

Les pays sont invités à présenter pour 2030 des objectifs ambitieux de réduction des émissions (par leurs contributions déterminées au niveau national - CDN) conformes à la réalisation de la neutralité carbone d’ici le milieu du siècle. Pour atteindre effectivement ces cibles ambitieuses, les pays devront accélérer l’élimination progressive du charbon, encourager les investissements dans les énergies renouvelables, enrayer la déforestation et passer plus rapidement aux véhicules électriques.

  • S’adapter pour protéger les communautés et les habitats naturels.

Le climat est déjà en train de changer et il continuera à changer, avec des effets dévastateurs, alors même que nous réduirons nos émissions. Lors de la COP26, nous devons coopérer pour habiliter et encourager les pays affectés par les changements climatiques à protéger et rétablir les écosystèmes, ériger des défenses, mettre en place des systèmes d’alerte et rendre leurs infrastructures et leur agriculture plus résilientes afin d’éviter les pertes d’habitations, de moyens de subsistance et de vies humaines.

  • Mieux Mobiliser des capitaux.

Pour réaliser nos deux premiers objectifs, les pays développés doivent tenir leur promesse de réunir au moins 100 Mrd GBP (142 Mrd USD) par an pour le financement de la lutte contre le changement climatique. Les institutions financières internationales doivent jouer leur rôle et nous devons nous employer à débloquer les billions de capitaux privés et publics nécessaires pour obtenir la neutralité carbone mondiale.

  • Pour tenir nos promesses.

Ce n’est qu’en coopérant que nous pourrons relever les défis des changements climatiques. À l’occasion de la COP26, nous devons parachever le « Rulebook » de Paris, à savoir les règles nécessaires à l’application de l’Accord de Paris. De plus, nous devons muer nos ambitions en action en accélérant la collaboration entre les gouvernements, les entreprises et la société civile pour atteindre plus rapidement nos objectifs pour le climat.

Déclaration de S.E.M. Simon Martin, Ambassadeur du Royaume-Uni au Maroc

La COP26 a donné un nouvel élan à notre travail commun

«L'action et la coopération en matière d'action climatique sont au cœur des deux agendas de nos Royaumes, et dans ce sens, nous travaillons très étroitement dans le cadre du processus COP26, et de manière bilatérale. Le Maroc est leader sur cet agenda et nous sommes partenaires d'ambition, mais aussi porteurs de votre héritage de la COP22 [sur l'Afrique, sur l'adaptation et sur la mise en œuvre de l'Accord de Paris].

Il n’y a aucun doute que la COP26 a donné un nouvel élan à notre travail commun. Nous soutenions déjà la transition énergétique et la décarbonation du Maroc, à travers un soutien de la Banque mondiale et le financement climat pour Noor Ouarzazate (une subvention de 136 M£), ainsi que des travaux sur les données eau et climat, à Souss Massa, et en préparation des événements météorologiques extrêmes. Sur l'adaptation, nous avons travaillé avec l'INRA sur l'agriculture résiliente au climat, et nous continuons à financer les travaux importants de l'Initiative d'Adaptation de l'Agriculture Africaine (AAAi) et également de la Plateforme Internationale sur les Métriques d'Adaptation (IPAM).

Maintenant, dans le contexte de la COP26, nous avons associé le Maroc au Dialogue sur l'agriculture durable de la COP26 et au Conseil de Transition Energétique (ETC) de la COP26, composé de 14 pays. L'ETC associe le soutien des donateurs aux moyens d'accélérer la transition des combustibles fossiles vers des énergies propres et à la suite de la 3e réunion ministérielle du 13 juillet, nous avons organisé le deuxième dialogue national le 16 juillet, axé sur le soutien aux investissements dans les énergies propres dans les régions et sur la manière dont nous pouvons construire sur les recommandations du Nouveau Modèle de Développement.»

Le secteur privé et la société civile sont également des partenaires essentiels à cet égard et nous sommes honorés de travailler avec 4C Maroc, l’Alliance Marocaine pour le Climat et le Développement Durable (AMCDD), l’Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre (AESVT), l'Italie et le British Council sur l'engagement des jeunes, ainsi qu'avec la CGEM et la Fondation Mohammed VI pour la Protection de l'Environnement, pour promouvoir ce que les entreprises font déjà ici et encourager l’inscription au Race to Zero et au Race to Resilience de l'ONU.

Déclaration de Imane Amzil, chargée de projet à l’AESVT

La justice climatique et la durabilité environnementale dépendent du leadership des femmes et des jeunes

«Les femmes ont montré la voie dans les mouvements pour l'action climatique et pour l'environnement, mais les hommes occupent 67% des rôles décisionnels liés au climat. La justice climatique et la durabilité environnementale dépendent du leadership des femmes et des jeunes. Pour ce faire, il faut :

  • Soutenir et élire des femmes leaders qui militent en faveur de politiques environnementales.
  • Écouter et amplifier les voix des femmes et des filles dans le mouvement pour le climat.
  • Exiger une représentation égale des femmes dans les groupes d'action, les équipes, les comités pour l'action climatique, … aux niveaux local, national et international.
  • Lire et partager les récits des femmes à l'avant-garde de l'action climatique dans le monde.
  • Les femmes et les filles doivent faire partie intégrante de la solution.
  • Revoir et Intégrer les droits des femmes dans la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.
  • Donner plus de poids à la justice de genre dans les réponses sur le climat.

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